“J’ai essayé voleur, ça ne marche pas. J’ai essayé escroqueur, ça ne marche pas. J’ai essayé l’ice, ça ne marche pas. Là, j’ai compris, je vais aller travailler”. A la barre du tribunal correctionnel, celui que tous appellent “Escroc” a juré qu’il allait mettre fin sa carrière de délinquant après la série d’échecs précédemment citée.
Cet homme de 37 ans comparaissait aux côtés de 7 comparses, dont l’autre tête pensante du réseau. Un ancien gérant d’une école de danse connue de la place et impliqué dans de nombreuses importations de méthamphétamine ces dernières années, la dernière portant sur 21 kilos.
Le dossier les concernant, ce mardi, a débuté le 27 août 2021. Les douaniers de l’aéroport de Tahiti-Faa’a ont intercepté deux hommes de retour d’un séjour aux Etats-Unis. Leurs bagages contenaient au total près de 9 kilos d’ice dissimulés dans des pots de cacahuètes et de bonbons au chocolat, un vidéoprojecteur et des enceintes audio.
Les deux mules avaient été recrutées par “Escroc” qui, lui, ne voulait pas se rendre aux Etats-Unis en raison de l’éloignement et de sa “peur de l’avion”. “J’avais besoin d’argent, il m’a dit qu’il me donnerait entre 5 et 10 millions (…) J’ai choisi l’argent facile”, a témoigné l’un des hommes arrêtés à l’aérogare.

Aux États-Unis, “Escroc” avait également dépêché depuis Tahiti trois autres individus. Eux avaient pour mission d’acheter la drogue à un contact mexicain, puis de la conditionner pour faciliter son importation en Polynésie. L’un d’eux a reçu une vingtaine de millions de francs en échange de ses services, somme découverte en petites coupures lors d’une perquisition.
“Je voulais arrêter, mais vu qu’il m’avait déjà payé, il m’a fait comprendre qu’il fallait aller jusqu’à la fin. Il a menacé ma famille et m’a mis la pression. J’ai eu peur”, a témoigné celui-ci.
Interrogé par les magistrats, “Escroc”, mi-énervé, mi-goguenard tout au long de l’audience, a endossé la responsabilité du trafic : “Je suis coupable. C’est moi qui ai tout commandité. J’ai manipulé tout le monde. Je fumais beaucoup d’ice”.
Selon ses dires, c’est grâce à la revente de 100 grammes de méthamphétamine volés à un autre dealer qu’il a financé l’opération : billets d’avion, logement, “argent de poche” et achat de la drogue. Mais “Escroc” ne connaissait pas les Etats-Unis et ne disposait d’aucun contact sur place.
C’est là qu’intervient l’ex-prof de danse, perçu par les enquêteurs comme le réel “concepteur” du projet. Car selon les douaniers, “Escroc” n’a “pas la carrure pour penser une telle opération”.
Son binôme a donc “fourni le contact d’un Mexicain”, a participé au “choix des mules” et a préconisé l’envoi d’une seconde équipe pour acheter la drogue et la conditionner.

“Un rôle de premier plan”, pour le procureur. Ce qu’a contesté l’ex-danseur : “Je lui ai donné l’adresse pour aller chercher l’ice chez le Mexicain mais je ne suis pas intervenu. C’est lui qui a fait son opération. Escroc fait semblant mais il est intelligent. Si ça avait été moi, je n’aurais pas fait comme ça”. Et l’homme de souffler : “On ne voit pas le mal qu’on fait à la société tellement on est aveuglé par l’argent”.
Il a finalement été condamné à la plus lourde peine : 8 ans de prison ferme. ‘Escroc’ a quant à lui écopé de 7 années ferme et les 6 autres prévenus de peines comprises entre un an avec sursis et 4 ans ferme.
Les 4 principaux mis en cause devront aussi s’acquitter solidairement d’une amende douanière de 900 millions de francs, soit la valeur marchande, à la revente, de 9 kilos de méthamphétamine au fenua.