Le théâtre en prison, une introspection pour les détenus

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Publié le 02/05/2018 à 14:24 - Mise à jour le 02/05/2018 à 14:24

« Ce qui est certain c’est que je ne voulais pas faire de la peine aux gens. Mais j’ai tué quelqu’un. Une fois, j’ai tué quelqu’un, même si je ne suis pas folle. »  Les mots de la pièce de théâtre Sandre ont une résonnance particulière entre les murs de la prison de Tatutu, à Papeari.

Ce jeudi, Erwan Daouphars a joué cette œuvre devant une centaine de prisonniers. C’est la première fois que le théâtre entre dans ce centre de détention. Après la représentation, un détenu confie :

« C’est la première fois que j’allais au théâtre. Au début, je ne comprenais pas tout. Mais après, le temps passe, et on comprend. Le texte reflète nos erreurs… »

Un de ses codétenus abonde dans ce sens. Très touché par la pièce, il s’est retrouvé dans les mots du personnage. L’histoire jouée devant lui l’a percuté et l’a amené à réfléchir sur ses actes et sa condition. Il témoigne :

« C’était passionnant. Il y a des choses par rapport à ce qu’on vit ici, par rapport aux enfants. J’ai retrouvé beaucoup d’expressions et de moments qu’on a plus ou moins vécu. »

 Sur scène, le comédien, seul dans son fauteuil, déclame son texte face à plusieurs dizaines de détenus. Pour Erwan Daouphars aussi, l’expérience a été intense.

C’est la première fois qu’il jouait dans un tel contexte. S’il a fallu s’adapter et modifier quelques détails pour la mise en scène, le comédien ne regrette pas de l’avoir fait. Il explique :

« Au départ, j’étais un peu frileux, j’avoue. Et puis là, c’est magique le rapport avec eux. Le public est attentif. »

A la fin de la représentation, l’échange est positif. Le public se laisse aller à la parole. Erwan Daouphars explique :

« Je n’oublierai pas cette représentation. Les détenus m’ont dit qu’ils se sont reconnus dans le texte, que ça les faisait réfléchir, que ça leur faisait du bien pour la suite… »

La suite de cette représentation, ce sont des ateliers d’écriture et de jeu. Les prisonniers qui en ont fait la demande vont participer pendant une dizaine de jours à un travail autour du théâtre avec l’auteure et le comédien de Sandre. Pour les prisonniers, ce moment privilégié peut être le moyen de mettre des mots sur leurs actes.

« Cela peut être bien pour les gens qui ont du mal à dire ce qu’ils ressentent. Ce n’est pas toujours facile d’en parler ou de l’exprimer. Ça peut ouvrir le cœur à quelqu’un… »

Rédaction web avec Laure Philiber 

« Tout le monde peut arriver à un accident de la vie dramatique »

Fruit d’un partenariat entre le Service de probation et de réinsertion et la compagnie du Caméléon, Sandre a été jouée à Tatutu pour la première. Des ateliers sont organisés à la suite du spectacle. Pour Véronique Vidal, directrice pénitentiaire d’insertion et de probation, le théâtre est bénéfique pour les prisonniers :

« C’est une collaboration que le Spip a voulu tisser avec la compagnie. On a souhaité que Sandre soit jouée car cela vient en résonnance par rapport à un passage à l’acte. Dans cette pièce, il y a la réflexion que tout le monde peut arriver à un accident de la vie dramatique. Toute cette réflexion que cette femme a par rapport à sa famille. Ce qui est intéressant, c’est que cette femme dans la pièce dit à plusieurs reprises : « J’ai oublié, je ne sais plus… » C’est quelque chose qu’on entend souvent chez les personnes détenues. […] Les ateliers, tous ces supports, permettent à la personne de se voir révéler les compétences. C’est un travail de réflexion qui doit être mené par la personne. » 

 

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