Cannabis thérapeutique : l’ILM sur la piste d’une filière économique légale

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Baptisé « Porinetia Pakalolo Screening », le programme de l'ILM vient d’obtenir le feu vert du Pays pour scanner la production locale de cannabis. Il s’agit d’identifier en Polynésie les plants les plus riches en CBD et les plus pauvres en THC. Objectif : développer une filière économique viable.

Publié le 08/04/2022 à 19:12 - Mise à jour le 09/04/2022 à 14:46

Baptisé « Porinetia Pakalolo Screening », le programme de l'ILM vient d’obtenir le feu vert du Pays pour scanner la production locale de cannabis. Il s’agit d’identifier en Polynésie les plants les plus riches en CBD et les plus pauvres en THC. Objectif : développer une filière économique viable.

Il se présente sous forme de fleur, d’huile ou de produits alimentaires. A l’inverse du THC, le CBD ou cannabidiol contenu dans le cannabis n’a pas d’effet stupéfiant. On lui reconnaît en revanche des propriétés thérapeutiques. D’où un certain succès depuis 2018. L’ILM le sait et compte bien prendre le train en marche avec son programme « Porinetia Pakalolo Screening ». « On cherche à identifier dans les plants locaux la teneur en CBD et en THC pour pouvoir développer une filière économique et sociale » résume le directeur de l’ILM, Hervé Varet.

Le cannabis étant illégal, l’ILM compte sur les saisies des autorités judiciaires pour s’approvisionner. L’autorisation du pays maintenant acquise, l’institut va se rapprocher du procureur de la République pour demander la permission d’accéder aux saisies pour commencer l’échantillonnage. Le «  screening », comme son nom l’indique, consistera à examiner les prélèvements et à dresser leur profil génétique. « On va pouvoir génotyper ces plants qui viennent de la presqu’île ou des îles et savoir si ils ont la même souche » précise le directeur.  

« On doit être capable de fournir aux planteurs des plants certifiés (…) pour que la production soit relativement standardisée »

Edouard Suhas, responsable du programme « Porinetia Pakalolo Screening »

La plante en question devra comporter un minimum de 20% de CBD. « Si on se met dans une logique de production à grande échelle on a tout intérêt à ce que la plante produise un maximum de substance active, si on prend une plante à 2% de CBD on n’aura pas le même rendement » poursuit Hervé Varet. Et à défaut de trouver le parfait candidat à domicile, l’ILM n’hésitera pas à l’importer. « On sait que sur le marché international des graines sont proposées à 0% THC », reconnaît responsable du programme, Edouard Suhas. « Le souci sera de savoir quelle est la période d’adaptation de ces plantes à nos conditions. La Polynésie profite par son étendue de différents climats et de différentes natures de sol. L’échantillonnage fera peut-être ressortir un effet terroir ». 

Hervé Varet, directeur de l’ILM et Edouard Suhas, responsable du laboratoire de recherche sur les substances naturelles et médicinales de l’ILM. (Crédit photo TNTV)

Après la sélection de cannabis à forte teneur en cannabidiol, place à la 2e partie du programme : la plantation. Relancé en 2019, c’est le laboratoire de substance naturelle et médicinale de l’ILM qui devra élaborer des certifications avec un cahier des charges. « Il faut pouvoir partir de la graine au produit final avec toutes les étapes intermédiaires, ce qui implique des contrôles, donc on doit être capable de fournir aux planteurs des plants certifiés dans lequel on tiendra compte de la résistance aux parasites pour que la production soit relativement standardisée » développe le responsable du programme. Les résultats seront ensuite présentés au Pays qui prendra une orientation politique. Mais le développement de la filière pourrait être confié à la direction de l’agriculture, ou à un organisme de type « Epic paka » fait remarquer le chercheur.

« Si ce programme peut permettre la réinsertion de certain nombre de délinquants on aura tout gagné »

Hervé Varet, directeur de l’ILM

Pas de temps à perdre pour l’ILM. « On est sur des programmes courts, on veut faire aboutir ce projet dans deux ans » souligne le directeur. « Le cannabis est utilisé depuis des millénaires et il apparaît dans les premiers remèdes chinois il y a plus de 8 000 ans, mais on voit bien qu’il y a un engouement fort depuis quelques années pour cette substance ».

Le projet vise aussi à terme l’insertion sociale des « pakaculteurs » dans une filière économiquement rentable. « Si ce programme peut permettre la réinsertion de certain nombre de délinquants on aura tout gagné » confie le directeur. « On va beaucoup travailler sur des process indoor, (…) on sait qu’entre la replante de la bouture et la production florale on est à peu près sur 4 mois dans les pays tropicaux ». De quoi faire près de trois productions annuelles. « On va faire en sorte que les personnes qui s’insère dans cette filière puissent dégager de vrais revenus et qu’il puisse vivre de cette filière ». Un objectif conditionné bien sûr à une volonté politique.

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