Malia veille sur les SDF de Papeete. Chaque nuit, elle sillonne les rues de la capitale pour prendre de leurs nouvelles et distribuer des produits hygiéniques. Parfois, elle fournit aussi des préservatifs. « Il y a quand même certains que nous suivons qui s’adonnent à cette activité-là. Aussi bien des femmes que des hommes. On va dire une dizaine, pour ceux qui le disent ouvertement », explique-t-elle.
Ces travailleurs du sexe, Malia les connaît tous. Sans jugement, elle explique leur choix : « ils y en a qui disent que c’est par plaisir, d’autres pour combler un manque financier. Certaines travaillent mais malgré ça, elles continuent quand même de pratiquer cette activité-là pour arrondir un peu les fins du mois »
Parmi les protégés de Malia, il y a Cristalline. Efféminée, ses parents la rejettent à 15 ans. Elle commence alors à se prostituer :« c’était mon gagne-pain à ce moment-là. Il fallait payer aussi le bus, le casse-croute pour pouvoir aussi se nourrir. Il fallait se nourrir pour pouvoir bien travailler à l’école. C’est ce qu’on faisait le soir ».
Aujourd’hui, Cristalline a 32 ans. En juillet, elle est évasanée à Paris pour une opération au cœur. Depuis son retour, elle travaille à son compte. La prostitution pour elle, c’est fini. Mais l’évolution des pratiques de la rue, elle la connaît. Confinement ou pas, rien n’a changé.
« Quand ça ne marchait pas le soir, on venait le matin », rapporte-t-elle. « Aujourd’hui, ce n’est plus dans les coins qu’on va. Ce sont des chambres qu’on peut payer à la journée. La prestation, ça vient dedans aussi, donc il paye la chambre, la chambre ça nous revient […]. Maintenant, si tu es au top, si pour le client tu lui tapes dans l’œil, tu peux rafler 7 à 8 clients ».
Cristalline souhaite une reconnaissance des prostitués et leur protection. Mais un autre combat l’anime aujourd’hui : faire changer les regards portés sur les sans-abri.