De plus, autre source d’incompréhension, l’association Fatu fenua n’a pas pu se rendre comme prévu à Makatea avec La goélette Maris Stella, déroutée sur Mataiva, il y a deux jours. L’association n’a pas pu non plus embarquer sur le navire de la flottille administrative pour assister à la visite technique du gouvernement. Ni même le député Moetai Brotherson qui s’interroge sur ce déplacement gouvernemental.
« Ce voyage du gouvernement à Makatea me questionne sur deux points. L’objet réel de ce déplacement, et sur le fait qu’aucun membre de l’assemblée, ni parlementaire, ni les associations opposées au projet de reprise des extractions des phosphates ont été invités ».
En tant que député, Moetai Brotherson a demandé à faire partie du voyage, mais « Cela m’a été refusé, au motif que c’était réservé au gouvernement et que c’était un voyage technique. » Poursuivant, « Si c’est un voyage technique, comment cela se fait-t-il que la Diren, n’aie pas été invité ? » s’interroge-t-il.
Pour le député indépendantiste, « Il faut tirer les enseignements du passé. » Et de s’expliquer. « Makatea, c’est une île que l’on a saccagée et que l’on a laissée du jour au lendemain, à l’abandon. Je ne pense pas que la solution pour l’avenir soit de reproduire les erreurs du passé. »
Evoquant le potentiel de Makatea dans le domaine du tourisme, du développement durable, d’agriculture et apiculture, des solutions viables selon lui pour l’avenir de l’île, il estime que « le coût actuel du phosphate n’est pas favorable à ce genre d’entreprise, et les justifications avancées en terme de créations d’emplois, et de réhabilitation de l’île sont vraiment surréalistes. »
Du coté de Julien Mai, le maire de Makatea, celui-ci se montre plutôt favorable au projet. « Il est vrai que le projet divise, mais concernant ceux qui s’inquiète de l’environnement, je dirais que l’île est déjà dénaturée. Le masque de verdure qui a proliféré depuis l’arrêt des extractions, en 1966, cache la vérité des premières extractions. Aujourd’hui, pour ce nouveau projet, il y a des garde fous. » Et de citer, le cahier des charges de l’environnement, de l’urbanisme, de l’emploi.
Pour le premier magistrat de l’île, peu de doute, le projet aboutira. « Le choix, c’est celui du gouvernement. Ils ont promis à la population d’accélérer le processus pour faire en sorte que les choses ne traînent plus ».
Quant aux inquiétudes de certains habitants, « Il y a aussi celles et ceux qui veulent que l’emploi soit au rendez-vous, car ceux qui vivent à Makatea souffrent en silence. » Pour résumer la pensée du maire, ceux qui vivent à Tahiti à longueur d’année et qui sont contre les extractions ne pensent pas à ceux qui sont restés sur Makatea, qui voient d’un bon œil, la création d’emplois. « Quelque part, il y en a qui sont nantis et d’autres non. On est à la recherche d’une certaine équité. »
Les entrailles du passé se rouvriront-elles à Makatea ? Selon les industriels, l’île regorge encore de phosphates. Les défenseurs de l’environnement ne baissent pas les bras. 153 000 personnes ont déjà signé une pétition en ligne pour s’opposer au projet.
C’est à partir de 1917, que les importants gisements de phosphate de l’île sont exploités, ce qui entraine d’importants bouleversements. De nombreux travailleurs étrangers ou originaires du reste de la Polynésie s’installent à Makatea. D’importantes infrastructures industrielles y ont été édifiées et la collecte du minerai modifie profondément les paysages. Jusqu’en 1966, date de l’épuisement des réserves en phosphate, où les infrastructures ont été abandonnées et les sols troués comme du gruyère. Depuis la végétation a envahi les structures désormais rouillées, l’eau de pluie a rempli les trous laissés par les mineurs.