C’est le plus important de ces vortex, connu comme la « grande zone d’ordures du Pacifique » (Great pacific garbage patch, GPGP), que sont allés scruter, à mi-chemin entre Hawaii et la Californie, les auteurs de l’étude publiée dans la revue Scientific Reports.
Estimant que tout km2 contenant plus d’un kilo de plastique fait partie de cette poubelle du Pacifique, ils évaluent sa taille à environ 1,6 million de km2, soit trois fois la France continentale, même s’il ne s’agit pas d’une masse compacte.
En se basant sur la récolte de 1,2 million d’échantillons et sur des survols aériens, ils concluent aussi que 1,800 milliards de morceaux de plastique, pesant un total de quelque 80 000 tonnes, flottent dans ce magma qui « augmente de façon exponentielle ».
DES FILETS FANTOMES
De manière générale, le plastique représentait 99,9% des déchets récoltés, mais pas nécessairement sous forme microscopique comme s’y attendaient les scientifiques. Ils ont été surpris de découvrir qu’en poids, plus des trois quarts de cette décharge étaient constitués de débris dépassant 5 cm et près de la moitié de matériel de pêche abandonné.
Ces cordes et ces filets « fantômes » tuent beaucoup « de poissons, de tortues, et même de mammifères marins » qui s’empêtrent dedans, explique l’auteur principal Laurent Lebreton, de la fondation Ocean Cleanup.
Mais c’est malgré tout « plutôt une bonne nouvelle » parce que « les gros débris sont bien plus faciles à collecter que les microplastiques », souligne-t-il.
» Ces résultats nous fournissent des données-clés pour développer et tester notre technologie de nettoyage, mais il souligne également l’urgence de s’attaquer au problème de la pollution aux plastiques » , a ajouté dans un communiqué Boyan Slat, fondateur de Ocean Cleanup.
LA SOCIETE DU TOUT JETABLE
Mais ces barrières ne pourront pas ramasser les morceaux inférieurs à un centimètre, ce qui laisse entier le problème des microplastiques, particules néfastes pour la santé : ingérées par les poissons, elles entrent ensuite dans la chaîne alimentaire.
Combien de temps mettront-ils à disparaître ? » Ça dépend du type de polymère, des conditions environnementales, mais la réponse sincère est que nous ne savons pas vraiment « , reconnaît Laurent Lebreton.
L’étude s’interroge également sur le risque que ces particules finissent pas couler. » Le niveau de la pollution plastique en eaux profondes et sur les fonds marins sous la GPGP reste inconnu « , estiment les chercheurs, qui appellent à d’autres échantillonnages.
Malgré le constat inquiétant, Laurent Lebreton refuse de désigner des coupables.
» Les gens voient la quantité de matériel de pêche et pointent du doigt l’industrie de la pêche, mais ils mangent aussi du poisson. Ce n’est pas la question d’un secteur ou d’une région, c’est principalement notre mode de vie et de consommation, les plastiques à usage unique, la société du tout-jetable « , souligne-t-il.
» Nous devons prendre des mesures importantes en la matière. Nous résoudrons ce problème à l’échelle mondiale « .
AFP