Victor Betton : des cuisines de l’Elysée, à la Polynésie

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À tout juste 26 ans, Victor a déjà travaillé auprès d’Alain Ducasse, Christian Le Squer et a même été le cuisinier privé d’Emmanuel Macron. Début 2021, il décide avec sa compagne Mélissa de venir s’installer en Polynésie. Passionné de cuisine, il tombe amoureux des produits du fenua et monte avec sa vahine « Fine Bouche Tahiti ». Retour sur son parcours atypique.

Publié le 24/03/2021 à 11:51 - Mise à jour le 24/03/2021 à 14:34

À tout juste 26 ans, Victor a déjà travaillé auprès d’Alain Ducasse, Christian Le Squer et a même été le cuisinier privé d’Emmanuel Macron. Début 2021, il décide avec sa compagne Mélissa de venir s’installer en Polynésie. Passionné de cuisine, il tombe amoureux des produits du fenua et monte avec sa vahine « Fine Bouche Tahiti ». Retour sur son parcours atypique.

Rien ne prédestinait Victor Betton à la cuisine. Après l’obtention d’un baccalauréat économique et social, il songe plutôt à s’orienter vers une carrière sportive. « J’aurais dû être kiné ou plutôt psychologue du sport dans le haut niveau et en fait je me suis blessé, et du coup j’ai dû me tourner vers autre chose. […] »

Il se réoriente alors vers la cuisine où il trouve des valeurs similaires à celles du sport. « Beaucoup d’esprit d’équipe, d’exigence, l’exécution des gestes, la technique… c’est ce que je retrouvais un peu avec le sport. Je ne cuisinais pas du tout ! J’aimais bien manger mais ça a été très tardif comme passion ».

En 2014, Victor étudie à l’école Ferrandi à Paris, un établissement réputé qui forme l’élite de la gastronomie française. Il y reste pendant trois ans et va s’exercer à l’art culinaire auprès de chefs de renoms. Il travaille avec Alain Ducasse, l’un des plus grands chefs cuisiniers français qui rayonne actuellement dans la monde. Il cuisine à ses côtés au Meurice, un palace parisien, mais aussi au Plaza Athénée pendant un an. Il apprend également auprès de Christian Le Squer au George V, un trois étoiles Michelin.

En 2018, c’est grâce à une étonnante coïncidence que Victor franchit les portes du Palais de l’Elysée. « J’ai envoyé un mail assez tôt le matin au chef des cuisines qui était Guillaume Gomez [l’ex-chef cuisinier de l’Elysée] et en fait, il y avait un commis qui partait une demi-heure après que je lui ai envoyé un mail ».  

Ainsi, pendant deux ans, il côtoie régulièrement Emmanuel Macron, part en déplacement avec lui et l’ensemble des cuisiniers. « Ça a mis 6 mois avant que je devienne un cuisinier un peu plus privé du Président. On était une équipe de 8 ». Il cuisine pour le chef de l’Etat mais s’attèle également à réaliser des banquets et des réceptions en l’honneur de la venue de diverses figures politiques. « C’était de la cuisine très bourgeoise, de grands événements, servie à la française sur des plats en argent ».

En décembre 2020, le jeune homme veut se lancer à son compte. Il fait ses adieux à l’Elysée pour se lancer dans une nouvelle aventure.

Tout quitter pour la Polynésie

Accompagné de Mélissa Périé, sa compagne qu’il a rencontré à l’exposition universelle de Milan, Victor décide de venir s’installer en Polynésie après avoir eu un coup de cœur il y a 10 ans. « J’étais venu en voyage chez ma tante, à Rangiroa, et j’avais vraiment bien aimé la cuisine tahitienne. On avait un petit restaurant là-bas où il y avait une personne qui cuisinait très bien. J’avais bien aimé les produits d’ici, en plus j’adore le poisson ».

« J’avais envie de vivre là, au bord de la mer » continue-t-il. « Il y a un sourcing qui est hyper facile ici. Pour trouver les légumes, il y a juste à aller au bord de la route en fait pour avoir de super produits ».

« L’inspiration, c’est le produit. Je transforme très peu mais j’essaye de l’utiliser le plus possible » (crédit photos : Fine Bouche Tahiti)

Fort de ses expériences, Victor tente sa chance. Avec Mélissa qui est spécialisée dans la communication et le web, ils mettent en commun leurs compétences pour créer Fine Bouche Tahiti, une entreprise qui offre à la fois les services d’un traiteur et d’un chef à domicile.

 « Ça fait 6 ans qu’on est ensemble avec Victor, j’ai appris à connaître sa « patte », sa signature » confie Mélissa. « On s’est dit que ça pouvait vraiment être intéressant. Lui, il fait l’œuvre et moi j’essaye de vraiment coordonner derrière ».

Fine Bouche Tahiti n’existe que depuis deux mois, mais le jeune couple réfléchit déjà à l’évolution de leur entreprise. « On a une activité de traiteur et une activité de chef privé. Ce qu’on aimerait dans le futur, c’est de se concentrer vraiment sur l’activité de chef privé et de garder une toute petite partie traiteur. Les deux fonctionnent bien. On commence à avoir pas mal de demandes pour les prestations à domicile » admet Victor.

Car ce qui leur plaît également dans l’activité de chef privé, c’est le contact et la relation avec le client. « Ça permet vraiment de bien expliquer le plat, la réflexion que j’ai eu sur l’assiette, et puis le client, s’il a des questions derrière ou des remarques… C’est quelque chose que je trouve hyper vertueux comme expérience. […] Il y a vraiment cette approche presque familiale en fait, surtout ici, les gens sont tellement accueillants ».

Une vision authentique, locale et anti-gaspi

« L’inspiration, c’est le produit. Je transforme très peu mais j’essaye de l’utiliser le plus possible ». Sa cuisine, Victor la décrit comme simple et naturelle mais sophistiquée, authentique et surtout, sans gâchis et sur mesure. Il travaille avec le plus possible d’ingrédients locaux, notamment concernant les légumes, fruits, mais aussi poissons. Exit donc la sole, le saumon et autres produits de la mer importés. Chaque dimanche matin, le jeune chef se rend d’ailleurs dès l’aube au marché de Papeete, afin de se procurer les ingrédients le plus frais possible.

Ambitieux, le couple se voit ouvrir un petit restaurant-hôtellerie dans les années à venir « avec très peu de chambres mais qui soit de qualité et accessible à tous. On est vraiment dans la notion que tout le monde peut venir manger chez nous et dormir chez nous s’ils veulent, toujours en essayant de garder ce côté authentique, net et raffiné ».

Mélissa et Victor au Palais de l’Elysée (crédit photo : Mélissa Périé)

« On ne prétend pas être meilleurs qu’un autre, c’est bien que les gens aient plusieurs personnes disponibles pour répondre à leur demande. Il y a même de l’entraide entre chefs ! On a rencontré d’autres chefs en venant qui étaient très bienveillants et qui, au contraire, disent qu’il y a de la place. En France, ça n’arriverait pas ».

Pour les gens qui souhaiteraient se lancer dans l’entreprenariat, Victor et Mélissa conseillent d’avoir de la patience, de la confiance en soi et de savoir bien s’entourer. « On est arrivé, on n’avait pas de budget pour se lancer. On n’a pas mis 5 millions de Fcfp. On n’avait pas beaucoup de moyen et on a quand même réussi ». Selon eux, il faut également « accepter les commentaires des autres. […] Il faut vraiment accepter les suggestions des gens. […] On se nourrit des commentaires même s’ils ne sont pas 100% positifs ».

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