TNTV : L’état de calamité naturelle vient d’être constaté. De quelle enveloppe budgétaire dispose le pays pour intervenir ?
Jean-Christophe Bouissou, Vice-président de la Polynésie française : Nous avons au niveau du budget une inscription annuelle qui est aujourd’hui de 400 millions de francs et qui peut être augmenté simplement par une modification rapide du budget. Elle permettra de couvrir l’ensemble des dépenses issues de la reconstruction des logements, des aides de matériaux qu’on va pouvoir fournir aux familles, quelles que soient les familles. J’ai entendu tout à l’heure certaines familles dire « peut-être qu’on ne rentre pas à l’intérieur de ce réglementation », mais si. Nous ne sommes pas sur une intervention sur du logement social, nous sommes sur une intervention de calamité naturelle qui englobe en toute équité les familles polynésiennes qui ont été touchées.
Cela englobe aussi les familles qui auraient construit en zone rouge ?
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Il nous faut intervenir, on l’a fait déjà par le passé en 2017 lorsqu’il y a eu des grosses crues des rivières. Nous avons aidé les familles à reconstruire leur maison ailleurs, dès l’instant où les familles l’acceptent, y compris les familles qui sont en zone rouge. Je dirais même avec une évolution qu’on va apporter au niveau de la réglementation, même si on est en zone rouge, avec un certain nombre de préconisations notamment de surélévation des maisons.
Ces submersions marines arrivent et passent sur les terrains… Si les maisons sont érigées à un mètre 50 voire 2 mètres de hauteur, ça permet quand même de protéger les familles à l’intérieur de leur demeure.
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Aujourd’hui vous appelez les sinistrés à se manifester comment faire aurez-vous les arbitrages concernant les demandes d’aides ?
Nous allons mettre en place une commission avec à la fois des services du pays, les affaires sociales de l’OPH, de l’équipement, y compris des maires et de l’État. Il n’y a pas que le clos et le couvert, il y aussi le mobilier, les réfrigérateurs, les ustensiles de vie pour les gens, les matelas… L’ensemble de ces éléments fait partie des aides publiques que nous pouvons apporter.
Mr le Vice-président, abordons un autre sujet. Vous rentrez tout juste de Suva, à Fidji, où vous avez assisté au 51è sommet du forum des îles du Pacifique. On parle beaucoup de l’influence chinoise sur notre région. Quel regard porte le gouvernement à ce sujet ?
On a l’impression qu’on rentre dans un changement de paradigme avec le conflit en Ukraine et l’invasion russe dans ce pays. Il y a cette tension qui cristallise les blocs Ouest et Est, puis vient se mêler une tension entre la Chine et ces grands pays. Je pense aux Etats-Unis qui ont fait une intervention au cours du forum. Notre position, qui est la position défendue par la France, c’est d’éviter de re-cristalliser et re-noyauter les forces au sein de la zone Indo-Pacifique. Il ne faut pas qu’on rentre dans une certaine forme d’escalade à l’encontre de la Chine, il faut laisser une porte ouverte de dialogue. Il faut qu’on puisse vivre et travailler dans cette zone, hors de conflit.
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Les Etats-Unis ont annoncé leur retour en force dans la zone, avec l’ouverture de deux ambassades, le lancement d’une stratégie nationale pour la zone, mais aussi le versement de près de 68 milliards de francs pour l’Agence des pêches du forum. Comment percevez-vous cela ?
L’intervention des américains, c’est de dire « on regrette de vous avoir oubliés », on vous amène énormément d’aides, notamment sur la régulation en matière de pêche. 600 millions de dollars, c’est 60 milliards de Fcfp sur une dizaine d’années. C’est très bien que les États-Unis interviennent, mais il faut aller beaucoup plus loin. Ce n’est pas uniquement une affaire de pêche, de préservation. C’est une affaire de conditions de vie, y compris des populations. C’est ce que j’ai eu l’occasion de dire aux chefs d’État de l’Australie, la Nouvelle-Zélande et d’autres : il faut que les États-Unis s’impliquent largement plus pour améliorer les conditions de vie des populations, et pas seulement sur un intérêt militaire.
Les îles vulnérables ont demandé des mesures urgentes et immédiates. Comment répondre aux besoins les plus urgents en la matière ?
Les besoins urgents sont très vastes : il y a des besoins urgents sur le phénomène du réchauffement climatique. C’est le cas de Kiribati qui a malheureusement quitté le forum. J’ai compris qu’il y avait une volonté de réparer ce lien qui s’est cassé, nous sommes ouverts aux aides en faveur de ces pays. Kiribati est dans une grande vulnérabilité au regard de l’élévation du niveau des océans. Les gens doivent trouver à se réfugier quelque part ailleurs. Le premier ministre de Papouasie-Nouvelle-Guinée a très clairement dit qu’ils étaient près à les accueillir. Ils ont dit « nous avons des terres montagneuses, nous pouvons accepter ces populations qui sont en situation de vulnérabilité. C’est la solidarité entre nous, au sein du forum, qui permettra à nos populations de pouvoir survivre demain, hormis des intérêts financier.