TNTV : Vous avez été ministre dans les années 1980 et, depuis 35 ans, vous étiez dans l’aérien, ici à l’aéroport. Quel regard portez-vous sur ces 4 décennies de l’histoire aérienne polynésienne ?
Manate Vivish : « D’abord la croissance des trafics et, donc, par la même occasion, la croissance de la compagnie qui compte aujourd’hui 1500 employés et qui opère sur 12 avions ».
TNTV : Il y a aussi un point noir : le crash mortel d’Air Moorea. Quels enseignements les compagnies ont-elles tiré de ce drame ? Sont-elles gérées différemment ? »
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Manate Vivish : « Il y a effectivement quelques incidences directes qui ont touché l’exploitation, mais au-delà de ça, les compagnies aériennes sont extrêmement auditées, extrêmement contrôlées par les autorités. Chaque fois que l’on peut apprendre de quelque chose, on n’hésite pas à la faire ».
TNTV : Un autre évènement, plus récent, qui a affecté les compagnies, c’est la crise sanitaire. Devez-vous encore gérer la compagnie différemment ?
Manate Vivish : « Cela a été un choc. Nous avons dû arrêter complètement l’activité, ce qui a été assez inouï. Cette décision a été prise par la compagnie elle-même, car nous souhaitions protéger les populations des îles et faire en sorte que le virus n’arrive pas là-bas ».
TNTV : Aujourd’hui, votre entreprise compte 1500 salariés. Recrutez-vous encore ?
Manate Vivish : « On recrute quasiment tout le temps chez Air Tahiti. Il y en a qui partent, d’autres qui restent. Nous continuons de recruter, des pilotes notamment, mais surtout des mécaniciens. Nous en manquons ».
TNTV : Votre successeur Édouard Wong fat prendra ses fonctions en pleine explosion de la concurrence. Air Moana grignote-t-elle vos parts de marché ?
Manate Vivish : « Air Moana a pris 20 à 25% de parts de marché. C’est autant de passagers en moins que nous avons. Nous avons dû suivre l’appel d’air provoqué par l’arrivée de cette concurrence par une baisse des tarifs très importante qui pèse sur les chiffres de la compagnie, mais, certainement, aussi, sur les chiffres du concurrent ».
TNTV : Avant l’arrivée de ce concurrent, vous indiquiez qu’il n’y avait pas de place pour deux compagnies. Une troisième, Motu Link, pourrait s’installer. Qu’en pensez-vous ?
Manate Vivish : « Je continue de penser qu’il n’y a pas de place, ni pour deux, ni pour trois. C’est un point de vue toujours d’actualité compte tenu des éléments chiffrés à notre disposition. On voit bien que les compagnies sont à la peine. Et les compagnies, pour un petit marché comme le nôtre, sont en train de détruire de la valeur ».
TNTV : Vous devriez pourtant battre votre record cette année. On parle de 950 000 passagers environ transportés sur votre compagnie. Vous n’avez donc pas l’air de trop souffrir de cette concurrence…
Manate Vivish : « Effectivement, les passagers sont en forte croissance. Mais cela ne suffit pas, à mon sens, pour justifier l’existence d’une compagnie supplémentaire ».
TNTV : Certaines îles sont encore isolées. Avez-vous encore de capacités de développement pour répondre à cet isolement ?
Manate Vivish : « Ces îles sont sous le coup d’une délégation de service public. Donc, c’est le Pays qui a la main sur cette activité et qui décide du nombre de vols et du type d’avions. Nous avons un certain nombre de leviers de développement, mais qui vont plutôt vers les îles lointaines. Je pense aux Marquises. Le président Brotherson appelle de ses vœux la construction d’un aéroport international, et je pense qui si quelque chose devait évoluer dans ce sens, Air Tahiti serait certainement au rendez-vous ».
TNTV : A propos du président Brotherson, justement, vous avez entendu son objectif d’atteindre les 600 000 touristes. Cela vous parait envisageable ?
Manate Vivish : « Moi, je dis : ‘chiche’. C’est de l’activité à prendre, des passagers à transporter et c’est notre rôle et notre but ».
TNTV : Et l’aéroport des Marquises, c’est possible ?
Manate Vivish : « À mon sens, oui. L’international, j’y crois beaucoup moins. Mais on commence à avoir un trafic suffisamment important sur les Marquises qui justifie qu’on envisage de passer à des appareils plus importants que les ATR. Nous étudions, je ne vous le cache pas, l’introduction d’un Airbus A220. Evidement, le processus est encore long, mais nous y pensons. Je pense que c’est l’avenir ».