Te Vai-ete, une oasis dans un désert d’humanité

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Publié le 18/10/2017 à 15:00 - Mise à jour le 18/10/2017 à 15:00

« Cela fera bientôt 23 ans que nous sommes ici et aujourd’hui, les locaux deviennent exigus. » , explique le Père Christophe. Mais l’idée est surtout d’avoir un local aux normes. « Notre local actuel est un peu vétuste, nous n’avons qu’une seule douche alors qu’il en faudrait plus et surtout il nous faudrait une salle où l’on puisse se rencontrer, ainsi qu’un coin pour prodiguer des soins ».

Mais il a aussi d’autres projets. « Nous désirons aussi faire quelques ateliers qui seront organisés par des bénévoles. Voilà pourquoi nous cherchons un local de préférence, appartenant à un privé, pour garder cette liberté d’action et de choix. »  Un local de 300 m2 conviendrait parfaitement dans ce but, de préférence dans la périphérie proche de Papeete et pas trop proche d’habitations ou d’écoles.  

« Actuellement nous accueillons environ une quarantaine de personnes chaque jour à l’heure des repas. ». Sur un total de 250 personnes qui ont fréquenté le centre depuis le mois de février, un tiers de ceux-ci sont des usagers réguliers, quant aux autres, ce sont des « clients » occasionnels qui viennent deux à trois fois par semaine et parfois moins.

Si la fréquentation reste plus ou moins la même, l’on pourrait se réjouir hâtivement de cette bonne nouvelle, sous entendant que la population des SDF se stabilise. Pas vraiment. Père Christophe avance une autre explication: « Nous avons plus ou moins le même nombre de personnes, parce que notre local ne nous permet pas d’accueillir plus de 60 personnes. On remarque que dès que l’on a une pointe d’affluence, celle-ci dure deux, trois jours et après on enregistre une grande baisse de fréquentation ». Explications: « Ils ne se sentent pas très à l’aise, car ce n’est pas évident de se retrouver dans un lieu assez confiné. »

Si il y a 23 ans le centre accueillait principalement des marginaux, on enregistre désormais un nouveau type de sans-abris. « Il y a une nouvelle population de personnes émargeant à la Cotorep, on a aussi des personnes qui ont un petit revenu, mais qui n’ont pas les moyens de se loger, ainsi que des jeunes plus ou moins délinquants. Ce n’est plus du tout la même chose ».
 

Ballotés de lieu en lieu ou plutôt chassés, si certains acceptent leur sort, regards baissés, d’autres ont du mal avec les regards fuyants des passants, les rendant invisibles. Et parfois, des envies de tout faire péter traversent leur esprit. « On ne peut rien faire, on est faible, mais il suffirait d’exploser le gaz qui est à Motu-Uta, pour tout effacer. J’y ai pensé, mais j’ai tenu le coup. », explique l’un de ces laissés pour compte, qui, dans des propos décousus, laisse transparaitre un profond mal être.

Suzanne, la cinquantaine d’années, vit dans la rue depuis son enfance. Si ces dernières années elle a connu une certaine stabilité, renouant avec une vie « normale » avec un toit sur sa tête, celle-ci n’a duré qu’un temps. « J’ai rencontré quelqu’un qui est devenu mon concubin et il m’a retiré de la rue. Je lui suis à jamais reconnaissante, car grâce à lui j’ai pu avoir un toit. Mais en 2016, il a été incarcéré, et je suis revenu au point de départ ».

Pour elle, Te Vai-Ete s’apparente à une oasis dans un désert d’humanité. « Je remercie Père Christophe, car avec ses bénévoles, il est là pour subvenir à nos besoins. Petit déjeuner, café et repas. Je suis là tous les matins. ». Pour elle, une nouvelle structure ne serait pas du luxe. « Il y a beaucoup de monde maintenant, et nous espérons que ceux qui sont sur des sièges vont penser à nous. Montrez que vous avez du cœur, que vous existez. Aidez-nous à nous sortir de cette vie ».

Savoir que le matin au réveil, elle aura le droit à un petit déjeuner, l’aide à se coucher le soir sur un bout de carton. Lit de fortune avec comme baldaquin, les étoiles, et comme rêve, un toit.
 

Rédaction Web avec Laure Philiber

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