Il semait la terreur lors des rites funéraires heva tupapa’u réservés aux grands chefs. Masque en nacre, tiputa en tapa et cape en plumes de pigeon impérial : le costume est à la hauteur du prestige du défunt. Un ensemble spectaculaire qui avait marqué James Cook.
250 ans plus tard, le costume a survécu dans des conditions remarquables. De nature fragile et complexe, sa restauration fût par conséquent un véritable challenge.
« La cape en plume était très fragile, à chaque fois qu’on la déplaçait on perdait des plumes, explique Monique Pullan, conservatrice au British Museum. Et on ne pouvait pas faire de miracle pour la rendre plus résistante. C’est l’une des raisons de notre visite : étudier la possibilité d’en faire une autre, qu’on pourrait intégrer à l’exposition. Pour restaurer le tapa, on a utilisé un papier de soie très fin. Il y avait des déchirures, certainement dues aux rongeurs à l’époque. Quand nous avons commencé, nous avons eu la chance de travailler avec l’ancienne directrice du Musée de Tahiti, Théano Jaillet. Nous avons beaucoup échangé sur le choix des matériaux de réparation. C’est ce genre d’expertise que nous sommes venus chercher ici avec les Polynésiens. »
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Les scientifiques font d’ailleurs des découvertes surprenantes. Comme celle de deux autres tiputa (ponchos). Protégés de la lumière, ils ont parfaitement conservé leur couleur, et des traces de doigts. Une trouvaille qui soulève forcément des interrogations.
« On espère avoir des réponses ici. Si quelqu’un a des idées, nous sommes preneurs !, lance Monique Pullan. Dans la littérature, des mutilations sont évoquées dans le cadre des deuils, on apprend aussi que le sang était recueilli sur des vêtements posés près du défunt. Alors oui, on se demande s’il s’agit d’empreintes de sang, on ne sait pas. »
Voilà maintenant deux ans que le musée cherche à en savoir plus sur l’histoire et les techniques de conception de cet ensemble. Une pièce rendue célèbre par les croquis de Tupaia, mais aussi de Herman Sporing, le secrétaire de Joseph Banks.
« On pense que le capitaine Cook a réussi à le ramener avec lui lors de son deuxième voyage, confie de son côté Julia Adams, responsable des collections océaniennes au British Museum. Pour obtenir l’accord des Polynésiens, il leur avait proposé une grande quantité de plumes rouges de Tonga. Il savait que ces plumes représentaient une monnaie d’échange de grande valeur pour les Polynésiens à l’époque. Voilà pourquoi ce costume se trouve au British Museum depuis 250 ans. »
Exposé depuis fin novembre au British Museum, le costume devrait venir à la rencontre des Polynésiens au Musée de Tahiti et des îles. Les discussions sont engagées.