Après sept mois en Polynésie, 20 Rapa Nui retrouvent leur île

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A Tahiti, ils étaient venus travailler, prendre de vacances, ou même… accoucher. Vingt Pascuans bloqués ont pu retrouver leur île grâce à la rotation proposée jeudi par l’A400M.

Publié le 09/10/2020 à 17:16 - Mise à jour le 12/10/2020 à 10:42

A Tahiti, ils étaient venus travailler, prendre de vacances, ou même… accoucher. Vingt Pascuans bloqués ont pu retrouver leur île grâce à la rotation proposée jeudi par l’A400M.

« A Rapa Nui, ça fait plaisir de retrouver la fraîcheur de l’île, avant les vraies retrouvailles avec la famille et les amis ! » se réjouit Kissy Ika Chavez. A 40 ans, cette Pascuane avait démissionné du SPC-PF, à Tahiti, pour se réinstaller avec sa famille sur son île natale… Mais la Covid et le confinement avaient frappé peu après sa démission, retardant de plus de sept mois tous ses projets.

Beaucoup de ces Pascuans ont souffert d’importants problèmes financiers, faute de pouvoir rejoindre leur lieu de travail. Et sans visa, la plupart n’ont pas pu travailler en Polynésie.

Ils ont pu profiter du rapatriement de sept Polynésiens bloqués à l’île de Pâques pour prendre l’A400M et retrouver leur fenua.

Un retour sous protection sanitaire, à bord de l’A400M de l’Armée de l’air – Photo : Ruhi Osorio Soto

Mais pour certains, cela a aussi été une déchirure familiale. Comme cette maman qui a passé huit mois, enceinte, et avec son premier enfant, loin de son mari : « Je suis tellement heureuse de retrouver mon compagnon, qui a eu l’autorisation de me rejoindre dans ma chambre d’hôtel pour passer la quatorzaine en famille » confie Mihinoa Terakauhau Pont. La jeune femme de 21 ans avait accouché à Papeete le 3 octobre.

Le retour a donc été une fête, mais pour la célébrer, il faudra attendre la fin de la quarantaine. Rapa Nui est Covid-free, et tous les voyageurs devront patienter jusqu’au 23 octobre au Hotu Matu’a, un hôtel de Hanga Roa. D’ici là, leur température et leur tension seront contrôlées tous les jours. Ils subiront aussi un test PCR avant de sortir de leur isolement. Des désagréments bien minimes, comparés à la joie de retrouver sa famille, et le Mana légendaire de Rapa Nui.

Benjamin Baude & Mike Leyral

Le témoignage d’Ely Manutomatoma

« Je suis Ely Manutomatoma, originaire de Rapa Nui et la plus jeune d’une petite mais très unie famille Rapa Nui. J’ai 39 ans et à 37 ans, j’ai épousé un natif de Rurutu et Tahiti… En mars de cette année, nous avons décidé de voyager à Tahiti pour donner naissance à notre petite Uho (nom Rapa Nui qui signifie « jeune fille »).

J’avais des problèmes de santé typiques de la grossesse et nous avons dû prendre la décision de quitter ma bien-aimée Rapa Nui pour bénéficier d’une meilleure prise en charge médicale ; car à Rapa Nui, l’hôpital n’a pas les ressources nécessaires pour réanimer mon bébé en cas de complications.

À ce moment-là, mon mari Ariiatua Tepa a pensé qu’il était temps de retourner sur sa terre bien-aimée… Notre intention était de nous installer à Tahiti avec notre famille mais en raison de la situation d’urgence, j’ai dû laisser mon fils aîné ici à Rapa Nui et voyager avec le reste de notre famille en pensant que lorsque notre bébé serait venu au monde, nous pourrions venir récupérer mon fils…

En raison de la pandémie, je n’ai pas pu retourner à Rapa Nui, ni seule, ni avec ma famille. J’ai eu mon bébé, Dieu merci. J’ai eu un très bon accueil à Tahiti, et j’ai bien été prise en charge. Pendant la pandémie et la fermeture des aéroports, mon angoisse en tant que mère a grandi, en ayant mon fils loin, sans pouvoir le voir. Chaque jour qui passait, je pleurais davantage. Le temps passait et il y avait de moins en moins d’espoir de revenir à Rapa Nui, jusqu’à ce que finalement une grande lueur nous soit offerte.

Je suis tellement reconnaissante envers toutes ces personnes merveilleuses qui ont été là pour moi et ma famille pendant que j’étais à Tahiti, la famille de mon mari, son père, notre grand appui dans cette période angoissante.
Aujourd’hui, le rêve de rentrer se réalise. Je vois mon fils grâce aux gouvernements français et tahitien, je leur serai éternellement redevable en tant que mère. Et je réaliserai un jour notre rêve qui a été détruit par la pandémie. Je souhaite que ma fille Uho puisse un jour aussi connaître sa deuxième culture… Uho est née de deux cultures polynésiennes et ce sera le lien entre deux îles sœurs ; il y a beaucoup à apprendre de chacune d’elles »

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