« Les archives classifiées sont communicables de plein droit », rappelle le Conseil d’Etat

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Le Conseil d'Etat a annulé vendredi la possibilité pour l'exécutif de ne pas rendre publics des documents classés secret-défense au terme de l'expiration du délai légal. Un arrêté qui devrait ainsi permettre aux historiens d'avoir librement accès aux documents de plus de 50 ans relatifs aux essais nucléaires en Polynésie, sans avoir à passer par une déclassification préalable.

Publié le 05/07/2021 à 10:05 - Mise à jour le 05/07/2021 à 10:06

Le Conseil d'Etat a annulé vendredi la possibilité pour l'exécutif de ne pas rendre publics des documents classés secret-défense au terme de l'expiration du délai légal. Un arrêté qui devrait ainsi permettre aux historiens d'avoir librement accès aux documents de plus de 50 ans relatifs aux essais nucléaires en Polynésie, sans avoir à passer par une déclassification préalable.

La plus haute juridiction administrative française a estimé que les archives protégées par un délai de 50 ou 100 ans ne pouvaient être soumises à une quelconque restriction au delà de cette période.

« Le Conseil d’État rappelle que les archives classifiées sont communicables de plein droit, conformément à la loi actuelle, à l’expiration de ces délais. En conséquence, le Premier ministre ne peut conditionner l’accès à ces archives à une procédure de déclassification préalable », estime-t-il, selon un communiqué publié sur son site.

Une loi de 2008 prévoit que les archives de plus de 50 ans soient librement accessibles. Mais l’application d’arrêtés datant de 2011 et 2020 imposait de déclassifier, un par un, tous les documents tamponnés comme « secrets », entravant de fait leur consultation.

Les plaignants – des historiens, archivistes et associations – contestaient ces textes, estimant notamment que cette disposition laissait « une marge d’appréciation discrétionnaire illégale à l’administration » et ne précisait pas « les motifs pour lesquels un refus de déclassification peut être opposé ». La décision du Conseil d’Etat leur donne donc raison.

Mais la décision intervient surtout en pleine polémique politique, puisque le dossier fait partie du projet de loi renforçant les mesures antiterroristes et le renseignement, actuellement discuté dans les deux assemblées, ses promoteurs essayant de préserver certains domaines de la déclassification. 

Pour des sénateurs PS, il y a « un énorme retour en arrière » et « un passage en force » après le vote dans la nuit, dans le cadre du projet de loi, de l’article réformant l’accès aux archives.

« Je suis très en colère de voir qu’on puisse revenir de façon aussi brutale, et au détour d’un cavalier législatif, sur la loi de 2008, c’est extrêmement grave par rapport à l’écriture de l’Histoire contemporaine et politique de demain », avait déclaré la porte-parole Sylvie Robert lors du point de presse du groupe.

« Le président a souhaité faire un travail sur la mémoire (…) et derrière ça, on ferme les archives », avait pour sa part dénoncé son collègue Rachid Temal.

Les sénateurs PS ont d’ores et déjà indiqué leur volonté de saisir le Conseil constitutionnel sur le sujet. 

Cet article 19 vise à préserver certains domaines de la déclassification. Par exemple, seraient ainsi protégés des documents « relatifs aux caractéristiques techniques des installations militaires, des installations et ouvrages nucléaires civils, des barrages hydrauliques de grande dimension, des locaux des missions diplomatiques et consulaires françaises et des installations utilisées pour la détention des personnes », selon le texte.

A titre d’exemple, la centrale nucléaire du Bugey, dans l’Ain, a été mise en service en 1972, il y a 49 ans. Certains documents relatifs à sa construction ont donc plus de 50 ans.

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