TNTV : La famille d’Ayden vous a interpellée. Avez-vous quelques réponses quant aux questions qui ont été soulevées ?
Minarii Galenon : « Avant tout, je voulais vous dire devant ceux qui nous regardent, que c’est vraiment avec grande tristesse et beaucoup de douleur que je suis devant vous. Pas que moi, mais aussi le gouvernement, puisque j’étais avec le président aujourd’hui. Nous nous sommes longuement entretenus sur cette situation dramatique. Je veux vous dire qu’en tant que ministre des Solidarités, c’est vraiment la plus grande épreuve qu’on peut subir et qui est très, très douloureuse. Aussi, en tant que maman et grand-mère, je voulais transmettre tout mon respect et mon soutien par rapport à la douleur. C’est vrai que depuis tout à l’heure, je n’ai que des témoignages qui sont dans les émotions et j’approuve tout à fait ».
TNTV : Mais comment peut-on expliquer ce qui semble être un aveuglement collectif ?
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Minarii Galenon : « Expliquer ce soir, c’est très difficile. Ce que je veux simplement dire, c’est qu’il y a une enquête aussi qui est menée au niveau de mes services. Ce que je peux répondre, en premier lieu, c’est que toutes les procédures ont été suivies régulièrement. Maintenant, il peut y avoir des défaillances à certains points parce que, comme vous le savez, nous ne sommes pas seuls. Nous sommes plusieurs partenaires. Mais ce que je retiens, c’est que nous devons dorénavant travailler ensemble, apprendre à travailler ensemble, parce que cet événement devient un événement sociétal grave. Parce que c’est toute la Polynésie, c’est tout Maohi Nui qui est vraiment dans la douleur. Et c’est vrai que ça ne peut pas rester sans être résolu et apporter des solutions ».
TNTV : 2526 mineurs sont signalés au fenua, et 882 d’entre eux sont placés. Les services sociaux sont-ils suffisamment armés, suffisamment nombreux pour faire face à cette violence qui touche les enfants ?
Minarii Galenon : « Non. En l’état, je vous dis que les services sociaux ne sont pas bien armés. Mais ce qu’il faut savoir, c’est que depuis le début de l’année, j’ai présenté un schéma directeur de l’Organisation sociale et médico-sociale, et de la réorganisation de la DSFE. Nous avons commencé ce travail. Mais avec cet événement tragique, je sais que je dois venir aider déjà la cellule qui s’occupe de l’enfance sans danger. Parce que pour moi, c’est primordial ce soir ».
TNTV : En créant, par exemple, de nouveaux postes ?
Minarii Galenon : « Voilà. Ce soir, par exemple, je peux vous dire que dès la semaine prochaine, nous ouvrons 20 postes. Puisque nous voulons avoir des assistants sociaux qui viendront aider les travailleurs sociaux qui sont déjà en poste ».
TNTV : Avons-nous déjà des gens qualifiés capables d’exercer cette fonction ?
Minarii Galenon : « Oui. Nous avons des étudiants, voire des titulaires de BTS, beaucoup de CV. Ce qu’il faut savoir, c’est qu’on nous demande beaucoup de diplômes pour être travailleur social. Il y a beaucoup d’années d’études. Nous avons déjà des étudiants qui ont fait trois années d’études qui peuvent venir aider ceux qui sont déjà en place. Parce que je tiens à rappeler que je n’ai que 40 travailleurs sociaux qui suivent vraiment les enfants en danger. Pour comparaison, en métropole, ils ont 30 dossiers. Chez nous, on est à plus d’une centaine de dossiers par travailleur social. Et je suis consciente du problème ».
TNTV : Dans le reportage précédent, une psychologue nous dit qu’il y a eu des constats, qu’il y a eu des signalements. Et finalement, il y a un problème de maillage, il y a un problème de connexion entre ces différents services. Que répondez-vous et que pouvez-vous faire ?
Minarii Galenon : « Je suis tout à fait d’accord quand on parle, peut-être, de manque de communication entre tous les réseaux. D’ailleurs, je m’applique à mettre tout ça en coordination. Les établissements sociaux que nous gérons dans ces foyers ont besoin d’être revalorisés. C’est ce que nous faisons depuis le début de l’année, c’est de les rencontrer et de voir les problèmes et surtout de les former. Parce que c’est un problème aussi de formation. On parlait aussi du manque des accueillants familiaux. On n’en a que 28 agréés. Je vais faire une formation de 60 accueillants familiaux, parce que c’est dans mon programme, ma feuille de route de ministre »
TNTV : Mais on sera encore loin des besoins….
Minarii Galenon : « Aujourd’hui, je me dis que c’est un problème macrosystémique de la société. On ne peut pas mettre en cause l’éducation ou le social. C’est un problème qui concerne toute la société. Sachez que depuis que je suis ministre, je travaille aussi avec les confessions religieuses. Parce que les confessions religieuses sont aussi un bon soutien pour tout le monde. Donc pour ce problème, je dis qu’il faut d’abord qu’au niveau de la DSFE… D’ailleurs, je rends hommage à tout le travail que font les travailleurs sociaux actuellement. Je sais qu’ils sont en grande souffrance et que nous sommes en train de travailler sur la réorganisation de la DSFE ».
TNTV : Comment sont choisies les familles d’accueil ?
Minarii Galenon : « Nous avons des critères. Ce qu’il faut savoir, c’est que comme nous avons un manque de familles d’accueil, souvent le premier critère qui est choisi, c’est un lien avec la famille. De manière à ce que l’enfant ne soit pas trop excentré de tous les liens familiaux. Parce qu’il faut savoir que si ces enfants étaient dans une famille d’accueil, c’est qu’ils ont aussi rencontré des problèmes au sein de leur propre famille biologique. Ça, il ne faut pas l’oublier. Maintenant, les familles d’accueil sont choisies selon plusieurs critères. Surtout le critère où les familles déjà sont volontaires. Donc il y a des enquêtes qui se font. Bien sûr que je vais revoir les critères de choix, parce que ça aussi, je disais à mes services qu’il faut qu’on les réétudie. C’est pour cela qu’on va se mettre en situation de réflexion tout de suite et qu’on va apporter des solutions ».
TNTV : L’oncle d’Ayden nous expliquait qu’il y avait un suivi de la part de la DSFE, des travailleurs sociaux. Comment peut-on expliquer qu’il y a eu des constats qui ont été faits sur cette petite fille ? Elle a été vue en mauvaise santé à l’école. Elle a été retirée et n’est pas revenue pendant plusieurs semaines. Comment peut-on expliquer qu’il n’y ait pas eu de suivi plus important de la DSFE ?
Minarii Galenon : « Il y a eu un suivi puisqu’en 2024, on avait détecté qu’elle avait des problèmes, qu’elle commençait à maigrir. Alors, il y a eu un constat médical. Et ce qu’il faut savoir, c’est qu’elle avait des problèmes gastriques. C’est ce qui m’a été rapporté dans tous les rapports. Maintenant, il faut savoir que toutes les visites obligatoires ont été faites au niveau de mes services. Et je dis que là, il faut être plus rigoureux. Je veux dire, il y a eu une faille quelque part. Mais je veux dire que comme nous sommes plusieurs partenaires, c’est pour ça qu’aujourd’hui, nous sommes obligés de travailler ensemble. C’est vraiment un travail communautaire qu’il faut effectuer aujourd’hui ».