Nahema Temarii : « Depuis 10-15 ans, nous n’avons rien fait pour permettre à notre jeunesse de s’émanciper »

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La ministre de la Jeunesse et des Sports était l’invitée du journal de TNTV, ce mardi, notamment pour évoquer le récent rapport de la Chambre Territoriale des Comptes, critique sur l’accompagnement des plus jeunes en Polynésie. Pour autant, Nahema Temarii salue les travaux des magistrats financiers. « Enfin, on se préoccupe » de la jeunesse « en matière de politique publique », dit-elle. La ministre mise sur son prochain Schéma directeur pour faire bouger les ligne. Concernant les addictions, elle annonce l’ouverture du Pôle de santé mentale, « fin 2024, début 2025 ». Interview.

Publié le 06/11/2024 à 9:16 - Mise à jour le 06/11/2024 à 10:49

La ministre de la Jeunesse et des Sports était l’invitée du journal de TNTV, ce mardi, notamment pour évoquer le récent rapport de la Chambre Territoriale des Comptes, critique sur l’accompagnement des plus jeunes en Polynésie. Pour autant, Nahema Temarii salue les travaux des magistrats financiers. « Enfin, on se préoccupe » de la jeunesse « en matière de politique publique », dit-elle. La ministre mise sur son prochain Schéma directeur pour faire bouger les ligne. Concernant les addictions, elle annonce l’ouverture du Pôle de santé mentale, « fin 2024, début 2025 ». Interview.

TNTV : Dans son rapport, la CTC insiste sur la nécessité de faire voter à l’Assemblée avant la fin de l’année votre Schéma directeur de la jeunesse. Pour le réaliser, vous avez enchaîné les tournées, les Assises de la jeunesse et les missions dans les îles. Le Schéma pourra-t-il être présenté à l’Assemblée avant la fin de l’année, selon vous ?

Nahema Temarii : « En réalité, dans le rapport, la Chambre demande le vote de ce Schéma directeur par l’Assemblée, fin 2025. Donc la bonne nouvelle, c’est qu’on a un an d’avance sur les souhaits de la Chambre, puisqu’il était prévu initialement que ce Schéma soit proposé au vote, à la fois du CESEC, et de l’APF, fin 2024. Le circuit administratif étant ce qu’il est aujourd’hui, ce sera pour le début de l’année 2025 ».

TNTV : Parmi les recommandations, la CTC suggère, je cite, « d’améliorer dès à présent le pilotage interministériel des politiques publiques en faveur de la jeunesse ». C’est un retour qui émane également des acteurs du terrain. Faudra-t-il prévoir un Délégué interministériel de la jeunesse comme c’est le cas, par exemple, pour le climat ?

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Nahema Temarii : « Je pense que ça pourrait effectivement être une option. En tout cas, nous, on l’a envisagée. Le Délégué interministériel, la différence qu’il a avec un ministre, c’est qu’il n’a pas des équipes derrière lui, des techniciens pour permettre la mise en œuvre. J’ai bon espoir qu’avec notre gouvernement, parce qu’il existe cette inter-ministérialité, on arrive à aller jusqu’au bout de ce Schéma directeur. Dans ce Schéma directeur, les premières préconisations en termes de gouvernance, c’est la création de trois organes. Le comité de pilotage qui va faire le suivi, notamment des indicateurs, pour venir vérifier la performance des actions qui vont être déployées. Il y a également un troisième organe qui est le Conseil des jeunes qui a existé à une époque, qui a été mis en sommeil, et qui va falloir réanimer. Donc, j’ai bon espoir sincèrement qu’on y arrive. À l’échelle interministérielle, je n’ai pas d’inquiétude, pas de doute. Je pense que mes collègues du gouvernement et notre président Moetai Brotherson me connaissent suffisamment maintenant pour savoir que je ne lâcherai pas. Et je sais que je peux compter sur eux. Là où il va falloir qu’on soit particulièrement bon, parce qu’en fait, ça va au-delà de l’interministérialité pour moi, c’est permettre à l’ensemble des services et des établissements du Pays et de l’État de travailler ensemble. Parce que la jeunesse, comme le relève la Chambre, et bien en fait, c’est hyper transversal ».

TNTV : Selon le rapport, le grand nombre d’acteurs que vous venez de citer risque de compliquer la mise en œuvre des actions. Qu’en pensez-vous ?

Nahema Temarii : « Je n’en suis pas certaine. La jeunesse est une pleine compétence de la Polynésie. Donc le cap, il va être donné par le gouvernement. Mais ce cap, il est coconstruit avec les acteurs de terrain : les jeunes eux-mêmes, mais aussi les familles. Aujourd’hui, tout le monde est autour de la table et c’est une chance. Et je tiens à remercier la Chambre d’avoir ouvert la première enquête de notre gouvernement sur la jeunesse parce qu’enfin, on s’en préoccupe en matière de politique publique. Enfin, on le dit, on n’en fait pas assez, on ne le fait pas correctement puisque je rappelle que ce rapport de la CTC est fait sur un peu plus de trois années, 2018-2023. Aujourd’hui, la bonne surprise pour nous, c’est qu’au final, le cap qu’on a pris pour la jeunesse, avec la jeunesse, pour ce Schéma directeur ‘Forever Young 2035’, va venir répondre aux interrogations de la CTC ».

