Géopolitique : l’Indopacifique nouveau centre du monde

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Deux océans et des territoires à protéger. La zone Indopacifique est une priorité pour la France. Dans un contexte de tensions entre les Etats Unis et la Chine, elle se positionne comme un acteur de la sécurité militaire et économique de cette vaste région aujourd’hui très convoitée. Eclairage.

Publié le 23/04/2023 à 16:58 - Mise à jour le 24/04/2023 à 10:51

Deux océans et des territoires à protéger. La zone Indopacifique est une priorité pour la France. Dans un contexte de tensions entre les Etats Unis et la Chine, elle se positionne comme un acteur de la sécurité militaire et économique de cette vaste région aujourd’hui très convoitée. Eclairage.

L’Indopacifique est le nouveau centre géopolitique du monde qu’observent avec attention les deux superpuissances que sont les Etats unis et la Chine. La France est l’unique force européenne dans cette zone convoitée et théâtre de rivalités potentielles. De la pêche illégale, aux trafics illicites, la stabilité de la région est au cœur de la politique internationale.

« Il y a un jeu de puissances qui se joue aujourd’hui dans cette région », souligne le capitaine de frégate Jérémy Bachelier, chercheur au Centre des Etudes de Sécurité de l’Institut Français des Relations Internationales (IFRI). « On l’observe depuis près d’un an, avec la visite d’Etat du ministre des Affaires étrangères chinois qui était venu séduire un certain nombre de ces îles du Pacifique pour en tirer les bénéfices politiques et économiques. Depuis lors, c’est un petit peu une recrudescence de la part des grandes puissances, à l’égard de ces îles du Pacifique, pour faire en sorte que les intérêts des uns et des autres soient préservés ».

Depuis février, deux bâtiments de la Marine Nationale sont ainsi déployés : le porte hélicoptères amphibie Dixmude, et la frégate Lafayette, effectuent un tour du monde de 5 mois.

Baptisée « Jeanne d’Arc », cette mission se veut un outil de diplomatie navale. Dans un contexte mondial de tensions, la France souhaite se placer en puissance d’équilibre dans la région Asie Pacifique. 800 militaires et un groupement tactique embarqué de l’armée de terre vont procéder à divers exercices dans chaque pays visité. Leur escale en Polynésie est prévue au mois de mai, après un exercice d’ampleur à Nouméa.

« Aller dans des zones d’intérêt stratégique »

« L’objectif c’est d’abord d’aller dans des zones d’intérêt stratégique pour la France, qu’il s’agisse de protéger le flux maritime, ou de réaliser des exercices d’ampleur avec différents pays partenaires des régions dans lesquelles nous sommes amenés à évoluer », précise Jérémy Bachelier.

Paris multiplie donc les partenariats avec les grands pays amis et réaffirme sa position face à la Chine. « Nous avons des alliés, des partenaires : l’Australie, partenaire essentiel, la Nouvelle-Zélande, l’Inde, le Japon. Et nous avons bâti des partenariats inédits, ces dernières années, avec chacun d’entre eux », déclarait le président Emmanuel Macron lors de sa visite officielle en Polynésie, en juillet 2021.

Cette coopération régionale permet de mieux surveiller ces vastes espaces maritimes. Les ressources halieutiques s’épuisent en mer de Chine méridionale. Pour certains pays, la tentation est donc grande de puiser dans le vivier des petites îles du Pacifique. 

« Il est essentiel qu’il y ait une coordination de la part de la France, de l’Australie, et des Etats-Unis, pour faire en sorte que ces îles puissent être préservées à l’avenir de toute velléité en matière de pêche illégale venant de pays tiers », souligne Jérémy Bachelier.

Dans sa volonté expansionniste, Pékin garde un œil attentif sur la situation politique de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie, où une part de la population désire l’indépendance. Un contexte susceptible de fragiliser la stratégie Indopacifique chère à Emmanuel Macron.

« Malheur aux isolés »

Lors de sa venue, en 2021, le président de la République réaffirmait la place de la France en Océanie et mettait en garde ses interlocuteurs sur les ambitions du géant asiatique.

« Malheur aux petits. Malheur aux isolés. Malheur à celles et ceux qui vont subir les influences, les incursions, de puissances hégémoniques qui viendront chercher leurs poissons, leurs technologies, leurs ressources économiques. Et je vous le dis avec clarté : ici c’est la Polynésie, mais, ici, c’est la France, et vous serez protégés », lançait-il dans son discours.

Ces dernières années, la France a multiplié les démonstrations de force. Les missions de souveraineté Heifara et Pégase 22 ont permis de démontrer la capacité de projection de ses forces armées sur de longues distances. Paris s’attèle aussi à renforcer ses moyens dans la zone avec le remplacement annoncé de 5 avions Falcon et le renfort de deux nouveaux patrouilleurs.

L’indopacifique compte aujourd’hui 2 millions de ressortissants français, dont 1.63 million installés dans les territoires tricolores. La région est d’autant plus stratégique qu’elle représente 93% des 11 millions de km2 de la Zone Economique Exclusive française.

Biodiversité, terres rares, les fonds marins de ce vaste « continent » bleu regorgent aussi de multiples richesses que Paris promet de protéger.

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