« C’est notre survie, nous on ne vit que de la pêche » s’inquiète Auguste Patu. Le pêcheur à la pointe Vénus se dit préoccupé par le premier plan d’implantation de la future salle de mariage de Mahina. Pour cause, cette dernière présente un ponton de 35 mètres, qui coupe en deux l’espace où sont rangées les pirogues motorisées. Impossible pour Auguste Patu : « On ne peut aller dans le lagon qu’en longeant la plage par la gauche pour éviter le corail ». Le ponton rendrait une partie du « petit bain » inaccessible à la quinzaine de pêcheurs pour qui, la pointe vénus est avant tout un espace de travail. « Dans ces eaux, c’est une nurserie naturelle. Nous, on pêche les petits poissons pour qu’ils servent d’appât dans le lagon » enchérit-il. Depuis la publication du premier croquis de la salle flottante, les pêcheurs, formés en association depuis 1997, font entendre leur désapprobation.
Un panneau « Non au projet de salle de la pointe Vénus » a déjà été fixé à un arbre et les pêcheurs sur place assurent qu’ils sont prêts à manifester si la mairie refuse de les écouter. Car pour eux, le lagon représente leur principale source de revenus. Mais le projet semble également être l’occasion de voir ressurgir un sentiment plus profond de dépossession de leur environnement. « Je pêche avec mes fils. On pêche en famille, ça vient de mes parents (…) ce n’était pas comme ça avant » raconte Auguste Patu, désignant le grand parking, récemment agrandi pour accueillir les nombreux visiteurs quotidiens. Ce site historique s’est en effet progressivement transformé en un important espace de plaisance. Dès les premières études de terrain, en 2021, la municipalité affirme avoir reçu des pêcheurs inquiets, qui pensaient que l’objectif était d’agrandir de nouveau ce parking.
« Il y aura une consultation des pêcheurs »
Anthony Pheu, directeur général des services de Mahina
Pourtant, du côté de la municipalité de Mahina, la création de cette salle flottante apparaît comme une nécessité. La ville ne dispose que d’une salle polyvalente de fortune pour accueillir ses soixante mariages annuel. La salle flottante vise donc autant à désengorger les bâtiments de la mairie qu’à offrir aux mariés un décor de carte postale. « On a fortement mis l’accent sur la culture, l’intégration paysagère du projet et le respect de l’environnement » assure Anthony Pheu, directeur général des services de Mahina. Il rappelle que le projet estimé à 38 millions de Fcfp a été voté à l’unanimité par le Conseil municipal de la commune, mais insiste aussi sur le fait que la mairie ne compte pas valider l’implantation de la salle flottante sans consulter les pêcheurs : « On rassure tout le monde, il y aura une large consultation, les pêcheurs notamment (…) Les conditions pour réaliser le projet sont multiples (…) si l’on n’a pas l’adhésion de l’ensemble de la population et notamment de ceux qui ont une activité sur place, on devra revoir le projet ». Et malgré les assurances promises par la municipalité, Auguste Patu ne se dit pour autant pas rassuré : « S’ils font le projet, qu’est-ce qu’on va faire ? On va nous mettre dehors ?”.