Selon deux experts de l’Unesco et de l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN), la dégradation du site se poursuit sous les effets conjugués du réchauffement climatique et de diverses pollutions liées à l’agriculture et à la pêche.
La Grande Barrière de corail est l’une des principales attractions touristiques de l’Australie et son inscription sur la liste des sites « en péril » pourrait considérablement ternir son attrait pour les visiteurs internationaux.
Le récif génère 600 000 emplois et 3,9 milliards d’euros de revenus chaque année, a estimé la Société australienne de conservation marine.
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L’Australie avait évité en juillet 2021 que l’Unesco inscrive la Grande Barrière de corail sur sa liste des sites du patrimoine mondial en péril, malgré l’inquiétude de la communauté scientifique par rapport à la dégradation de cet écosystème unique.
Le Comité du patrimoine mondial avait décidé de reporter une telle décision, après un lobbying intense de l’Australie. « En dépit des efforts scientifiques et de gestion sans précédent ces dernières années » consentis par l’Australie, « la valeur universelle exceptionnelle du domaine est affectée significativement par les facteurs de changement climatique », estime le nouveau rapport.
La capacité du site à résister à ces impacts est « compromise de façon substantielle », en particulier -mais pas exclusivement- à cause de la dégradation de la qualité de l’eau. Et l’ensemble des mesures et projets pour y faire face « manquent d’objectifs clairs » et « ne sont pas pleinement mis en œuvre », déplorent les experts.
Selon les auteurs du rapport, « si des efforts significatifs ont été faits pour réduire le ruissellement des nitrates et phosphates (…), il est nécessaire d’assurer une plus grande réduction de ces polluants dans les trois prochaines années que ce qui a été accompli depuis 2009 ».
L’Unesco avait sonné l’alarme sur la détérioration de la Grande Barrière pour la première fois en 2010.
En 2021, les membres du Comité, dont la Chine, la Russie et l’Arabie saoudite, avaient estimé que Canberra devait se voir donner plus de temps pour faire le point sur ses efforts de conservation.
Un pas de trop
La ministre australienne de l’Environnement, Tanya Plibersek, a reconnu mardi que le récif était menacé, mais estimé que l’inscrire sur la liste du patrimoine mondial « en péril » de l’Unesco serait un pas de trop.
« Nous ferons clairement comprendre à l’Unesco qu’il n’est pas nécessaire de singulariser la Grande Barrière de corail de cette manière », a-t-elle déclaré aux journalistes. « Si ce site du patrimoine mondial est en péril, alors la plupart des sites du patrimoine mondial dans le monde sont en péril à cause du changement climatique », a-t-elle estimé.
« Un dialogue constructif est en cours avec le gouvernement actuel » du Premier ministre Anthony Albanese, a souligné l’Unesco à l’AFP. Les élections de mai avaient chassé du pouvoir la coalition conservatrice de Scott Morrison.
La biologiste marine Jodie Rummer a estimé que le nouveau rapport montrait que l’Australie avait encore du travail à faire. « Notre action maintenant déterminera la fréquence et la gravité des vagues de chaleur marines auxquelles le récif sera confronté dans les années à venir », a-t-elle estimé.
En mai, des scientifiques australiens avaient signalé que 91% des coraux du récif avaient été endommagés par le blanchiment après une vague de chaleur estivale prolongée. « Il y a un chemin étroit, mais qui existe, pour sauver la Grande Barrière », a relevé une source proche du dossier. « Des mesures fortes et prises rapidement peuvent produire leurs effets. Ce rapport est une feuille de route proposée aux autorités australiennes qui devront dire ce qu’elles en font et surtout montrer des résultats », a souligné cette source.
Une prochaine réunion du comité de l’Unesco est prévue en principe mi-2023 où les premiers résultats de ces mesures pourront être examinés.