Un colloque à l’UPF sur la dignité des détenus

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Magistrats, universitaires et directeurs se sont réunis ce 28 et 29 avril pour débattre de "la dignité des détenus dans les prisons des Outre-mer à la lumière de l'expérience polynésienne". A Nuutania et Tatutu, des dispositifs se développent pour préparer au mieux le détenu à sa réinsertion en société.

Publié le 29/04/2022 à 15:09 - Mise à jour le 29/04/2022 à 15:09

Magistrats, universitaires et directeurs se sont réunis ce 28 et 29 avril pour débattre de "la dignité des détenus dans les prisons des Outre-mer à la lumière de l'expérience polynésienne". A Nuutania et Tatutu, des dispositifs se développent pour préparer au mieux le détenu à sa réinsertion en société.

D’un côté la maison d’arrêt vétuste de Nuutania. De l’autre, le nouveau centre de Tatutu. Deux modèles aux antipodes qui affichent pourtant la même ambition : apporter aux détenus les clefs de la réinsertion et assurer le respect de leur dignité. Si sur le plan juridique, l’atteinte à la dignité dépend principalement des conditions matérielles de détention, d’autres aspects sont à prendre en compte.

Selon Emmanuelle Gindre, maître de conférences en droit à l’université de la Polynésie Française et organisatrice du colloque, « la dignité est le principe surplombant dont découle tous les droits fondamentaux. L’atteinte à l’identité fait partie de la dignité, comme la possibilité de travailler ».

Ce rendez-vous ouvert aux professionnels et au grand public a été l’occasion de préciser les contours de cette notion, au cœur d’un nouveau droit depuis le 8 avril 2021. Un prisonnier peut agir en justice s’il estime être détenu dans des conditions indignes. La France a réagi juridiquement après avoir été pointée du doigt à plusieurs reprises par la Cour Européenne des droits de l’Homme. En cause, l’indignité des conditions de détention en prison, notamment dans le centre pénitentiaire de Nuutania.

Dans cette maison d’arrêt, les outils d’accompagnements des détenus sont plus difficiles à mettre en œuvre que dans celle de Papeari. Si l’architecture inadaptée du bâtiment à Faa’a explique en partie ces difficultés, le statut du détenu est également à prendre en compte. « Quand on a un taux important de détenus prévenus donc non condamné, on ne peut pas les faire sortir. Donc on essaye d’adapter notre prise en charge à une population qui est en attente d’une décision de justice » précise Damien Pellen, le directeur de Nuutania.

Malgré la vétusté de l’établissement, l’administration tend à proposer des prises en charge plus adaptées aux conditions de détention. Le bâtiment des femmes très dégradé, a été rénové. Leur intimité est préservée avec des douches en cellule. Le directeur avance également que le taux d’occupation historiquement élevé (327% en 2016) est descendu à 120%. Ainsi, une cellule de 9m² n’accueille aujourd’hui plus que trois détenus, là où il y en avait auparavant cinq.

De l’autre côté de l’île à Tatutu, chaque détenu a sa propre cellule. Ironie du sort : après un séjour à Faa’a, certains se sont sentis isolés dans le nouveau centre, pourtant bien plus moderne et confortable. Il a justement été construit dans le but de réduire la surpopulation carcérale et de mieux préparer le prisonnier à sa future vie. L’objectif étant de faire comme s’ils étaient déjà en société. En évitant une rupture à la sortie, Vincent Vernet, directeur du centre de détention de Tatutu, espère limiter les risques de récidive : « On a une énorme zone qui s’appelle le pôle d’insertion et de prévention de la récidive où il y a les salles de classe, d’activité et de spectacle qu’ils n’ont pas à Faa’a. On a toute une zone de formation professionnelle, des ateliers de production qui sont immenses et qui permettent la mise en place d’activités économiques ».

Si le travail reste un moteur de réinsertion, le volet culturel et identitaire entre aussi en ligne de compte pour préparer la sortie des futurs ex-prisonniers.

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