Hani Teriipaia, « surdiplômée » de la Santé, haut fonctionnaire en Guadeloupe

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Publié le 06/06/2016 à 13:54 - Mise à jour le 06/06/2016 à 13:54

Il y a quelques mois, le nom de Hani Teriipaia est apparu dans les médias. La jeune femme, fille de l’ancien ministre de la Culture Miri Teriipaia était pressentie pour prendre la direction de l’hôpital. La jeune femme de 27 ans est l’une des plus diplômées de Polynésie. Mais elle n’imaginait pas atteindre ce niveau d’étude.

Hani a grandi à Anau à Bora-Bora et à Raiatea. Après un baccalauréat scientifique, elle a suivi une licence de SVT. « Je n’ai jamais pensé faire de longues études, je n’imaginais même pas quitter la Polynésie. Je n’avais pas idée des possibilités de métiers et de filières qui existaient en métropole. Je m’étais peu renseignée et nous n’avons pas été sensibilisés au lycée », confie-t-elle. « Je pensais modestement obtenir mon BAC et peut-être une licence pour espérer travailler en Polynésie. Je n’avais pas d’objectif particulier, comme la plupart des lycéens, je suppose… Je pensais également que j’avais des capacités très limitées donc je n’avais pas d’ambition. »

Et pourtant. À la fin de sa deuxième année de licence, Hani doit faire le choix de quitter le fenua pour poursuivre ses études. C’est là que tout s’enchaîne. « Il n’existait pas encore de L3 SVT à Tahiti j’ai dû partir pour la métropole. J’ai choisi Toulouse avec un ami de ma promotion. J’ai poursuivi une L3 spécialisée en biologie cellulaire et physiologie. À ce moment j’ai pensé faire de la recherche en immunologie ou cancérologie…
Un jour des étudiants en médecine de la faculté de médecine de Toulouse sont venus nous présenter le Master santé publique. Ils faisaient une espèce de publicité pour attirer la candidature d’étudiants en biologie. Curieuse je me suis renseignée d’avantage et j’ai pris la décision de m’orienter plutôt vers la santé. J’ai donc quitté le cursus classique des études en biologie. »

Après un Master en santé publique, « gestion des institutions et services de santé », Hani se lance dans une nouvelle aventure. En 2014, elle décroche un Certificat d’aptitude aux fonctions de directeur d’établissement ou de service d’intervention sociale. « Grâce à cette formation j’ai pu être directrice stagiaire dans plusieurs types d’établissements. J’ai eu de riches expériences et fait des rencontres très intéressantes. Je me suis perfectionnée dans tous les domaines qu’un directeur se doit de maîtriser, les ressources humaines, la gestion financière, le management, la stratégie d’établissement, le droit », raconte la jeune femme.

Elle aurait pu s’arrêter là. Mais non. « Un professeur connu dans le domaine social au niveau national m’a conseillé de faire une formation en Sciences politiques pour élargir mes connaissances. C’est ainsi qu’en 2013 je me suis inscrite dans deux formations à Sciences Po Toulouse, une pour obtenir le certificat d’étude politique en 1 an, une autre pour me préparer aux concours de la fonction publique dans le domaine de la santé », explique Hani.

Faire Sciences Po, cela « allait de soi » pour la jeune femme. « Mon père est un politicien et un enseignant à l’origine. Mon grand-père était un politicien et un homme au grand cœur qui a toujours tout fait pour aider la population de sa commune. J’ai grandi baignée dans la politique, les meetings, les relations, le réseau… Cela a surement influencé mon parcours, car diriger un établissement c’est aussi avoir de l’appétence pour une certaine forme de pouvoir. Faire des études à Sciences Po allait de soi pour moi et je suis très satisfaite de ce que j’y ai appris. D’ailleurs, en parallèle à mon travail, je compte faire prochainement un Master 2 Sciences Po spécialisé en géopolitique et relations internationales pour mieux comprendre le monde d’aujourd’hui avec le phénomène de mondialisation et les interactions entre les pays », confie-t-elle.

Hani Teriipaia a également passé un concours national de la haute fonction publique (A/A+), celui d’inspecteur de l’action sanitaire et sociale. Elle l’a bien sûr obtenu et suivi la formation qui a duré 18 mois à l’Ecole des hautes études en santé publique (EHESP). 

Hani Teriipaia se dit « sensible au bien-être des personnes, à leur état de santé, leur situation sociale ». Son ambition aujourd’hui est « véritablement de contribuer à offrir un système de santé efficace et efficient à la population polynésienne, mon peuple, mon fenua. »
La « surdiplômée » a postulé en 2014  pour être adjointe à la direction de l’hôpital de Uturoa Raiatea. « Ce fut un long parcours compliqué et décevant… Je suis finalement repartie en métropole en janvier 2015 en acceptant mon admission au concours d’inspecteur. Aujourd’hui je suis fonctionnaire d’État pour le ministère de la Santé. J’ai été affectée a un très bon poste (chef de service) en Guadeloupe au siège de l’Agence régionale de santé (équivalent de la direction de la santé) depuis le 1er avril 2016. »
Hani espère toujours pouvoir revenir s’installer en Polynésie et « servir » son fenua.  

La jeune femme conseille aux jeunes polynésiens de partir. « Bien sûr ils ont tout à gagner. Ils vont s’enrichir, s’ouvrir l’esprit, faire de belles rencontres, améliorer leurs connaissances, se faire de l’expérience… J’encourage tous les Polynésiens qui peuvent partir à le faire. Je leur conseille même de vivre ailleurs si leur cœur le souhaite. »
Mais elle souligne tout de même qu’il est important de bien choisir sa filière. « Pour ceux qui souhaitent revenir après leurs études je leur conseille de bien choisir leur filière pour viser les métiers qui existent en Polynésie (domaine de l’enseignement, le tourisme, le commerce…). Sachez juste que le marché est petit, il n’y a hélas pas de place pour tout le monde et ces places sont chères. Il y a aussi la possibilité d’être créateur d’entreprise, même souci le marché est petit. »
 

Manon Kemounbaye

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