La Polynésie en route vers un tourisme durable

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La Polynésie ambitionne à devenir un leader du "slow tourisme" dans le monde et souhaite être une vitrine du tourisme durable en Polynésie. Pour y parvenir, elle se donne 5 ans afin de mettre en place sa nouvelle stratégie : Fari'ira'a Manihini 2027.

Publié le 17/11/2022 à 14:31 - Mise à jour le 05/04/2024 à 16:06

La Polynésie ambitionne à devenir un leader du "slow tourisme" dans le monde et souhaite être une vitrine du tourisme durable en Polynésie. Pour y parvenir, elle se donne 5 ans afin de mettre en place sa nouvelle stratégie : Fari'ira'a Manihini 2027.


Avec ses 236 000 touristes accueillis en 2019, la Polynésie est encore loin du tourisme de masse, incontrôlé, et c’est ce qu’elle veut justement éviter. Elle ambitionne à être une destination responsable qui privilégie la qualité à la quantité : « Un tourisme durable et vertueux est extrêmement important pour la Polynésie française qui n’a jamais été jusqu’à présent touchée par un tourisme de masse. C’est une chance. C’est le moment ou jamais de se réveiller. Oui on veut un développement, mais il faut qu’il soit responsable, contrôlé, pour éviter les erreurs qu’ont pu faire certaines destinations » indique Jean-Marc Mocellin, directeur général de Tahiti Tourisme.

La crise du Covid a montré que les habitudes des voyageurs ont évolué. Par exemple, les Français (2ème marché émétteur de touristes pour la Polynésie) ont rallongé leur séjour : 31,5 jours en 2021 contre 25,5 jours en 2019. « La crise a fait réaliser à la population du monde entier qu’elle ne souhaitait pas revenir vers un tourisme insouciant » constate Jean-Marc Mocellin. Un constat partagé par Alexandrine, fondatrice de l’agence Nani Travels : « On voit un changement dans les mentalités, surtout depuis le Covid. Il y a un désir de revenir aux sources. (…) Les gens veulent voyager différemment, ils veulent avoir une autre approche de leur voyage. Ils veulent voyager avec un sens. On est submergé de demandes aujourd’hui et on n’arrive pas à toutes y répondre ».

Devenir leader en « slow tourisme »

Baptisée Fari’ira’a Manihini 2027, la nouvelle stratégie touristique de la Polynésie sera présentée prochainement à l’Assemblée, en faveur d’un tourisme inclusif et durable. « Le tourisme durable, c’est un tourisme qui tient compte des populations, de leur bien-être, qui respecte la culture de sa destination, et qui surtout protège l’environnement dans lequel il se développe. Il faut s’assurer que la population est au coeur de ce développement, donc c’est aussi un tourisme inclusif » précise le directeur général de Tahiti Tourisme.

« Un tourisme oui, mais un tourisme qui prend en compte le besoin de la population, ses envies. Et la capacité que nos îles peuvent nous donner. On ne va pas commencer à créer quelque chose sur une île alors que la population n’en veut pas, et qui n’est pas capable de fournir davantage de ressources naturelles comme l’eau, la nourriture… Devons-nous tous importer d’Amériaque pour aller créer un nouvel hôtel aux Tuamotu ? » interroge Alexandrine Wan.

Jean-Marc Mocellin, directeur général de Tahiti Tourisme (Crédit photo : Tahiti Nui Télévision)

Pour mettre en place la nouvelle stratégie qui s’étalera sur 5 ans, Tahiti Tourisme s’est basée sur les critères établis par le Conseil mondial du tourisme durable (GSTC), concernant le respect de l’environnement et des énergies ou encore le respect de la culture. Un comité de pilotage du tourisme durable sera créé au fenua, avec des représentants de la société civile, ainsi que des associations de protection de l’environnement et avec le secteur privé du tourisme et le secteur public, afin de mettre en place tout un plan d’actions.

Parmi elles : priviligier les produits locaux, mettre en avant la gastronomie locale, pousser vers l’artisanat, diffuser une vidéo dans les avions pour sensibiliser à la protection de l’environnement, créér un label de tourisme vertueux pour les professionnels touristiques, favoriser des séjours plus longs dans plusieurs îles afin que davantage d’îles bénéficient du tourisme et qu’il y ait moins de pression touristique dans les autres îles… Mais surtout, une étude d’évaluation de l’empreinte carbone du secteur touristique devrait être présentée d’ici un à deux an(s) afin d’identifier les pôles à améliorer. Et oui : on peut augmenter le nombre de touristes tout en diminuant notre empreinte carbonne : « C’est tout à fait possible, si on travaille mieux, si on met les choses en place, si l’ensemble des acteurs du tourisme et le pays s’engagent vers un tourisme durable » rassure Jean-Marc Mocellin.

