Délinquance juvénile : les missions de la PJJ « méritent encore d’être déployées »

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La protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) existe depuis 2006 en Polynésie. Sa mission ? Prendre en charge les mineurs, qu'ils soient victimes ou délinquants. Dans ce cadre, elle assure le suivi des mesures et sanctions éducatives ou peines prononcées par les juridictions pénales des mineurs. Liliane Vallois, directrice territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse était l'invitée de notre journal :

Publié le 18/01/2021 à 10:51 - Mise à jour le 18/01/2021 à 10:56

La protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) existe depuis 2006 en Polynésie. Sa mission ? Prendre en charge les mineurs, qu'ils soient victimes ou délinquants. Dans ce cadre, elle assure le suivi des mesures et sanctions éducatives ou peines prononcées par les juridictions pénales des mineurs. Liliane Vallois, directrice territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse était l'invitée de notre journal :

TNTV : Combien de jeunes sont-ils suivis par la PJJ aujourd’hui ?
Liliane Vallois : « Les chiffres arrêtés sont ceux de 2019. On a eu une petite baisse d’activités sur 2020, mais on a environ 500 jeunes suivis par la PJJ sur l’ensemble du territoire de la Polynésie. »

Est-ce que ce chiffre a tendance à augmenter ?
« Non, c’est plutôt une baisse. Ça faisait partie un peu de mes missions à mon arrivée, de vérifier si cette baisse correspondait bien à une baisse de la délinquance juvénile ou, est-ce que l’action de la PJJ pouvait gagner à être étendue. Vous l’avez dit, la PJJ est sur le territoire depuis moins de 15 ans donc nos missions méritent encore d’être déployées pour que la jeunesse de Polynésie bénéficie des mêmes outils et de la même aide que n’importe quel jeune sur l’ensemble du territoire national. »

Quels sont les principaux facteurs qui poussent les jeunes vers la délinquance en Polynésie ?
« On a réalisé une petite analyse qualitative du public. Savoir un peu qui sont les jeunes suivis par la Protection judiciaire de la jeunesse. On trouve, au moins pour un tiers d’entre eux, des jeunes extrêmement pauvres, issus de milieux extrêmement pauvres, dont les familles vivent sous le seuil de pauvreté. Ce sont des jeunes qui sont, pour certains en tout cas, inactifs. Sur le profil global des jeunes suivis on a eu quelques surprises à l’occasion de cette analyse qualitative. On pensait que nombreux étaient ceux qui n’étaient pas forcément élevés par leurs parents. C’est faux puisque environ 70% des jeunes que nous suivons vivent avec au moins un de leurs parents. À peu près 13 ou 14% d’entres eux vivent avec la famille élargie, plutôt les grands-parents mais pas seulement. Donc l’environnement familial est présent. Probablement, le projet de vie est un petit peu mis en difficulté, d’autant plus en ce moment. »

Justement avec la crise sanitaire et économique, il faut dire que vous êtes arrivée sur le territoire il y a seulement 6 mois, est-ce que vous avez pu tirer un bilan et justement est-ce qu’on peut dire que la crise sanitaire et économique a eu un impact sur la délinquance en Polynésie ?
« Pas pour le moment. La période de crise sanitaire a révélé davantage encore de difficultés d’ordre éducatif, ou psychologique, ou psychiatrique même. C’est un public pour lequel les problématiques par exemple psychiques, sont assez peu, assez mal prises en charge parce que les dispositifs existants sur le territoire ne sont peut-être pas assez nombreux. Je sais que c’est en voie de se développer. C’est plutôt un public qui ne s’est pas distingué par des manifestations délictueuses ou criminelles plus importantes pendant la période de confinement. Le lien avec les services de la PJJ est resté très très fort. Tous les éducateurs de la PJJ ont continué à travailler. Leur accompagnement, même s’il était différent, en distanciel, a existé et on n’a pas noté d’augmentation particulière. »

Concrètement justement, comment les jeunes sont-ils pris en charge ? Vous travaillez en collaboration avec des services du Pays. Est-ce que ces collaborations fonctionnent et est-ce qu’elles aident vraiment les jeunes à se remettre sur la bonne voie ?
« La collaboration se construit dans le temps. Comme je vous le disais, la PJJ n’existe que depuis une quinzaine d’années. On est en train de renforcer cette collaboration. C’est indispensable. On ne peut pas prendre en charge les jeunes de manière un peu feuilletée ou saucissonnée c’est-à-dire prise en charge civile, prise en charge pénale, aide, réponse pénale. Donc on doit travailler en grande collaboration. Et d’ailleurs, notre programme de travail, c’est précisément d’étendre notre intervention sur l’ensemble du territoire. Sur les archipels c’était un peu plus compliqué. On est en train de le déployer. Et précisément en grande proximité. D’abord avec la DSFE qui est en place un peu partout sur le territoire. Avec les tavana, et évidement sur Tahiti en travaillant avec tous les services du gouvernement. »

On parlait de l’ouverture en 2019 d’une antenne à Bora Bora. Une île où il y a beaucoup de délinquance. Ça en est où aujourd’hui ? Quelles sont les perspectives finalement ?
« Alors on va faire mieux que mettre une antenne, parce qu’une antenne, même si la délinquance juvénile a augmenté, c’est la seule île sur laquelle cette délinquance a augmenté, elle reste quand même très faible et elle ne permet pas de déployer tout un service. Or, le travail de la PJJ est un travail pluridisciplinaire : éducateur, assistante sociale, psychologue, responsable. Et si on avait dû déployer une force, s’eut été uniquement un professionnel, un éducateur qui serait resté isolé. Or tout le travail pluridisciplinaire est indispensable. Parce que l’idée c’est quoi ? C’est qu’un jeune qui commet un acte de délinquance, c’est un jeune auprès duquel il faut comprendre dans quel cadre cet acte de délinquance s’est placé. Y a-t-il une problématique familiale, une histoire traumatique, quelque chose qui relève parfois de pathologies. Et tout ça, ça se travaille en équipe pluridisciplinaire. Donc ce qu’on a fait de mieux, c’est qu’on a déployé l’exercice du travail de la PJJ deux semaines par mois sur par exemple les îles Sous-le-Vent. Ce qui n’est encore jamais arrivé jusqu’à présent. ce qui veut dire que deux semaines par moi sur les îles Sous-le-Vent, vous aurez la présence d’éducateurs qui sont renforcés par l’équipe pluridisciplinaire de Tahiti mais qui y vont et qui font bénéficier à ces jeunes de cette intervention pluridisciplinaire. »

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