Cannabis thérapeutique : l’association Tahiti Herb Culture obtient un rendez-vous à l’assemblée

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Les membres de l'association Tahiti Herb culture (THC) se sont une nouvelle fois mobilisés ce jeudi pour se faire entendre sur l'usage du cannabis thérapeutique. Ils seront reçus le 2 décembre à l'assemblée.

Publié le 19/11/2020 à 16:17 - Mise à jour le 19/11/2020 à 16:48

Les membres de l'association Tahiti Herb culture (THC) se sont une nouvelle fois mobilisés ce jeudi pour se faire entendre sur l'usage du cannabis thérapeutique. Ils seront reçus le 2 décembre à l'assemblée.

Ce jeudi les membres de l’association Tahiti HERB Culture se sont rassemblés à l’Assemblée de la Polynésie française. Ils ont pu entrer et s’installer dans le hall avec l’accord du président de l’institution dans laquelle se tenait la 5e séance de la session budgétaire.

« On est là comme toujours depuis 8 ans, pour revendiquer l’usage thérapeutique du cannabis, expliquait ce matin le président de l’association Karl Anihia. Aujourd’hui, cette année 2020, tout nous est favorable pour pouvoir le revendiquer légitimement. Tous les textes législatifs sont en notre faveur et surtout la France a décidé de le faire, ce qui ne nous empêche pas de suivre le pas. (…) Si on devait reprendre l’historique de l’usage thérapeutique du cannabis, en juin 2019, l’ANSM (Agence national du médicament) a autorisé les essais cliniques. En octobre 2019, la chambre des députés a voté à l’assemblée l’autorisation de son usage thérapeutique. Et là, vendredi prochain c’est-à-dire le 24 novembre, l’ANSM avait lancé un appel d’offres pour les producteurs, il se termine là, la semaine prochaine. Nous aussi on aurait pu positionner la Polynésie dans ce cadre là. Là on parle d’emplois. Ça veut dire quoi concrètement ? Produire du cannabis, exporter en France, qu’ils transforment, en faire des produits et les essayer sur les 3000 patients prévues en France en mars 2021. C’est pour ça qu’on est là aujourd’hui, pour demander exactement la même chose, et pour ce faire il n’y a que là à l’assemblée, les textes de loi qui peuvent nous permettre de le faire. »

Crédit Tahiti Nui Télévision
Karl Anihia

Pour le député Moetai Brotherson, la légalisation du cannabis ne rapporterait pas autant qu’on pourrait l’imaginer à l’économie polynésienne : « Le cannabis thérapeutique, je ne pense pas que ça va booster l’économie parce que le marché local est très retreint. Les pathologies concernées par le cannabis thérapeutique, ça ne concerne pas non plus des milliers de personnes. Et puis il s’agit de médicaments. Pour pouvoir se positionner sur la fabrication de ces médicaments, il y a une montée en niveau qui pour l’instant n’existe pas mais qui pourquoi pas pourrait se faire. Après il y a la concurrence avec de grosses boîtes qui existent déjà. Je ne sais pas si on serait en capacité sur le thérapeutique de concurrencer les Canadiens, les Israeliens qui sont déjà sur ce secteur depuis longtemps et qui ont ce standard thérapeutique. »

Crédit Tahiti Nui Télévision
Moetai Brotherson

Mais se dit pour la légalisation du cannabis thérapeutique… et même récréatif : « Je pense qu’il faut évidemment que ce soit légalisé. Il y a actuellement une expérimentation qui est démarrée au plan national. J’ai demandé au ministre Olivier Veran de l’étendre chez nous, qu’on ai au moins un petit panel de patients qui puissent faire partie de cette expérimentation. Je pense qu’à terme il faut aller vers la légalisation du cannabis thérapeutique et industriel. En tout cas c’est ce que je porte depuis toujours. Et je complèterai par la légalisation du cannabis récréatif comme ça se fait au Portugal. »

De l’avis du député, la légalisation pourrait permettre de faire baisser les taux d’addiction : « Le Portugal a dépénaliser les drogues en 2000. Pas hier, il y a 20 ans. On a 20 ans de recul sur ce qu’ils ont fait. Si on regarde les courbes des taux d’addiction en France et au Portugal, on les compare, depuis 20 ans, la France n’a cessé d’augmenter le budget du tout répressif. Le Portugal a dépénalisé. Aujourd’hui la France est, je crois, championne d’Europe en terme de taux d’addiction et le Portugal a le taux d’addiction le plus faible en Europe. Donc voilà, il y a un système tout répressif qui ne marche pas, et il y a un système dépénalisé qui marche. »

« Mais l’hypocrisie qu’il y a aujourd’hui, elle n’est plus supportable, pas en 2020, (…) Vous savez, dans cet hémicycle, il y a des gens qui consomment du cannabis ».

Moetai Brotherson, député

« Je souhaite qu’on dépénalise l’usage récréatif, non pas parce que je souhaite que les gens se droguent. Ce n’est pas du tout ça. Moi je ne consomme pas de cannabis, je déconseille à mes enfants d’en consommer. Après ils font ce qu’ils veulent, ils sont majeurs et vaccinés. Mais l’hypocrisie qu’il y a aujourd’hui, elle n’est plus supportable, pas en 2020, estime Moetai Brotherson. Vous savez, dans cet hémicycle, il y a des gens qui consomment du cannabis mais bon voilà. Au bout de l’avenue Pouvanaa a Oopa aussi. Tout le monde a un ami qui est professeur, avocat, que sais je, qui consomme du cannabis comme d’autres boivent un petit cognac de temps en temps ou fument une cigarette. Le cannabis n’est pas un produit addictif. Il faut aussi sortir ça de la tête des gens. Au plan strictement chimique, ce n’est pas un produit addictif. Ensuite il y a une volonté d’en consommer à nouveau parce que ça fait du bien visiblement aux gens qui en consomment mais ce n’est pas addictif comme peuvent l’être des opioïdes ou certains médicaments prescrits par la médecine. »

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Après plusieurs tentatives, l’association THC se sent enfin écoutée : « C’est la troisième fois qu’on se rassemble devant l’assemblée. La première fois j’étais seul, la deuxième on était 30, cette fois on est 100, souligne Karl Anihia. Plus on est, plus on insiste, à un moment on nous écoute. Le président de l’assemblée veut bien nous accepter dans le hall, on a des chaises et il a accepté de recevoir 10 personnes, membres de l’association et malades, au sein de l’hémicycle (…) »

Moetai Brotherson estime qu’il y a aujourd’hui « une volonté » de la part du gouvernement d’avancer sur ce sujet. « On a vu que le Vice-président, ministre de l’Agriculture, a inscrit dans le Plan 2025 la légalisation du cannabis. Donc je pense que certaines personnes au sein du gouvernement sont ouvertes d’esprit là-dessus. Maintenant, il ne faut pas leurrer non plus les gens. C’est un sujet complexe dont une partie relève du champ de compétence polynésien, et une grande partie, la partie légale, judiciaire, là relève de l’Etat. Donc il y a deux volets : un volet règlementaire au plan local et un volet législatif au plan national. »

L’association THC sera officiellement reçue à l’assemblée le 2 décembre à 9 heures.

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