La journée de fête a viré au drame, ce 4 janvier 2022 sur l’île sœur. La jeune fille s’y était rendue pour célébrer l’anniversaire d’une cousine.
Dans l’après-midi, après avoir bu quelques bières près d’un motu, l’un de ses oncles, qu’elle connaissait peu, s’est mis au guidon d’un jet-ski pour aller récupérer une rallonge à terre. La victime a demandé à pouvoir faire l’aller-retour avec lui.
Sans gilet de sauvetage, elle s’est positionnée à l’arrière des 3 places du scooter de mer, derrière une autre jeune fille, également passagère.
Mais au moment du démarrage, les choses ont mal tourné, comme elle l’a raconté aux gendarmes quand elle pu être entendue : “Je ne pouvais pas m’accrocher à lui. Il a accéléré d’un coup sec et j’ai été projetée en arrière, les jambes écartées, juste devant le jet. Je voyais du sang tout autour de moi”.
Sur le chemin qui l’amène à l’hôpital, elle perd plusieurs fois connaissance. Puis elle sombre dans le coma. Son pronostic vital est un temps engagé. Les médecins constatent, effarés, une “désinsertion rectale” et de “multiples plaies au vagin”, causées par le jet de la turbine du jet-ski, dont la pression a été évaluée à 450 kilos.
De terribles blessures, aux conséquences malheureusement irréversibles, comme en a attesté son avocat Me Dominique Bourion. “C’est une jeune femme qui est détruite, qui a frôlé la mort et a subi 9 opérations (…) Elle n’a plus d’anus, elle a une poche sur elle (…) Et ce n’est que le début de son calvaire. Elle ne pourra pas avoir d’enfant (…) Elle a fait 2 tentatives de suicide” a soufflé, laconique, l’avocat.
Il a également vertement critiqué l’attitude impassible du prévenu à l’audience, un homme qui a continué à faire la fête le soir, après l’accident. “Il n’est jamais venu à l’hôpital, n’a jamais passé un coup de fil (…) Je n’arrive pas à comprendre comment on peut être si léger aujourd’hui. Heureusement que ma cliente n’est pas là. Un manque d’humanité aussi grave, je ne sais pas comment elle le prendrait”, a tonné l’avocat.
Renvoyé devant le tribunal pour blessures involontaires, pour ne pas s’être assuré de la sécurité de ses passagers, le pilote du jet-ski, 53 ans aujourd’hui, a considéré qu’il n’avait commis aucune faute.
“Je lui ai dit qu’il n’y avait pas de gilet et de bien s’accrocher (…) Je n’ai pas entendu quand elle a dit qu’elle ne pouvait pas, sinon je n’aurais pas accéléré (…) Je ne vois pas où j’ai mal conduit”, a déclaré ce mécanicien de profession, ajoutant que, vu la corpulence de la jeune fille, il lui avait demandé de prendre place sur le siège du milieu. Ce qu’elle aurait refusé.
Dans la foulée, son avocat, Me Robin Quinquis a plaidé la relaxe, estimant que sur le plan pénal son client n’était pas “responsable” de l’accident. “Il a informé ses passagères qu’il fallait se tenir car il allait accélérer (…) C’est un jet-ski de 3 places et il y a 3 poignées sur lesquels le passager doit s’accrocher”, a-t-il martelé. Quant au non-port du gilet, il a fait valoir qu’il n’avait pas de lien de causalité avec les blessures résultant de l’accident.
Un point de vue diamétralement opposé à celui de la procureure pour qui l’homme n’a “pas tenu son rôle de pilote” en n’assurant pas “la prise en charge correcte de ses passagers”. “Elle a tenté de s’agripper mais cela n’a pas été suffisant. L’accélération a été telle qu’elle ne pouvait pas se rattraper”, a lancé la magistrate, tout en fustigeant la “forme de déni” du quinquagénaire.
Le tribunal a suivi la position du parquet et a condamné le pilote du jet-ski à 18 mois de prison avec sursis. Une procédure parallèle est en cours pour déterminer le montant des dommages et intérêts qui seront versés à la victime.