Moetai Brotherson est arrivé mardi dans l’Hexagone, pour une mission de quelques jours à Paris. Premier rendez-vous à son agenda, la rencontre avec le président d’Alwena Shipping, Ludovic Gérard, une entreprise de « conseil et assistance technique dans le secteur maritime » qui couvre à la fois l’Europe, la Chine et la Polynésie.
« Il s’agissait de faire le point sur les différentes interventions en Polynésie, auprès de certains armateurs locaux sur le renouvellement des flottes, avec de beaux projets de cargos mixtes à voile et qui s’inscrivent dans l’air du temps » explique Brotherson qui salue ce projet porté par un des armateurs locaux pour desservir les Australes, confirmant par la même occasion le soutien de la collectivité. « Ce sont des dossiers prioritaires, les critères d’examens (pour une aide à l’investissement, ndlr) sont bien précis, et les projets cohérents de renouvellement seront prioritaires » a-t-il assuré.
Avec Ludovic Gérard, « on a surtout parlé d’un projet qui moi, m’intéresse particulièrement, mais qu’il va falloir qu’on discute avec tous les acteurs concernés au fenua, c’est éventuellement la mise en place d’une société, en partie détenue par le pays, et qui opèrerait des porte-conteneurs entre nous et la Nouvelle-Zélande », a-t-il ajouté. « Cette société n’aurait pas vocation à faire de la spéculation sur les coûts des transports. Elle opèrerait à coûts fixes, prévisibles. Ça permettra à nos importateurs de bénéficier de coûts de transports avantageux et aux transporteurs classiques, qui s’orientent vers des navires de plus en plus grands, de peut-être finalement se délester d’un détour par la Polynésie qui les embête plus qu’autres choses ».
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Mais cette orientation vers des navires de plus en plus imposants pose pour la Polynésie une contrainte, rappelle Moetai Brotherson : celle d’élargir et donc de dynamiter l’étroite passe de Papeete, « ce qui n’est pas dans l’air du temps ». Un armateur « pays » donc, un pendant maritime d’Air Tahiti Nui, qui possèderait deux navires de 600 conteneurs équivalents 20 pieds. « Ça aurait un vrai avantage » assure le président.
Augmenter l’attractivité de l’audiovisuel en Polynésie
Parmi ses premiers rendez-vous à Paris, Moetai Brotherson a aussi reçu, ce mercredi, Florence Borelly, productrice chez Sésame Films « qui connaît bien la Polynésie » et Heiremu Pinson, réalisateur originaire de l’île de Raiatea. « Nous avons évoqué les moyens d’augmenter l’attractivité de notre pays en matière de cinéma et d’audiovisuel » a indiqué le président, qui a la compétence sur l’audiovisuel, soulignant « un échange très riche avec une personne d’expérience qui siège dans la commission d’attribution du CNC (…) et qui sait ce qui attire un producteur vers une destination ».
Et les sujets sont nombreux pour attirer la production audiovisuelle en Polynésie : « On a parlé de formation, de professionnalisation du tissu audiovisuel, des aides directes, du volet crédit d’impôts, … ». Une rencontre qui permettra « d’alimenter le débat qui aura lieu les 9, 12 et 13 février à Papeete aux Assises de l’Audiovisuel ». « Le but est à la fois d’augmenter l’attractivité de notre pays et faire monter en gamme nos producteurs et scénaristes locaux pour que demain, ce soient des Polynésiens qui écrivent des histoires polynésiennes », explique Moetai Brotherson.
Toujours ce mercredi, le président est entretenu avec le directeur exécutif de Green Cross France & Territoires, Nicolas Imbert. « C’est une ONG connue, à l’origine créée par Gorbatchev (…) qui travaille sur les thématiques de résilience et de transition climatique avec une approche particulière sur le sujet, en utilisant la méthode des moyens finis de la planète (…) qui permet d’obtenir des résultats plus pragmatiques par rapport à la méthode des ODD ». « On a voulu les rencontrer pour qu’ils nous expliquent ce qu’ils font » a-t-il ajouté, citant l’exemple des îles Loyauté, où l’ONG, partenaire de cette province calédonienne, a mené des projets partant de la population, un avantage en termes d’acceptation sociétale.
Préparer le CIOM en attendant un(e) ministre délégué(e)
Moetai Brotherson a été reçu dans l’après-midi par le Directeur général des Outre-mer (DGOM), Olivier Jacob, pour préparer un CIOM du Pacifique. Car, rappelle le président, c’était le cœur de sa mission à Paris, « le remaniement ministériel est venu repousser tout ça à une date ultérieure », si ce n’est « aux calendes grecques ». Avant la nomination du nouveau Premier ministre Gabriel Attal, Brotherson avait eu l’assurance du maintien d’un équivalent du CIOM dédié aux collectivités du Pacifique, avec une date avancée : ce jeudi 25 janvier.
« Malgré tout, on avait fait tout un ensemble de rencontres déjà planifiées, et on va tout de même lui apporter à Olivier Jacob le programme prévisionnel sur lequel on a déjà travaillé pour le CIOM, et pour la Polynésie ». « Ce CIOM est important. Les DROM ont eu leur CIOM, il est temps que les COM aient leur CIOM », a-t-il insisté.
Sur le maintien ou pas de Philippe Vigier au Ministère délégué aux Outre-mer, Brotherson « prend son mal en patience », non sans critiques. « J’ai entendu pendant toute une mandature un certain nombre de politiciens nationaux clamer que les Outre-mer avaient une place prépondérante au sein de la Nation, mais on se rend compte qu’on est la dernière roue du carrosse puisqu’on attend toujours notre ministre délégué. Je m’attendais à ce qu’on renouvelle Philippe Vigier dans la foulée, apparemment, il y a des débats ». Réponse après le discours de politique générale de Gabriel Attal.
Pour la suite de sa mission parisienne, Moetai Brotherson doit, entre autres, s’entretenir avec le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, ainsi que la ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse, des Sports et de JO, Amélie Oudéa-Castera. Sur un volet plus économique, il doit aussi échanger avec le secrétaire général de Google France, et avec la directrice interrégionale des Outre-mer et le directeur du réseau Île-de-France et Outre-mer de la BPI.