Les scientifiques de la mission ont également pu constater un blanchissement massif des coraux sur l’ensemble du Pacifique : si quelques sites étaient indemnes comme aux îles de Wallis et Futuna, la couverture corallienne avait été affectée à hauteur de 30 à 90% sur d’autres sites.
C’est arrivé à Ducie Island, à l’ouest de l’Ile de Pâques en novembre 2016 puis à Moorea, le mois suivant, que l’équipage de Tara a observé les premiers récifs fortement impactés par le réchauffement climatique.
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Alors que la mission se concentre essentiellement sur les réponses biologiques du corail aux bouleversements environnementaux, l’équipage a pu établir plusieurs observations :
Dans les zones très peu peuplées et très peu polluées comme la Polynésie, seule la hausse de température a pu induire une telle dégradation des coraux. « Plus l’augmentation de la température dépasse les normales attendues, et plus les durées d’exposition à ces fortes températures de l’eau sont longues et plus le blanchissement est fort », indique Serge Planes, chercheur au CNRS et directeur scientifique de la mission.
La combinaison de ces deux facteurs entraîne en effet la rupture de la symbiose entre l’algue et l’animal, donc la mort du polype si le réchauffement perdure au-delà de trois semaines. Selon Serge Planes : « On ne peut plus aujourd’hui parler d’épisodes ponctuels ou cycliques de hausse de températures, comme le phénomène climatique El Niño. Aujourd’hui, nous sommes en présence d’un réchauffement global de l’océan auquel s’ajoutent des périodes estivales très chaudes, de moins en moins espacées d’année en année. »
Pour Romain Troublé, directeur général de la Fondation Tara Expéditions, c’est la preuve que « limiter le réchauffement à deux degrés comme acté dans l’Accord de Paris est bien loin d’être suffisant pour les écosystèmes marins. »
« Ce que nous serons en mesure de dire avec les données originales de Tara Pacific, c’est quels sont les facteurs qui favorisent ou non la résistance des espèces coralliennes », explique Denis Allemand, directeur du Centre Scientifique de Monaco et codirecteur scientifique de l’expédition.
Les espèces aujourd’hui abondantes sont celles pour lesquelles les conditions sont idéales. Dans l’avenir, l’environnement deviendra favorable au développement d’autres espèces. Dans ce contexte de bouleversements, les capacités d’adaptation se développent. Cela laisse envisager des changements profonds des récifs coralliens dans les prochaines décennies.
La goélette est aujourd’hui sur la Grande Barrière de Corail et se rendra dans les jours et mois à venir en Nouvelle Calédonie, aux îles Salomon, en Papouasie-Nouvelle Guinée, en Indonésie, aux Philippines, à Palau, en Chine, au Japon, à Hawaï, où les chercheurs poursuivront le même protocole. Tara sillonnera alors des zones de biodiversité très riches, dont des zones très peu voire pas étudiées, notamment en Chine. Tara Pacific s’achèvera alors avec un retour du bateau en octobre 2018 à Lorient.