Le trentenaire était connu du père Christophe qui le croisait fréquemment lors de ses maraudes : « C’est un jeune homme qui avait un lourd passé et qui avait surtout un gros souci avec l’alcool. Il illustre un petit peu la situation des personnes en grande précarité : beaucoup de solitude. Ce qui s’est passé à la DSP aurait pu se passer ailleurs. On en a eu déjà quelques-uns au cours des dernières années qui se sont suicidés. On n’a pas suffisamment conscience que quelqu’un qui est à la rue est seul. Même s’ils sont regroupés, ils sont seuls. Tu n’as pas de lieu pour dire ce que tu ressens, et parfois tu n’as pas les mots aussi ».
Selon l’homme d’Eglise, la victime ne souffrait pas de troubles mentaux à proprement parler. Ce qui est néanmoins le cas pour environ 15% des SDF de Tahiti, selon les chiffres dont il dispose.
Et pour leur venir en aide sur le plan psychiatrique, les moyens sont limités localement. « Il n’y a pas de centre dédié. Par exemple, une sorte de structure fermée pour accueillir des personnes qui présentent des troubles de la personnalité, des troubles mentaux… et qui sont à la rue. Pour l’instant, on bricole, on fait avec les moyens du bord. Cela reste toujours le domaine dont personne n’a envie de parler parce que la misère, personne ne veut en parler. Mais, ce que je peux observer depuis un petit moment, c’est qu’il y a une sorte de prise en compte de ces populations qui existe depuis de nombreuses années, comme avec le collectif Te Ta’i Vevo » poursuit Yasmina.
Sur le plan judiciaire, le parquet a ouvert une enquête pour déterminer avec précision les causes, mais aussi les circonstances, de la mort du jeune homme. Une autopsie devrait ainsi être pratiquée.
Et si sa famille ne se manifestait pas, ce qui arrive régulièrement, l’association Te Torea pourrait se charger des obsèques. Pour que le dernier voyage de ce sans domicile fixe ne se déroule pas dans l’anonymat, dans la solitude qui lui pesait tant.