« Ka pai »: la langue maorie de retour parmi les vivants

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Publié le 25/09/2018 à 8:25 - Mise à jour le 25/09/2018 à 8:25

Bon nombre des élèves de la Wellington High School ne comprennent que des bribes de « te reo maori » mais ils suivent la pièce grâce au jeu des acteurs. Lorsqu’elle s’achève, certains spectateurs sont au bord des larmes. L’acteur Eds Eramiha explique que ce genre d’événement ne se serait pas produit deux décennies en arrière, quand la langue indigène était considérée comme un idiome en voie de disparition, pas digne d’être enseigné. « Les attitudes ont complètement changé », dit-il. « Quand j’étais à l’école, le reo maori n’avait pas bonne presse, on ne le parlait pas, il n’était pas répandu comme il l’est pour nos enfants aujourd’hui ».

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Pendant une bonne partie du XXe siècle, la langue fut interdite dans les écoles. Seuls 20% des Maoris néo-zélandais la parlaient couramment dans les années 1980. Ces chiffres n’avaient quasiment pas variés en 2013, quand un recensement avait montré que seuls 21,3% de la population maorie pouvaient tenir une conversation en reo. « Le reo maori est au bord du point de non retour », pouvait-on lire dans un rapport officiel de 2010 qui y voyait quasiment une langue morte. Les locuteurs les plus âgés « ne sont tout simplement pas remplacés » à leur décès.

> « Nous avons un rôle de gardien, un rôle de défenseurs du reo maori »

Mais la situation a profondément changé depuis lors. Aujourd’hui, la langue maorie connaît une nouvelle popularité chez les Kiwis, de plus en plus attentifs à la culture indigène de leur pays du Pacifique Sud, qu’ils soient maoris ou non. Les cours du soir de reo font salle comble dans tout le pays, les groupes de musique, les poètes et les rappeurs utilisent le reo.

Des mots indigènes sont entrés dans le langage courant, comme « kai » (nourriture), « ka pai » (félicitations), « whanau » (famille)… La façon même dont s’identifient les Kiwis prend un tour de plus en plus « reo », un nombre croissant préférant parler de « Aotearoa » plutôt que de la Nouvelle-Zélande.

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La Première ministre Jacinda Ardern est une ardente défenseur de la langue, expliquant que l’un de ses plus grands regrets est d’être incapable de la parler couramment. « Nous avons un rôle de gardien, un rôle de défenseurs du te reo maori », a-t-elle déclaré récemment. « Notre travail, c’est de le nourrir, car c’est plus qu’une langue ». Mme Ardern a donné à sa fille Neve, née en juin, un deuxième prénom maori, « Te Aroha », qui signifie « L’Amour ».

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> « Voix de l’humanité »

L’objectif du gouvernement néo-zélandais : qu’un million de personnes parlent couramment le reo maori d’ici 2040. Pour qu’il soit atteint, il faudra que de nombreux non-Maoris adoptent la langue, les Maoris ne représentant que 15% des 4,5 millions de Néo-Zélandais.

Charles Royal, universitaire et conteur maori au musée national Te Papa (Notre endroit) est enthousiasmé par cette perspective. « On n’a jamais eu autant de locuteurs qu’aujourd’hui », dit-il. « Ce que me permet le reo maori, c’est d’énoncer qui je suis d’une manière très particulière (…) en tant que Néo-Zélandais (…) C’est le véhicule qui a initialement donné une voix à l’humanité dans cette partie du monde », relève-t-il.

D’après lui, le rejet initial de la langue maorie s’expliquait par un complexe d’infériorité et l’idée que l’histoire européenne était plus importante que l’histoire de la Nouvelle-Zélande. Eds Eramiha estime, en tant qu’acteur, que le reo est fluide, cela « coule un peu mieux que (l’anglais), le débit est différent ».

> Pour certains Néo-Zélandais, la langue et la culture maoris ne valent rien

Angela Fieldes, enseignante à la maternelle Tuatara Kids de Wellington, fait un constat assez similaire parmi les jeunes enfants dont elle s’occupe. « Ils apprennent vraiment, vraiment très vite, c’est normal pour eux », dit-elle, alors que les enfants chantent une « waiata » (chanson) et récitent les couleurs, les nombres et les voyelles en reo. « Ils adorent chanter et je crois qu’une grosse partie de l’apprentissage du  reo, c’est sa richesse quand il s’agit de se servir du chant ».

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Selon Charles Royal, certains Néo-Zélandais pensent toujours que la langue et la culture maoris ne valent rien, mais ils sont une minorité vieillissante. Le fait que tant de non-Maoris, y compris les « pakeha » (Néo-Zélandais d’origine européenne) veulent apprendre le  reo est une chose « absolument fantastique ». « Cela me rend fier d’être maori, c’est un acte de générosité de part et d’autre », dit-il.

Eds Eramiha partage ce sentiment. La passion pour cette langue est évidente lors des tournées de Taki Rua, sa troupe théâtrale, dit-il.

L’acteur se dit confiant en l’avenir. « Les gens d’autres cultures viennent me voir après nos spectacles et disent ‘Vous pouvez m’apprendre à dire bonjour (en te reo) ?' ».
« C’est un trésor pour nous de pouvoir le transmettre et un cadeau énorme de voir que d’autres gens veulent l’apprendre. C’est époustouflant ».
 

Rédaction web avec AFP

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