Rythmologue cardiaque : zoom sur ces électriciens du cœur qui évitent 60 évasans par an

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La rythmologie est une "surspécialité" dédiée à la prise en charge des anomalies cardiaques. Au centre hospitalier du Taaone, un cardiologue rythmologue venu du CHU de Grenoble opère en ce moment des patients polynésiens. Organisée deux à trois fois par an, cette mission évite l’évasan d’une soixantaine de patients vers la métropole, chaque année. Immersion au cœur d'une intervention en rythmologie.

Publié le 04/03/2022 à 13:59 - Mise à jour le 04/03/2022 à 13:59

La rythmologie est une "surspécialité" dédiée à la prise en charge des anomalies cardiaques. Au centre hospitalier du Taaone, un cardiologue rythmologue venu du CHU de Grenoble opère en ce moment des patients polynésiens. Organisée deux à trois fois par an, cette mission évite l’évasan d’une soixantaine de patients vers la métropole, chaque année. Immersion au cœur d'une intervention en rythmologie.

Dans un bloc opératoire du CHPF, une jeune fille de 18 ans souffrant de tachycardie s’apprête à recevoir une intervention en rythmologie. Et pas question d’ouvrir le thorax. « Ici, on est en train de monter des sondes par les veines fémorales jusque dans les cavités cardiaques pour comprendre le mécanisme de la tachycardie », détaille le Dr Pascal Defaye, référant au CHU de Grenoble, venu dans le cadre d’une mission organisée deux à trois fois par an. « Et une fois qu’on aura ce mécanisme, on pourra monter une sonde complémentaire avec laquelle on va appliquer un courant pour détruire la structure responsable de la tachycardie ».

« Ici, on est en train de monter des sondes par les veines fémorales jusque dans les cavités cardiaque pour comprendre le mécanisme de la tachycardie » (crédit photo : Tahiti Nui Télévision)

A l’instar d’un électricien, le rythmologue va tenter de détecter le court-circuit et de le réparer. Pour y parvenir, le Dr Pascal Defaye va utiliser la radio fréquence ou la cryothérapie pour détruire le faisceau responsable de l’anomalie. En effet, « on peut détruire des structures de façon extrêmement précise, soit avec le froid, soit avec la chaleur », précise le médecin.

Si l’intervention dure en moyenne une heure, l’opération nécessite néanmoins une expertise particulièrement précise, le cœur étant un système électrique complexe. C’est ce qui justifie d’ailleurs la présence du Dr Defaye, car « il faut en faire beaucoup des opérations comme celles-ci pour être très performant, pour avoir des taux de succès proches de 100% », rapporte-t-il.

« Il faut en faire beaucoup des opérations comme celles-ci pour être très performant, pour avoir des taux de succès proches de 100% » (crédit photo : Tahiti Nui Télévision)

La mission du Dr Pascal Defaye a justement vocation à transmettre ces compétences pour valoriser le service de cardiologie du CHPF et le rendre autonome. « Ces missions d’experts, c’est surtout pour qu’on ait un hôpital de référence », reconnaît Bruno Ulmer, cardiologue au CHPF. « C’est aussi pour éviter des évasans, c’est-à-dire faire bénéficier à la population de la venue d’experts qui évitent qu’ils aillent en France. Ça veut dire que cette année, il y a 60 patients qui ne seront pas évasanés parce qu’on les aura traités sur place ».

Mais devant l’épidémie de facteurs de risques comme le diabète et le tabagisme, les cœurs des Polynésiens s’abiment, les artères coronaires se bouchent et les anomalies cardiaques se multiplient. « Notre volume d’activité augmente chaque année », déplore le chef du service de cardiologie, Rainui Richaud. « On a de plus en plus d’infarctus, de patients atteints d’insuffisance cardiaque ou de trouble du rythme. Ça grève un peu la santé de la population »

Face au nombre grandissant de Polynésiens atteints de maladies cardiaques, le CHPF déplore un manque d’effectifs (crédit photo : Tahiti Nui Télévision)

Et devant la hausse des interventions, soit 1 500 à 1 600 par an, les cardiologues déplorent un manque d’effectifs. « Les techniques progressent mais malheureusement, les maladies de surcharge progressent aussi », remarque le cardiologue Bruno Ulmer. « On a de plus en plus de patients qui ont des maladies cardiologiques, au-delà des troubles du rythme. Et on a de plus en plus besoin de cardiologues et notre nombre est effectivement insuffisant par rapport aux autres pays développés comme en Europe par exemple où ils ont des chiffres de cardiologues qui sont parfois deux fois supérieurs à ceux qu’on a ici ».

Au total, 18 cardiologues opèrent sur la Polynésie, dont 10 au CHPF. Et la relève polynésienne n’est pas forcément au rendez-vous…

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