Bora Bora : La guerre des pharmacies, épisode IV

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La saga de la seconde pharmacie de Bora Bora s'est poursuivie ce mardi au tribunal administratif de Papeete. Contestées par la pharmacie Lafayette de Vaitape, l'ouverture et l'exploitation de la pharmacie Te Ora, à Nunue, sont une nouvelle fois suspendues à la décision de la justice.

Publié le 12/12/2023 à 15:43 - Mise à jour le 13/12/2023 à 7:23

La saga de la seconde pharmacie de Bora Bora s'est poursuivie ce mardi au tribunal administratif de Papeete. Contestées par la pharmacie Lafayette de Vaitape, l'ouverture et l'exploitation de la pharmacie Te Ora, à Nunue, sont une nouvelle fois suspendues à la décision de la justice.

La quatrième tentative du Dr Teano Cojan d’ouvrir sa pharmacie à Bora Bora sera-t-elle la bonne ? Si son dossier n’avait pas été sélectionné par les autorités en 2020, il avait ensuite reçu le feu vert du Pays, à deux reprises, pour exploiter la deuxième officine de l’île, attendue depuis 2019. Autorisations chaque fois annulées par le tribunal administratif, pour les mêmes raisons : le projet du Dr Cojan « ne répond pas de façon optimale au besoin de la population en médicaments » . Ce dernier a finalement ouvert sa pharmacie Te Ora à Nunue, fin octobre, après avoir reçu une troisième autorisation du Pays. C’est pour faire annuler celle-ci que le gérant de la pharmacie concurrente de Vaitape, Nicolas Loyer, a saisi le tribunal administratif ce mardi.

Lire aussi – Bora Bora : l’autorisation d’ouverture d’une seconde pharmacie de nouveau annulée

Et le rapporteur public s’est encore prononcé pour l’annulation de l’arrêté du Pays, estimant – comme la Cour d’appel de Paris, qui s’est prononcée une première fois sur ce dossier le 20 octobre 2023 – que la population touristique et scolaire de passage à Nunue n’était pas précisément établie, et ne pouvait pas être prise en compte pour justifier l’exploitation de Te Ora.

Avocat de Te Ora, Me Lenoir a invité les juges à reconsidérer la réalité de Bora et ne pas s’arrêter au découpage de la population en quartiers, comme la loi de Pays le précise. « À Bora Bora, le quartier le plus spécifique est celui des touristes, insiste-t-il. C’est la destination touristique la plus prisée de Polynésie, les touristes ont droit à une offre de soin » . Et les locaux ont, selon lui, le droit d’avoir le choix. « On maintient le monopole de fait à Bora Bora. Rien que pour cela, on ne satisfait pas l’intérêt général » , lance-t-il.

Le Dr Cojan a lui-même pris la parole après son conseil, s’appuyant sur les 2500 signatures de sa pétition en ligne « contre le monopole pharmaceutique de Bora » et sur son premier bilan chiffré après 50 jours d’exploitation : 8 employés dont 6 à temps plein, 15 pilules contraceptives délivrées à des mineures, 30% de la population de l’île venue acheter au moins un produit et 12 millions de Fcfp de chiffres d’affaires. « Ça fait plus de 3 ans et demi qu’on n’avance pas du tout (…) Les gens sont heureux d’avoir le choix » , soutient-il.

« Ça fait plus de 3 ans et demi qu’on n’avance pas du tout (…) Les gens sont heureux d’avoir le choix » , a déclaré le Dr Teano Cojan, gérant de la pharmacie Te Ora (Crédit Photo : TNTV)

S’il estime que ces premières données reflètent l’intérêt général de Te Ora, ce n’est pas l’avis de Me Dumas, avocat de Nicolas Loyer. « Tout cela, c’est du discours (…) J’aimerais bien qu’il me justifie de ces chiffres » , déclare-t-il. Me Dumas explique s’en remettre à une interprétation stricte de la loi de Pays. « Si la Polynésie française n’est pas satisfaite de cette loi, elle n’a qu’à la changer » , a-t-il répondu au Pays et à l’Arass qui avaient, dans un premier temps, favorisé l’installation d’une deuxième officine sur Anau. Mais tous les médecins étant installés dans la partie Ouest de l’Île, les autorités avaient finalement soutenu le projet du Dr Cojan – seul candidat après le retrait de Myriam Tigniol – de s’installer à Nunue, soutenant un « accès plus optimal à l’offre de soins » .

« Le Pays est en train d’expliquer qu’il faut créer des déserts médicaux où il n’y a ni offre médicamenteuse, ni offre de soins, souffle Me Dumas. Il ne faut pas avoir une vision court-termiste qu’on essaie de nous vendre (…) Au regard de la densité de population, ce n’est certainement pas possible d’ouvrir une troisième pharmacie (…) Si on autorise celle-ci, on permet ad vitam aeternam la concentration de pharmacies sur le même secteur de l’île, ce qui n’est pas du tout dans l’intérêt de la population » , estime-t-il.

La décision du tribunal sera rendue le 16 janvier 2024.

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