Nucléaire : deux bébés contaminés in utero, selon l’association 193

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L'association de défense des victimes du nucléaire 193 a fait un état des lieux, ce matin, des demandes d'indemnisations depuis 2018. Elle nuance le bilan plutôt positif du Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN). Surtout, elle met en avant la possibilité de contaminations de bébés, durant la grossesse de leurs mères. Une première pour Père Auguste...

Publié le 05/08/2020 à 14:35 - Mise à jour le 06/08/2020 à 9:08

L'association de défense des victimes du nucléaire 193 a fait un état des lieux, ce matin, des demandes d'indemnisations depuis 2018. Elle nuance le bilan plutôt positif du Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN). Surtout, elle met en avant la possibilité de contaminations de bébés, durant la grossesse de leurs mères. Une première pour Père Auguste...

Vingt-quatre ans après la fin des essais en Polynésie : « le nucléaire continue à faire des dégâts », pour Père Auguste Uebe Carlson, le président de l’association anti-nucléaire 193.

Le militant mangarévien relève notamment deux cas de victimes qui auraient été contaminées in utero « Ces deux cas, identifiés au sein de l’association 193, voient leur contamination in utero reconnue par le CIVEN » affirme Père Auguste. »Ce qui veut dire que des mamans qui étaient enceintes durant ces années d’essais nucléaires ont pu contaminer leurs bébés. C’est la première fois qu’on observe ça! Nous comptabilisons 64 dossiers favorables depuis l’existence de la CARVEN (la cellule d’accompagnement et de réparation des victimes liées aux essais nucléaires), et c’est la première fois qu’on voit des cas de la sorte. Peut-être qu’il y en a d’autres ailleurs, mais nous, c’est la première fois qu’on voit ça! Nous avons deux cas de deux personnes nées il y a plus de 45 ans : elles ont développé leur maladie autour de 45 ans, et le CIVEN dit qu’elles ont probablement été contaminées in utero ».

Une situation qui interpelle l’association. Son président explique avoir mené des investigations aux Gambier sur les enfants morts-nés : « Toutes les familles en ont connu, là bas, après 1966. Ce n’était pas forcément le cas avant! ». Il lance un appel aux familles polynésiennes, afin qu’elles puisent dans leurs souvenirs pour qu’on puisse comprendre ce qu’il se passe. « Est-ce que c’est transmissible de la mère à l’enfant, ou est-ce que c’est une contamination dûe à l’environnement ? On ne sait pas. Le CIVEN est incapable de répondre à nos questions! », regrette Auguste Uebe Carlson.

« Beaucoup de scientifiques sont d’accord pour dire qu’il y a un lien de cause à effet entre des adultes touchés dans leur chair, modifiés dans leur chair, et qui peuvent devenir parents. On rappelle que le président Macron nous avait répondu de manière très favorable pour que des études transgénérationnelles soient menées. Pour l’instant il y en a pas. On attend toujours« !

Le cas de deux soeurs contaminées à Raivavae

La situation de deux sœurs, nées à Raivavae à un an d’intervalle, est également exposée par l’association : « Elles sont nées en 1964 et 1965. Les deux sœurs ont développé la même maladie, elles vivent au même endroit, elles ne l’ont jamais quitté. L’une, dont la maladie s’est déclarée en 2017, a vu son dossier validé. La seconde, dont la maladie s’est déclarée dix ans plus tôt, a vu son dossier rejeté. Qu’en conclure ? Nous avons d’autres cas similaires. »

193 dit douter de l’action du CIVEN. Le CIVEN qui fait état d’un bilan de 154 décisions favorables émises entre le 1er janvier 2018 et le 22 juin 2020. L’association nuance :  » Nous accusons l’Etat et le CIVEN de nous cacher des informations ! Ils ne disent pas tout ! ». Père Auguste dit déplorer de n’avoir aucune explication pour justifier les rejets de demandes d’indemnisations.

« Le rapport du CIVEN pour 2019 est un rapport biaisé! Le CIVEN oublie de parler des dossiers rejetés. Il y en a eu 92 en 2019. Dans ces dossiers, nous avons maintenant une certitude : celle qu’il y a une logique au sein du CIVEN. D’abord, les maladies des dossiers favorables et rejetés démontre que la moyenne d’âge de déclaration de maladie se situe entre 40 et 50 ans. C’est que la radioactivité peut être dans une personne durant 40, 50 ans, sans que cela ne se manifeste. Il y a donc un pan de l’imaginaire qui s’écroule, en disant « vous n’avez pas été contaminés tout de suite, donc, vous n’avez rien ». Nous faisons un autre constat. Le CIVEN parle souvent d’un taux de rejet de 50%. Quels sont les critères ? Nous commençons à comprendre que les choix d’indemnisations se portent le plus souvent sur les dossiers des personnes dont les maladies se sont déclarées le plus tardivement. Donc, dont l’indemnisation est plus légère. Les personnes qui vont déclarer les mêmes maladies, mais plus tôt dans le temps, sont souvent recalées », relève Auguste Uebe.

193 souhaite rencontrer les autorités et interpeller les candidats et les élus

À quelques semaines des élections territoriales, l’association interpelle directement les candidats : « Le bilan de Lana Tetuanui concernant le dossier nucléaire est catastrophique. Avant ça, le tribunal administratif allait presque toujours dans le sens des associations. Ce n’est plus le cas. Nous interpellons les futurs candidats pour qu’ils manifestent leurs intentions avant les élections. Qu’ils s’engagent à supprimer cet amendement. Nous faisons aussi appel à tous les tavana et grands électeurs pour qu’ils votent bien. S’il n’y a pas de retour sur cet amendement Lana, pour nous, c’est triste. Et ça va être dur à avaler pour les victimes »!

Le président de l’association conclut :  » On aimerait dialoguer avec Lana Tetuanui. On aimerait que le président Fritch veuille travailler avec nous. Mais on nous rejette. Il y a des jeux politiques. Les choses pourraient changer si Edouard Fritch voulait bien nous rencontrer… »

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