Instance de pilotage inédite en Polynésie française, il est chargé de coordonner l’action publique et de définir une stratégie pluriannuelle de prévention de la délinquance.
Un premier « plan de prévention de la délinquance en Polynésie française pour la période 2016/2017 » a été adopté par le Conseil lors de sa réunion le 2 mars 2016.
Si la majorité des actions identifiées comme prioritaires à court et moyen terme ont été accomplies, les autorités indiquent que les synergies développées doivent se poursuivre afin que les nouvelles orientations en matière de prévention répondent à l’évolution des phénomènes de délinquance en Polynésie française.
En 2017, la délinquance affiche une baisse sensible. Ces résultats confirment que la Polynésie française est un territoire où la délinquance est contenue. Néanmoins, l’évolution à long terme des faits constatés, des indicateurs d’activité des forces de l’ordre ou encore la part des mineurs mis en cause, incitent les autorités à apporter une réponse forte, sur le plan répressif mais aussi en matière de prévention des comportements déviants.
La stratégie pour la période 2018/2020 tient compte des thématiques où la prévention apporte une réponse complémentaire à des phénomènes sociaux que le dispositif répressif de sécurité publique et de réponse pénale ne peut endiguer à lui seul (addictions, délinquance juvénile et violences intrafamiliales).
> Chaque jour en Polynésie française, plus de 3 femmes sont victimes d’un acte violent
On constate néanmoins que les faits de violences ont doublé en dix ans.
Parmi ces AVIP, les violences intrafamiliales représentent un volume conséquent (65% des faits en matière de blessures volontaires).
En moyenne, près de 1 500 femmes sont victimes chaque année de violences criminelles ou délictuelles en Polynésie française. En 2017, on dénombre 1 800 victimes de « coups et blessures volontaires » dont 1 169 dans la sphère familiale (65%).
Une baisse des atteintes aux biens est relevée.
La délinquance acquisitive en Polynésie française est inférieure au seuil national. En 2017, le taux annuel pour 1 000 habitants des atteintes aux biens est de 21,82 faits contre 32,96 au niveau national.
La Polynésie semble être sous le coup d’une consommation banalisée du paka.
Les infractions à la législation sur les stupéfiants augmentent de plus de 6% en un an. Si la présence de certaines drogues dites « dures » comme l’héroïne demeure marginale, laconsommation d’ « ice » (métamphétamine) s’y développe. Par ailleurs, le cannabis (« paka ») est très répandu sur le territoire.
Comme Tahiti Nui Télévision le révélait dimanche : Quatre priorités ont été validées pour les deux prochaines années, par le Conseil de prévention.
– lutter contre les addictions
– prévenir la délinquance des mineurs
– réduire les violences intrafamiliales
– lutter contre l’insécurité routière
Parmi les mesures prévues, on relève : la mise en place d’un module de sensibilisation aux conduites addictives dans chaque établissement scolaire, le lancement d’un plan de communication Etat-Pays, ambitieux et percutant, sur l’usage et les effets dévastateurs de » l’ice « , et davantage de prévention en matière d’absentéisme scolaire
Il est également question de chercher à occuper le temps libre des jeunes
En matière de sécurité routière, le conseil annonce le lancement d’une campagne de communication choc autour des comportements à risques et la responsabilité de chacun (affiches, vidéos, campagne sur les réseaux sociaux, événements dédiés…).
