La religion et la culture compatibles au don d’organes

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Malgré le nombre important de transplantations effectuées depuis le début d’année, le fenua manque de donneurs. Mais à rebours des croyances collectives, les institutions religieuses ne s’opposent pas au don d’organes.

Publié le 22/06/2022 à 17:18 - Mise à jour le 23/06/2022 à 11:08

Malgré le nombre important de transplantations effectuées depuis le début d’année, le fenua manque de donneurs. Mais à rebours des croyances collectives, les institutions religieuses ne s’opposent pas au don d’organes.

En ce 22 juin, journée nationale de réflexion sur le don d’organes et la greffe et de reconnaissance aux donneurs, un programme spécial a été élaboré au centre hospitalier du Taaone. Au programme : une conférence sur les liens entre la culture polynésienne et le don d’organes, ainsi qu’un partage d’expériences entre personnes concernées. L’occasion de faire de la sensibilisation. « Il faut savoir que si on est donneur, on peut aussi être receveur. C’est la solidarité de notre société » explique la docteure Ouarda Krid, médecin réanimatrice et coordinatrice du prélèvement d’organes. Car cette journée a également pour objectif de casser certains clichés qui, aujourd’hui encore, ont la peau dure.

« Il y a eu des chefs religieux qui se sont positionnés publiquement pour le don d’organes » 

Ouarda Krid, médecin réanimatrice et coordinatrice du prélèvement d’organe

Loin des clichés, les institutions religieuses ne jouent pas un rôle de frein sur cette question, comme le décrit la docteure Pascal Testevuide, cheffe du service de néphrologie : « Il n’y a jamais eu de franche opposition au niveau des autorités religieuses locales. Elles ont au contraire été un appui sur lequel on a pu jouer. Il y a eu des chefs religieux qui se sont positionnés publiquement pour le don d’organe ». En effet, l’Église protestante ma’ohi avait déclaré publiquement en 2019 qu’elle était en faveur du don d’organes.

Si c’est du côté des protestants qu’est venu le signe le plus fort de soutien à la question des transplantations, les autres religions ne sont pas en reste : « Les religions sont plutôt pro don d’organes. En Espagne, ils sont très catholiques et ce sont les champions dans ce domaine. La seule religion qui s’y oppose officiellement, c’est le bouddhisme, puisque ça va à l’encontre du principe de réincarnation. Ici, il y a même des témoins de Jéhovah qui ont été greffés ».

La légende de Hina

Les oppositions au don d’organes peuvent parfois être justifiées par la culture ma’ohi. Mais cette dernière est-elle vraiment opposée au don d’organes ? C’est la question que s’est posée l’encyclopédiste Edgar Tetahiotupa. « À l’époque, il n’y avait pas de transplantation. J’ai donc abordé cette question à travers les légendes, comme celle de Hina et du cocotier. L’anguille s’est offerte, sa tête a été coupée et de cela est né un bel arbre, le cocotier, qui a servi à nourrir les gens. C’est une représentation du don de son intégrité physique » raconte-il. Selon-lui, les légendes traditionnelles mettent souvent en scène des personnes qui font le don de soi pour le bien des autres.

Ainsi, le principal frein serait le manque de sensibilisation et de discussion, puisque cela oblige à se questionner sur la mort. Aujourd’hui, 126 patients sont en attente d’une greffe au fenua. L’hôpital du Taaone invite donc les Polynésiens à discuter de cette question : « Le premier frein, c’est que les proches n’ont jamais abordé cette question avec le défunt. Pour ou contre, peu importe, il faut en parler ! » insiste Ouarda Krid.

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