Adoption : la première étude sur le fa’a’amura’a a été publiée

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Publié le 08/03/2018 à 15:25 - Mise à jour le 08/03/2018 à 15:25

Le fa’a’amura’a (fa’a = faire et ‘amu = nourrir) est le fait de confier un enfant à de la famille ou des personnes étrangères. « Dans la culture occidentale, l’adoption s’accompagne d’une rupture complète d’avec le milieu biologique d’origine, avec changement de statut civil et juridique, alors que dans la culture Maohi, l’enfant fa’a’amu ne perd pas la trace de ses origines génétiques », note Maiana Bambridge, présidente de l’association Te Aho nui, en préambule de la première étude sur ce phénomène de société.

L’étude publiée par l’ISPF tente « de cerner les caractéristiques socio-démographiques et les origines géographiques des femmes donnant et accueillant des enfants fa’a’amu, grâce aux données du recensement qui permettent d’observer ce phénomène. »
En 2012, l’ISPF a recueilli des informations auprès de l’ensemble des femmes de la Polynésie française âgées de plus de 14 ans (nées avant le 17 août 2003) sur l’éventualité d’avoir « donné des enfants à fa’a’amu » et également sur le fait « d’avoir actuellement des enfants à fa’a’amu ». 

L’institut relève d’abord une  « véritable persistance du fa’a’amura’a dans la société polynésienne ». La proportion de celles qui ont un jour donné un enfant à fa’a’amu se maintient à un niveau qui oscille autour de 11 % pour les femmes interrogées à partir de 35 ans et ce, quel que soit leur âge.
Cette stabilité subsiste malgré l’exceptionnelle baisse de la fécondité qui est passée de 7 enfants par femmes (au sens de l’indicateur conjoncturel de fécondité) dans les années 1950 à 2 enfants par femmes en 2012. 

Par ailleurs, le fa’a’amura est bien moins fréquent auprès des résidentes des Îles Du Vent. Les femmes résidant dans les Australes et dans les Tuamotu-Gambier confient trois fois plus souvent un enfant que celles qui résident dans les Îles Du Vent (30 % vs 9 %) et les Marquisiennes et celles qui résident dans les Îles Sous-Le-Vent deux fois plus souvent (22 % vs 9 %).

Les femmes qui font adopter un enfant sont donc plus souvent celles des îles éloignées, mais aussi les personnes qui ont le moins de diplôme selon les chiffres de l’ISPF : deux tiers des femmes ayant donné un ou plusieurs enfants à fa’a’amu n’ont aucun diplôme alors qu’elles ne représentent que 39 % des femmes de plus de 45 ans en 2012. Un quart des non diplômées ont donné à fa’a’amu mais elles ne représentent que 13,8 % des femmes de plus de 45 ans.

> Qu’en est-il des femmes qui adoptent ? 

Les femmes déclarant recevoir des enfants à fa’a’amu sont elles aussi plus souvent sans diplômes (64 %) que l’ensemble des femmes du même âge (47 %).
À l’inverse si 13,2 % des femmes de plus de 55 ans ont au moins leur BTS, elles ne sont que 5 % à avoir ce diplôme parmi celles qui accueillent à fa’a’amu un enfant.

Les femmes de plus de 55 ans résidant aux Îles Du Vent reçoivent moins d’enfants à fa’a’amu que celles des autres archipels, or c’est aussi aux Îles Du Vent que l’on trouve la population la plus diplômée. Les femmes concernées sont principalement originaires de Polynésie (97 % des accueillantes), en particulier, les femmes originaires des Marquises et des Australes se distinguent avec des taux de 34,4 % et 36,4 % contre 20,9 % en moyenne.
Les taux sont également forts, surtout en regard de la faible taille de ces communautés, pour les femmes originaires d’Océanie (18 %), de Wallis-et-Futuna et de la Nouvelle-Calédonie (11,7 %), des autres COM et DOM (9,6 %) et enfin d’Amérique (9,1 %).

Le maintien d’un taux élevé de femmes donnant leur enfant à fa’a’amu peut s’expliquer par le maintien de pratiques traditionnelles dans les populations résidentes à distance de la capitale. Ainsi, ce sont dans les archipels les moins accessibles (Australes, Tuamotu-Gambier) que le phénomène est le plus persistant.

Par ailleurs, la situation économique des femmes actives s’est dégradée dans ces territoires, augmentant de fait la pression économique sur les familles de grande taille. Souvent associé à des considérations affectives, il est probable que confier et donner un enfant s’accompagne également de considérations économiques. 

Retrouvez l’étude complète en cliquant ICI

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