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Interview de René Bidal, Haut-commissaire de la République en Polynésie française
Nous avons eu un conseil long, très productif, très incitatif, parce-que nous souhaitons, outre marquer ce partenariat, mais aussi que les actions de ce plans soient les plus concrètes possibles. Ce qui nous importe c’est que la totalité des Polynésiens se sente concernée par ces sujets, et comprenne de quoi il s’agit. L’ice est un sujet qui nous préoccupe et il faut que les Polynésiens comprennent que les effets sont avant tout sanitaires. Faire passer la problématique sous le seul aspect économique et lucre, comme a pu être fait, n’est sans doute pas la meilleure manière d’inciter à arrêter la consommation de ce produit. La méthamphétamine est d’abord quelque chose qui tue. Nous avons l’obligation d’être très concrets dans les actions que nous menons. Je pourrais dire la même chose de la sécurité routière. Ce sont d’abord des comportements dangereux. Si les seules victimes étaient celles à l’origine des infractions, en quelque sorte, ça ne nous gênerait pas, parce-que dans la vie, on est responsable de ses propres choix. Mais ce qui nous gêne, sur les routes, c’est que les victimes ne sont pas évidemment les auteurs. Quand vous buvez au volant, ou que vous installez un bébé de 3 mois sur un scooter, vous faites prendre des risques à ceux qui n’ont pas la conscience ou du moins le comportement qui les a menés à être victimes des accidents. Et c’est cela qui nous gêne : la route est un espace de partage. Cet espace de partage, nous devons le respecter.
On s’aperçoit que nous avons un partenariat fort, mais constamment à renforcer. Notamment dans les établissements scolaires. On voit qu’il y a derrière tout cela, l’éducation des enfants. Il y a aussi une baisse dans la conscience du devoir parental. Ce n’est pas plus vrai ici qu’ailleurs. En valeur relative, la délinquance de nos territoires – sauf particularismes – la Polynésie française se situe bien en dessous de la moyenne nationale. Le sujet il est justement d’éviter, grâce à ce conseil, que les choses s’aggravent, et que cette culture Polynésienne qui est plutôt favorable à la solidarité, à l’éducation, à la proximité entre les parents et les enfants, ne s’abîme pas avec le temps (…) Les priorités étaient sans doute sensiblement les mêmes qu’aujourd’hui. Mais il faut être vigilant aux dérives des formes de délinquance que l’on connaît. Si on prend la sécurité routière, parce-qu’il y a une délinquance routière qu’il ne faut pas nier, quand on prend le volant et que l’on sait qu’on a 3g d’alcool dans le sang, on n’est pas un conducteur, on est un délinquant. Quand on prend les chiffres, on voit bien qu’il y a une dérive. Les priorités ne changent pas, les enjeux sont sensiblement les mêmes, mais en revanche nous devons adapter concrètement nos réactions face à ces phénomènes qui parfois, s’aggravent.
Les enjeux sont identiques, les évolutions sont différentes.
Il y a une mission interministérielle de lutte contre les addictions aux stupéfiants. Elle n’a pas vocation à intervenir dans les collectivités avec un niveau d’autonomie comme le nôtre , mais j’ai obtenu que sur un dossier que je présenterai, elle puisse apporter un financement complémentaire. Je souhaite présenter cela avec le président du Pays. Cela, pour moi, c’est très important. Que l’État participe financièrement si le Pays doit mener une campagne forte sur les méfaits sanitaires de l’ice : je suis favorable ».
« Il faut que l’on travaille également sur le décrochage scolaire et sur l’absentéisme. Surtout lorsque les parents sont contraints à l’obligation scolaire. Il y a une obligation à aller à l’école avant 16 ans. Elle est couverte par un délit pénal en cas d’infraction. C’est le délit d’abandon moral, car le devoir des parents c’est le suivi de l’éducation des enfants.
De plus en plus de communes ont arrêté un CLSPD. Les tavanas sont dans la proximité. Il y a parfois des médiateurs. Notamment dans les quartiers les plus défavorisés. Nous souhaitons que les médiateurs aillent au plus près des familles et leurs expliquent l’importance d’aller à l’école. Quand vous êtes à 12 ans, dans un abribus ou sur un trottoir, alors que vous devrirez être à l’école, la puissance publique en général a manqué quelque chose. Mais il ne faut pas tout faire porter à la puissance publique. Il faut que l’on réexplique aux parents que lorsqu’on fait des enfants, on les éduque… Je ne peux pas être dans toutes les voitures de la Polynésie pour voir si le bébé de 3 ans, est dans les bras de sa maman ou sur le scooter. On ne peut pas être partout ».
Interview d’Edouard Fritch, Président de la Polynésie française
Interview de Thomas Pison, Procureur général