Un touriste par habitant

Tahiti Tourisme souhaite limiter le nombre de visiteurs à un touriste par habitant soit un maximum de 300 000 visiteurs par an : « Plutôt que de se fixer un objectif de croissance, on s’est fixé un chiffre atteignable, mais que l’on fixe comme un plafond. On ne souhaite pas nécessairement dépasser ce chiffre dans l’immédiat, parce qu’on voudrait garder un touriste pour un habitant. C’est quelque chose qui nous parait raisonnable, acceptable pour la population, quitte à revoir notre copie dans quelques années, si on a réussit par exemple à redéployer les visiteurs dans d’autres îles que les 3 – 4 îles que les gens visitent actuellement ».

« Les revenus touristiques de ces 300 000 touristes et visiteurs représentent les mêmes revenus que Fidji pour 900 000 touristes. Le tourisme durable, c’est le tourisme supportable, soutenable, pour nous, et qui permet de stabiliser notre population. Parce qu’avoir dix fois plus de touristes que la population comme à Hawaii, cela crée des déséquilibres, et même sur le plan culturel et identitaire, c’est l’effacement de ce que l’on nous sommes » avait indiqué Jean-Christophe Bouissou, vice-président de la Polynésie, invité du journal télévisé le 10 novembre.

Alexandrine Wan, fondatrice de Nani Travels (Crédit photo : Tahiti Nui Télévision)

En attendant, l’office de tourisme de Tahiti et ses îles a déjà engagé la marche vers un tourisme responsable. Elle travaille en collaboration avec des hôtels à la démarche durable ou encore avec de nombreuses associations comme Tetiaroa Society, Manu, Manta Trust ou Coral Gardeners. Mais aussi avec Nani Travels qui est la seule agence en Polynésie qui propose des séjours différents, et surtout responsables, depuis 2017. « Aujourd’hui, en Polynésie française, on n’a pas énormément de produits autour du tourisme durable, c’est l’un des plus gros challenges que l’on rencontre. Donc on est amené à créer énormement de produits que ce soit de l’expérience culinaire jusqu’au concept général. (…) On a une stratégie de développement durable autour de chacun de nos produits que l’on créé. Avant chaque concept, on va étudier son impact qu’il environnemental, socio-culturel et économique. Alors que généralement, les agences de voyage se focalisent sur le chiffre, le profit, les commissions, mais aussi sur l’expérience bien-sûr » explique sa fondatrice.

« L’industrie touristique est vraiment un levier qui nous aide à avoir un impact sur énormément de sujets qui nous tiennent à coeur »

Alexandrine Wan, fondatrice de Nani Travels

Avec son association Nani, à chaque concept de voyage créé, l’agence d’Alexandrine Wan créé également un projet qui va, soit protéger l’environnement soir soutenir des associations, en faveur de l’éducation par exemple. L’objectif : créer un lien entre l’industrie touristique et la population pour créer un impact positif. « On essaie de voir comment le tourisme peut avoir un impact positif sur l’ile et la communauté qui recoivent les touristes ». Parmi ses dernières actions, le programme Tama -un camp de vacances pas comme les autres- ou encore la création d’un refuge pour les femmes pour qu’elles puissent se reconnecter à Mère Nature.


Car Nani Travels se veut plus qu’une simple agence voyage : « C’est tout un mouvement que l’on souhaite mettre en place pour que les visiteurs et la population se rendent compte que le tourisme doit se développer d’une certaine façon ».

À l’occasion du vingtième anniversaire de son sanctuaire des espèces marines emblématiques, la Direction de l’Environnement en partenariat avec Nani Travels organise la deuxième édition de l’Effet Mer, un festival environnemental et artistique. Cet événement, dédié au grand public et tout particulièrement aux familles, se déroulera ce samedi 19 novembre de 10 heures à 17 heures, au parc Vairai à Punaauia.


Retour du forum des formations et métiers du tourisme et les assises du tourisme

Après 2 années d’absence, le forum des formations et métiers du tourisme et les assises du tourisme se tiendront respectivement les 24 et 25 novembre prochains, sous le chapiteau de la Présidence.
Pour sa 6ème édition, le forum des formations et métiers du tourisme portera sur le thème « tourisme & jeunesse, notre pari pour demain ». Ce sera l’occasion pour les collégiens, lycéens, étudiants, jeunes déscolarisés ou en réinsertion, demandeurs d’emploi, porteurs de projets, mais également professionnels du tourisme, et plus largement le grand public, d’obtenir des informations de la part des professionnels et centres de formation, sur les cursus existants et les métiers d’avenir dans le secteur touristique. Plus d’infos ICI
Et après une 1ère édition des assises du tourisme en septembre 2019, qui avait lancé les premiers travaux d’élaboration de la stratégie touristique Fari’ira’a Manihini 2021-2025, cette 2ème édition vient clôturer ces travaux et amorcer la mise en œuvre de la Fari’ira’a Manihini 2027. Plus d’infos ICI

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