La filière porcine du fenua étranglée par la flambée des prix

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Submergés par les charges, les éleveurs de porcs exhortent le gouvernement à monter au créneau. La hausse du prix du conteneur associé à l'explosion des prix de l’alimentation porcine ne leur permettra pas de tenir jusqu'en 2022. Une activité « en danger » qui fait pourtant vivre une centaine de familles.

Publié le 16/11/2021 à 19:18 - Mise à jour le 23/04/2022 à 16:18

Submergés par les charges, les éleveurs de porcs exhortent le gouvernement à monter au créneau. La hausse du prix du conteneur associé à l'explosion des prix de l’alimentation porcine ne leur permettra pas de tenir jusqu'en 2022. Une activité « en danger » qui fait pourtant vivre une centaine de familles.

Médicaments, aliments, carburants : l’envolée des prix n’épargne pas la filière porcine. Dans une situation critique, le syndicat des éleveurs de porcs fait état d’une hausse de 28% de ses charges d’exploitation. « J’ai près d’un million de charges supplémentaires lié à l’alimentation que je ne peux pas répercuter sur mon prix de vente. Là on a épuisé toute notre trésorerie et on n’a plus de capacité de financement » alerte un éleveur de porc de Hitiaa, Eric Coppenrath.

Si les prix étaient déjà soutenus en 2019, la crise Covid est passée par là. La désorganisation de l’industrie mondiale et le bouleversement du trafic maritime a gagné depuis les rives du fenua. Ainsi les éleveurs n’échappent plus à l’inflation sur les matières premières qui composent l’alimentation des porcins. Principalement des céréales à bas de blé, de maïs et d’orge, mais aussi du soja, du tournesol ou du colza, ainsi que des graisses végétales et des produits laitiers. Réuni à la chambre de l’agriculture de Taravao, le syndicat des éleveurs ont voulu faire la démonstration, chiffres à l’appui de l’envolée.

Le syndicat des éleveurs de porc réuni à la chambre de l’agriculture à Taravao. (Crédit photo Esther Cunéo/TNTV)

« Plus ça va, plus c’est dur, mes sacs ont pris presque 30%. Mes porcelets il faut que je les vende à prix d’or pour que ce soit rentable ».

En l’espace de deux ans, le prix des cargaisons a bondi de 1,7 à 1,9 million de fcfp. Soit une surcharge fret d’environ 200 000 fcfp par conteneur, contre 12 000 Fcfp en 2019. « Sachant que certains éleveurs font venir quatre à cinq conteneur par mois, ça se chiffre assez vite » commente Eric Coppenrath, également vice-président du syndicat. La saignée économique est telle qu’elle fait craindre à certains exploitants un dépôt de bilan dès l’année prochaine. A commencer par les plus petites porcheries. « On n’a pas de trésorerie nous, on n’a pas été aidé pendant le Covid, c’était très compliqué de nourrir nos bêtes et après il y a eu des retards de bateau… » rapporte Yoan Douet, responsable d’une petite exploitation. « Plus ça va, plus c’est dur, mes sacs ont pris presque 30%. Mes porcelets il faut que je les vende à prix d’or pour que ce soit rentable ».

Et pour survivre à la crise, il assure avoir dû parcourir environ 200 kilomètres par jour pour trouver de quoi nourrir ses bêtes à moindre frais. Des tournées dans les restaurants, les cantines ou les hôtels, à la recherche « d’eaux grasses », c’est-à-dire de déchets alimentaires. Mais le confinement est aussi passé par là, ne laissant pas d’autres choix aux éleveurs que d’importer. « Tout a augmenté, y compris le gazoil, bientôt il n’y aura plus de cochons, on parle d’autosuffisance alimentaire, c’est bien beau mais sur le terrain on en voit pas la couleur. »

L’élevage de Teking Lai Ah Che à Papeari. (Crédit photo Esther Cunéo/TNTV)

« Tout a augmenté, y compris le gazoil, bientôt il y aura plus de cochons, on parle d’autosuffisance alimentaire, c’est bien beau mais sur le terrain on en voit pas la couleur. »

Désespéré, le syndicat demande au gouvernement de monter au créneau. « Soit en soutenant la filière par une subvention à la production, soit en modifiant l’arrêter CM qui réglemente le prix des carcasses à nos clients » précise Eric Coppenrath. Aujourd’hui fixé à 1 200 francs le kilos, le porcelet coûte finalement plus cher qu’il ne rapporte. Conventionné avec la Charcuterie du Pacifique et la Salaison de Tahiti, ce prix plafond de vente au kilos n’a pas bougé depuis 20 ans selon le syndicat. Idem pour le prix de la carcasse, réglementé par arrêté en conseil des ministre et figé depuis 8 ans.

Si la Polynésie avait l’ambition de couvrir 30% de la demande locale en viande de porc, elle est sur la mauvaise pente. Aujourd’hui la filière atteint péniblement les 20%. Pas encore de quoi espérer une  autonomie alimentaire.

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