USA : la communauté de Tahiti mobilisée pour les élections présidentielles

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Le monde entier a les yeux rivés sur le duel qui oppose le président sortant des États-Unis : Donald Trump, à son rival, le démocrate, Joe Biden. Les ressortissants américains basés à Tahiti ne sont pas en reste et sont mobilisés. Cette année, le public d’électeurs comporte moins de touristes et plus de résidents.

Publié le 27/10/2020 à 17:36 - Mise à jour le 30/10/2020 à 9:35

Le monde entier a les yeux rivés sur le duel qui oppose le président sortant des États-Unis : Donald Trump, à son rival, le démocrate, Joe Biden. Les ressortissants américains basés à Tahiti ne sont pas en reste et sont mobilisés. Cette année, le public d’électeurs comporte moins de touristes et plus de résidents.

Les Américains vivant en Polynésie sont des plus impliqués pour cette élection présidentielle aux États-Unis : « Par rapport aux autres années, je trouve qu’il y a un engouement », remarque le consul des États-Unis, Christopher Kozely. « Moi-même j’ai voté par anticipation, la semaine dernière. Je l’ai envoyé au comté de Los Angeles. (…) Il y a ce réflexe de voter en avance, juste parce qu’on a peur que le vote ne soit pas compté. Je pense que 95% des personnes qui ont l’intention de voter l’auront fait avant le 3 novembre ».

« La communauté à Tahiti est assez restreinte. Mais c’est vrai que beaucoup d’Américains sont très mobilisés, et aimeraient voir leurs idées passer à travers cet électorat » ajoute le consul.

Les résidents américains au fenua, des « réfugiés climatiques »

Et bien qu’on pouvait s’attendre à un exode des Polynésiens vers le continent américain, c’est en fait l’inverse qui se produit : de plus en plus d’Américains fuient leur pays pour venir s’installer ici, être plus proche de la nature et d’un mode de vie plus collectif qu’individuel.

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« Ce que j’ai remarqué, et qui est très nouveau, c’est le contact de beaucoup d’expatriés. Beaucoup d’Américains ont décidé de faire du télétravail à Tahiti. Il y a trois facteurs : la Covid qui est très fort là-bas, les émeutes et les grands incendies. Les gens se réfugient ici. On peut parler de ‘réfugiés climatiques ‘. On a un vol direct, et il n’y a que trois heures de décalage horaire : c’est un vrai plus » précise Christopher Kozely.

Trump président, quel bilan ?

Si la tendance en Polynésie est plutôt « pro-Trump », les points de vue sont tout de même partagés. Sans pour autant être des « pro-Biden », certains Américains du fenua que nous avons rencontré ont un avis bien tranché sur le président actuel, du parti républicain. Teva Cardines, 43 ans, est citoyen américain et il préfère voter dans le Pays dans lequel il vit, c’est-à-dire ici. Pour lui, le débat, c’est à l’image de ce que Donald Trump a toujours fait : du cinéma. 

« Je continue à m’informer, des échanges, des jouxtes, qu’il peut y avoir entre les démocrates et les républicains, les présidentiables et les vice-présidentiables. On suit cela de près. Ce qu’il y a de magnifique avec la démocratie, c’est que l’on a les dirigeants que l’on mérite. Alors, si les Américains ont choisi Trump, c’est qu’ils pensaient qu’il valait quelque chose explique-t-il. Personnellement, je ne sais pas ce qu’il a pu apporter, si ce n’est une montée du nationalisme, de l’extrémisme, de l’antisémitisme, la haine raciale, la fermeture des frontières. Ce ne sont pas des valeurs que je prône. Donc oui, on attend beaucoup de ces élections. Je ne pense pas voter, bien que ce soit possible. Je ne pense pas qu’on puisse rendre ‘America Great Again’ en sortant de l’échiquier politique mondial. Les décisions qui ont été prises par Trump sont pour moi une absurdité : la sortie de l’OMS, du G20… pour moi, c’est une erreur parce que les États-Unis ont un rôle important à jouer. »

Lire aussi > Élections américaines : comment voter depuis la Polynésie

Johann Bouit, est un ressortissant franco-américain né à Hawaii et qui vit depuis plus de dix ans à Tahiti. Il est l’un des descendant des mutinés de la Bounty et de grandes familles américaines installées ici. Il aime se souvenir de la « belle époque » de l’Amérique au fenua, lors de l’après-guerre. Les habitants du Pays de l’oncle Sam étaient admirés. L’Amérique, c’était la mode, l’avenir, l’eldorado. Mais ça, c’était avant…


