À moins de 48 heures du début du déconfinement, un dernier vote de l’Assemblée nationale a permis de valider ce texte sensible. Peu auparavant, le Sénat à majorité de droite avait donné son feu vert par 252 voix pour, dont celles des LR, contre 87.
Le président Emmanuel Macron a déjà annoncé qu’il saisirait lui-même le Conseil constitutionnel pour contrôler cette loi, dans l’idée que le texte soit promulgué dimanche soir, alors que les oppositions s’inquiètent des restrictions des libertés publiques.
Le président du Sénat Gérard Larcher (LR) a confirmé saisir lui aussi les Sages dès samedi soir, pour s’assurer que les mesures mises en œuvre sont « nécessaires et adaptées aux circonstances ».
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Députés et sénateurs s’étaient mis d’accord en début d’après-midi en commission mixte paritaire, notamment sur le point sensible de la responsabilité pénale des acteurs publics et privés amenés à mettre en œuvre la sortie du confinement à compter de lundi.
La question de la responsabilité pénale des décideurs, et singulièrement des maires, en première ligne pour la réouverture des écoles décidée par le gouvernement, était un sujet de vive tension depuis plusieurs jours entre majorité et opposition.
Le texte retenu modifie le code de la santé publique pour préciser qu’il est tenu compte des « compétences, des pouvoirs et des moyens » dont disposait « l’auteur des faits », dans « la situation de crise ayant justifié l’état d’urgence sanitaire », ainsi que de « la nature de ses missions ou de ses fonctions ».
Députés et sénateurs ont aussi trouvé un compromis sur l’autre « point dur » de ce projet de loi : la mise en place d’un suivi des malades du coronavirus et des cas contacts, grâce à un fichier de suivi en lien avec l’Assurance maladie.
Les parlementaires ont assorti de garanties la création de ce fichier, différent du projet d’application StopCovid. Ils ont notamment limité à trois mois la sauvegarde des données.
Des « brigades », notamment agents de la Sécu, seront chargées de faire remonter la liste des cas contacts. Le texte prévoit aussi la possibilité d’une mise en quarantaine ou en isolement à l’arrivée sur le territoire national dans certains cas.
« L’objectif de promulgation de la loi le 11 mai se devait d’être tenu », a rappelé le secrétaire d’État Adrien Taquet, soulignant que ce texte « n’est pas un blanc seing » donné à l’exécutif.
Outre la majorité, les députés et sénateurs LR ont voté le texte en estimant que « deux lignes rouges ont été levées » -sur la responsabilité pénale des décideurs et les modalités de traçage- selon le chef de file du groupe de droite à l’Assemblée Damien Abad.
Le projet de loi encadre en outre les régimes de mise en quarantaine préventive, et de placement à l’isolement pour les malades, obligatoires pour certaines personnes arrivant sur le territoire national. Les députés ont ajouté des garanties de droit à ces régimes.
Pour les personnes arrivant en outre-mer, ils ont prévu à l’initiative du gouvernement que le lieu de la « quatorzaine » sera décidé par le préfet, la ministre des Outre-mer Annick Girardin mettant notamment en avant les spécificités en matière de logement et un besoin « de protection maximale ».
« Société de surveillance »
À gauche, à l’inverse, Jean-Luc Mélenchon (LFI) a défendu sans succès à l’Assemblée une motion de rejet préalable pour contester l’absence de « mesures sociales » comme la « gratuité » et la distribution de masques pour tous et mettre en garde contre l’installation d’une « société de surveillance ».
Les communistes ont aussi dénoncé un « régime juridique d’exception » et un « petit compromis » entre l’Assemblée et le Sénat.
Le groupe PS a voté contre également. Malgré des avancées, le sénateur socialiste Jean-Pierre Sueur a dénoncé un texte sans « une ligne sur l’urgence sociale ».
Selon le groupe CRCE, à majorité communiste, il n’y a pas lieu « de prolonger indéfiniment » l’état d’urgence sanitaire, la sénatrice écologiste Esther Benbassa fustigeant une « atteinte disproportionnée à nos libertés individuelles et publiques ».
Au Palais Bourbon, la rapporteure LREM Marie Guévenoux a assuré que « ce n’est pas le cœur léger que nous restreignons momentanément les libertés publiques mais en conscience de nos responsabilités face à la crise sanitaire ». Et elle a « formé le vœu que nous puissions le 10 juillet sortir de l’état d’urgence sanitaire ».
Le patron des députés LREM Gilles Le Gendre avait toutefois laissé entendre il y a cinq jours, qu’il s’attendait à une nouvelle prolongation en juillet, sauf « divine surprise ».