« Le 30 janvier 2020, la France était condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme pour l’indignité de ses prisons, et sommée de prendre des mesures pour y mettre un terme. Le 30 mai de la même année, cette condamnation devenait définitive. Deux ans après, qu’en est-il ?« , s’interroge l’OIP. Selon les chiffres, la situation n’est guère brillante. En mai 2022, 71 038 personnes étaient détenues en France et le taux d’occupation moyen en maison d’arrêt était de 138,9%. Actuellement, plus d’un détenu sur deux vit dans des prisons occupées à plus de 120%. Conséquence de cette surpopulation, 1 850 détenus sont contraints de dormir chaque soir sur un matelas posé au sol. D’autres prisonniers sont enfermés 22 heures sur 24 à deux, trois ou quatre dans des cellules de 9 m2, ce qui génère des tensions et des violences.
À ce jour, précise l’OIP, 42 établissements ont été condamnés par la justice française, et neuf établissements ont été condamnés par la Cour européenne des droits de l’homme. Dans les Outre-mer, la situation est la suivante :
En Guadeloupe, les maisons d’arrêt de Baie-Mahault et de Basse-Terre ont été toutes deux condamnées par la justice française pour conditions indignes de détention, et, pour la première, par la Cour européenne des droits de l’homme pour les mêmes raisons. En Martinique, le Centre pénitentiaire de Ducos a été également condamné par les deux instances. Pour la Guyane, le Centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly a été condamné par la justice française pour conditions indignes de détention.
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En Nouvelle-Calédonie, le Centre pénitentiaire Nouméa-Camp Est a aussi été condamné par la justice. « En février 2020, l’OIP saisissait le juge des référés du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de la situation du centre pénitentiaire de Nouméa. Dans des recommandations en urgence publiées en décembre 2019, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté s’était alarmée de ce que plusieurs centaines de personnes y étaient enfermées dans des containers maritimes tenant lieu de cellules vétustes et insalubres. Elle avait dénoncé une ‘situation qui viole gravement les droits fondamentaux des personnes détenues’ « , rappelle l’Observatoire. Saisi en appel, le Conseil d’État avait complété les injonctions de première instance en prescrivant au ministre de la Justice d’engager en urgence des travaux de mise aux normes, des mesures pas mises en œuvre pour la plupart à ce jour.
Concernant la Polynésie, le Centre pénitentiaire de Faa’a, Nuutania, a été condamné à la fois par la justice française et par la Cour européenne des droits de l’homme pour conditions indignes de détention. « Le 2 mars 2021, le Conseil d’État a de nouveau fait droit à une requête individuelle portant sur les conditions au sein de la prison polynésienne de Faa’a Nuutania. Le plaignant dénonçait notamment la prolifération des rats dans un bâtiment, qu’il disait ‘infesté’, et le fait qu’une cour de promenade ‘se retrouve fréquemment couverte d’eaux usées, comprenant notamment des déjections humaines’ », relève l’OIP. Le Conseil d’État avait formellement notifié « les traitements inhumains et dégradants que cela constituait pour les détenus et l’insuffisance des mesures prises par l’administration pour y remédier ».
Mayotte n’est pas en reste, même si son établissement n’a pas encore été condamné par la justice. « Ainsi, au centre pénitentiaire de Majicavo, les personnels décrivent des cours de promenade de 20 à 30 m2 dans lesquels se retrouvent entre 50 et 70 détenus : en septembre 2021, la maison d’arrêt accueillait 450 détenus pour 238 places« , souligne l’Observatoire international des prisons.
Dans leurs recommandations, l’OIP et Amnesty International appellent notamment à :
La mise en place d’un plan national d’action contre la surpopulation des prisons - dépénalisation de certains délits ; réduction du recours à la détention provisoire ; révision des conditions de jugement et de l’échelle des peines ; renforcement des alternatives à l’emprisonnement – L’instauration d’un mécanisme contraignant de régulation carcérale ; et Une réorientation des budgets alloués à l’accroissement du parc carcéral, qui devraient plutôt être affectés à l’amélioration des conditions de détention et au renforcement des alternatives à l’incarcération.