Aujourd’hui, il considère que l’Amérique a perdu de sa superbe, et surtout, une partie de ses valeurs qui lui valaient l’admiration du monde entier. « L’influence américaine sur la région, elle est importante. Je suis né à Hawaii, j’ai vécu 20 ans aux USA. Ce sont mes origines. Aujourd’hui, je me sens un peu en décalage. Je suis dans la terre de mes ancêtres, en Polynésie. Après la guerre, on peut dire que les États-Unis avaient la cote dans le monde entier. Beaucoup d’Américains sont venus ici à la recherche du paradis. Tous les Américains qui vivent ici sont à la recherche d’une qualité de vie qui est différente de celle qu’on peut retrouver aujourd’hui aux États-Unis. Je suis là depuis 2003. Je m’y plais beaucoup. Je garde quelques valeurs américaines comme le travail, la compétition pour l’amélioration, le développement de soi… Mais aujourd’hui, l’Amérique a changé. Nous sommes dans la surconsommation. Je me sens moins Américain, en tout cas, moins fier de l’être. J’ai grandi dans un environnement multi-culturel : américain, tahitien, chinois, français… mais mes souches sont polynésiennes ».

Aujourd’hui, on est moins fier qu’avant d’être Américain, surtout avec un président qui ne reflète pas vraiment les valeurs dont je me sens proche. Barack Obama est un Hawaiien comme moi, et j’étais fier d’être Américain sous Barack Obama. Je l’ai beaucoup admiré. Quand Donald Trump est arrivé, ça a été un choc.

Johann Bouit, ressortissant franco-américain

Très impliqué dans le milieu culturel, Johann Bouit est également proche de la nature, et entre l’économie ou l’écologie, son choix est vite fait : « Le leadership américain, c’est la gloire de l’économie, au prix de l’exploitation massive de nos ressources. Nos terres en souffrent.(…) Alors on a envie que ça change, et pour cela, on doit changer de président. La politique américaine d’aujourd’hui nuit à l’environnement et j’aimerais bien que ça change. Si on veut enseigner à nos enfants de prendre soin de la nature, on ne peut pas rester dans ce système. L’Amérique de Trump a bouleversé nos valeurs » déplore-t-il.

Tout comme Teva Cardines, Johann Bouit ne votera par pour ces élections américaines, bien qu’il la suivra et continue d’être mobilisé : « Je ne me suis pas inscrit pour voter. J’avais perdu de l’intérêt pour tout cela après l’élection de Trump. Je trouve que le collège électoral n’est pas adapté. Je suis tout cela de près en tous cas et j’attends un vrai changement ».

L’impact de la crise actuelle sur la venue des touristes américains

Direction Moorea avec Heimata Hall et Bruno Jamais, qui ont tous deux la nationalité américaine. L’un est prestataire touristique et l’autre est gérant de restauration. Pour eux, accomplir leurs devoir de citoyen à distance est bien plus qu’un choix, c’est une nécessité primordiale.

Heimata Hall est un enfant du fenua, par son père il a également la nationalité américaine. En 15 ans de métier dans le tourisme, jamais il n’avait été confronté à une baisse aussi importante de touristes américains, sa principale clientèle. N’ayant jamais voté depuis ses 21 ans, Heimata pense franchir le pas mardi, une manière pour lui d’apporter sa pierre à l’édifice. 

Même constat pour Bruno Jamais qui a vécu 45 années dans la restauration. Les touristes américains sont l’avenir du tourisme en Polynésie tant sur le plan quantitatif et qualitatif. Selon lui, voter même à distance, c’est lui permettre de choisir la personne idéale pour la suite des événements, pour le business. 

Pour rappel, les élections aux États-Unis auront lieu le mardi 3 novembre. Il s’agit de la 59ème élection présidentielle américaine. Donald Trump (77 ans), le président en fonction, candidat républicain à un second mandat, est opposé au démocrate Joe Biden (74 ans), vice-président de 2009 à 2017. Le 14 décembre, les grands électeurs qui composent le collège électoral, éliront officiellement le président et son second.

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