TNTV : Au sujet de la lutte contre les addictions qui est l’un de vos principaux défis, où en est la création du Pôle de santé mentale qui ne cesse d’être repoussé depuis 2019 ? Sur le territoire, il n’y a pas non plus de structure hospitalière dédiée au sevrage. Quand est-ce que le pays va passer à la vitesse supérieure sur ces sujets ?

Nahema Temarii : « La vitesse supérieure, pour moi, ça va être la concrétisation de tout ça.La bonne nouvelle, c’est qu’on s’est saisi au niveau de la jeunesse. C’est un sujet que la jeunesse n’a jamais porté, qui a souvent été porté par la Santé. Donc là, l’idée, c’est de venir travailler en partenariat étroit avec notre ministre de la Santé, Cédric Mercadal ».

TNTV : Quand est-ce que ces infrastructures pourraient voir le jour ?

Nahema Temarii : « En principe, fin 2024, début 2025, on a le Pôle de santé mentale qui sort. Jusqu’à preuve du contraire, il n’y a pas de modification, sauf si, derrière, il y a effectivement tout un lot de contentieux qui est mis en place, parce que c’est aussi le quotidien de l’administration. Là où je veux en venir, c’est qu’on a une initiative du privé qui a été menée par le collectif de Terainui Hamblin, et je les remercie sincèrement, parce que la vie civile va bien plus vite que l’administration.Derrière, il va falloir qu’on récupère tout ça. Et donc, il y a le plan, le ‘Diag Ice’ qui va sortir en ce qui concerne la méthamphétamine, mais on a d’autres initiatives qui viennent encore une fois de la vie civile. On a des groupes de parole avec un programme qui s’appelle Onihi, qui va permettre de créer des groupes de parole, d’accompagner les familles, en attendant que les infrastructures soient disponibles.C’est tout l’enjeu, finalement, d’un gouvernement et d’un ministre. On a les objectifs à long terme, et notamment les infrastructures, parce que ce sont des dossiers qui prennent du temps, et on va avoir les mesures transitoires qui vont permettre d’accompagner jusqu’à ce que les infrastructures puissent être disponibles ».

TNTV : Il y a un autre défi de taille auquel vous êtes confronté, c’est le manque de centralisation et d’harmonisation dans le suivi des données concernant les jeunes. Pour y remédier, vous prévoyez de créer un Observatoire de la jeunesse et de l’éducation populaire. En quoi ça devrait consister exactement ?

Nahema Temarii : « Je vais vous donner un exemple. Le rapport duquel on parle, il a été quand même lancé au mois de septembre l’année dernière, avec une prévision de finalisation au mois de février. Résultat des cours, on est en novembre, pour la simple et bonne raison qu’il a été impossible aux équipes de la CTC de collecter suffisamment de données. Donc cet Observatoire, son objectif, c’est de venir collecter, coordonner la data, suivre la mise en œuvre et les résultats de ce Schéma directeur. Mais j’ai aussi entendu les inquiétudes des politiciens qui siègent à l’Assemblée de la Polynésie française et qui ont bien plus d’expérience que nous, qui nous disaient : ‘oulala, des observatoires’. Donc, l’Observatoire va être créé, il va être doté de moyens humains et financiers, parce qu’en fait, comme bien même le rapport de la CTC est accablant, de 2018 à 2023, j’ai personnellement le sentiment que ça fait bien 10-15 ans que nous n’avons rien fait de concret pour permettre à notre jeunesse de s’émanciper et de trouver sa place dans la société d’aujourd’hui ».

TNTV : Ce sont donc sur ces mots que s’achève cette interview.

Nahema Temarii : « Maruuru. Je profite juste de ma présence sur le plateau, parce que je n’ai pas eu le temps de le faire, pour féliciter l’ensemble des athlètes, hommes, femmes, jeunes, paras, pour la 31ᵉ édition de Hawaiki Nui Va’a. L’événement s’est déroulé dans de très bonnes conditions. Évidemment, j’associe à ces remerciements et à ces félicitations le comité organisateur local, l’ensemble des tavana des communes, mais aussi et surtout, parce qu’on les oublie souvent, les clubs et les coachs. Maruuru, à toutes les familles, pour cette mobilisation. Vous étiez près de plus de 1000 athlètes à prendre le départ au Raromatai. Longue vie au va’a, longue vie à Hawaiki Nui ».

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