TNTV vous le révélait lundi : des cas suspects de Covid-19 ont été détecté à bord du « Charo », un bateau de pêche en provenance de l’Équateur qui se dirige vers les Marquises. Sur les 30 personnes à bord, 3 d’entre elles sont suspectées d’avoir le coronavirus. Deux auraient de la fièvre et une serait en détresse respiratoire.
« On espérait bien sûr passer au travers puisqu’on était indemnes jusqu’à présent de cas de Covid-19. Mais c’est vrai qu’avec les voiliers, au début on était inquiets, mais une fois qu’ils ont été confinés et qu’ils ne bougeaient plus, on était rassurés, » explique Débora Kimitete, vice-présidente d’une association marquisienne de protection de l’environnement « Te kua o te henua enana ».
« On s’inquiète parce qu’on voit beaucoup de bateaux de pêche qui viennent pour une raison ou une autre, que ce soit parce qu’ils ont un blessé à bord, une pièce défectueuse etc. et on ne comprend pas pourquoi ils sont si près de nos îles. Est-ce qu’ils pêchent ? On ne sait pas, et on aimerait avoir plus d’informations parce que sinon il y a des tas de bruits qui circulent, une psychose qui s’installe… S’il y avait une bonne transparence des informations, cela se passerait mieux (…) On constate, et les pêcheurs le disent, qu’il y a beaucoup de bateaux de pêche dans nos eaux. Après, on ne sait pas s’ils pêchent ou s’ils traversent puisque le droit international leur permet de traverser notre ZEE. Mais comme on est au nord vraiment de notre ZEE, ils sont à la limite, c’est-à-dire qu’ils peuvent venir pêcher et repartir, même si les satellites les voient, ils sont déjà dans les eaux internationales, c’est ça qui nous agace », poursuit-elle.
– PUBLICITE –
Le bateau accostera à Haahopu, « terre déserte »
« Ce qui nous inquiétait concernant ce bateau de pêche, c’est qu’il soit en contact avec la population et qu’il puisse après contaminer. Mais là, maintenant, on est rassurés, puisque ce bateau de pêche va aller à Haahopu, une baie qui se situe à 7 kilomètres de l’aéroport et ils vont être débarqués directement, donc il n’y aura pas de contact avec la population, à part avec les équipes médicales et les pompiers de l’aéroport qui seront là pour donner le coup de main », nous dit encore Débora Kimitete.
« Je pense qu’on peut faire confiance aux professionnels de santé pour la prise en charge de ces malades. (…) On ne peut pas, en tant que Polynésien, dire qu’on ne peut pas porter assistance à personne en danger, et pas besoin d’être Polynésien d’ailleurs pour ça. Si on a les moyens de les sauver sans se mettre nous-mêmes en danger, il faut le faire. Je suis tout à fait d’accord avec ça », déclare par ailleurs Teiki Huukena, activiste en faveur de la protection de la culture et de l’île de de Nuku Hiva, mais également président de l’association Patutiki.
C’est pas parce qu’on est dans notre archipel éloigné de Tahiti que l’on ne pense pas à toute la Polynésie française.
Teiki Huukena
« C’est pas parce qu’on est dans notre archipel éloigné de Tahiti que l’on ne pense pas à toute la Polynésie française. J’ai de la famille à Tahiti. (…) Là, ce bateau qui est venu ici, aux Marquises, la question est : comment ça se fait que ce bateau-là est arrivé à côté de chez nous ? Avec le coronavirus, ils devraient plutôt rester dans leurs côtes, mais maintenant ils sont tout près. On ne peut pas laisser quelqu’un mourir si on a les moyens de le sauver. (…) Tout le monde s’inquiète. Qui a envie d’attraper ce virus ? Personne n’a envie de ça ! Nous demandons juste la mesure de précaution, ne pas ramener ce virus ici. C’est vrai que ça nous touche économiquement, mais peut-on mettre dans la balance l’économie en même temps que la santé ? L’économie peut se faire différemment aussi, comme l’a proposé la ministre du Tourisme d’ailleurs » ajoute Teiki Huukena.
Le maire, Benoît Kautai, tient néanmoins à rappeler que les procédures en cas de suspicion sont bien rodées : « La cellule de crise m’a informé hier, dans l’après-midi, qu’il y avait un bateau en provenance de l’Équateur dans nos eaux, avec 3 malades à bord. Ces malades présentent les symptômes du Covid-19. Cela reste à confirmer. Parmi les trois, l’un d’entre eux est en détresse respiratoire. Nous avons une centaine de bateaux dans la baie de Taiohae. Ils arrivent régulièrement. Normalement, il n’aurait plus dû y avoir de circulation de bateaux dans cette période. Le JRCC et la DPAM nous informent des flux. En théorie, ces navires ne font que se ravitailler ici avant de continuer leur route. Tous ont fait entre 20 et 30 jours de mer. S’ils sont contaminés, ils doivent le savoir en arrivant ici. On a convenu d’une procédure : pas de débarquement à quai tant qu’on n’est pas sûrs de l’état sanitaire des personnes. On livre la nourriture jusqu’aux bateaux si besoin ».
Lire aussi > Navire en détresse aux Marquises : le droit à l’assistance médicale en mer
« Pour ce cas en particulier, j’ai demandé que le bateau ne vienne pas jusqu’à Taiohae. Il sera dérouté dans une petite baie pas loin de l’aéroport : Haahopu. Elle sert à débarquer le carburant en général. L’équipage arrivera demain matin là-bas. Un avion militaire avec une équipe médicale va les rejoindre dans la baie pour prendre en charge les trois malades et peut-être faire des prélèvements aux 27 autres » précise Benoît Kautai.
« Il y a une inquiétude au niveau de la population. »
Benoît Kautai
« Il y a une inquiétude au niveau de la population. En tant que maire, j’ai aussi des responsabilités. J’aurais aimé que le bateau poursuive sa route jusqu’à Papeete, mais les malades avaient besoin d’une prise en charge rapide. On doit leur sauver la vie si on le peut » conclut le maire de Nuku Hiva.