Centres de plongée en difficulté : « dans les îles, c’est la catastrophe » témoigne Thibault Gachon

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En réponse à l'annonce du maintien de la fermeture des frontières jusqu'au mois de mai, les centres de plongée, secteur phare de l'industrie touristique, poussent un cri d'alerte en vue des difficultés financières auxquelles ils doivent et devront bientôt faire face.

Publié le 15/03/2021 à 11:16 - Mise à jour le 15/03/2021 à 16:49

En réponse à l'annonce du maintien de la fermeture des frontières jusqu'au mois de mai, les centres de plongée, secteur phare de l'industrie touristique, poussent un cri d'alerte en vue des difficultés financières auxquelles ils doivent et devront bientôt faire face.

Pour le Président du syndicat polynésien des centres de plongée (SPCP), Thibault Gachon, la prolongation de la fermeture des frontières ne fait pas sens. Il s’interroge sur le rôle de l’Etat, car selon lui, « les raisons de la fermeture ne sont pas fondées. On nous dit que c’est pour notre sécurité sanitaire, mais la Polynésie a fait preuve de sa capacité à gérer les flux touristiques. En juillet 2020, quand on a réouvert les frontières, il y a eu très peu de cas importés par les touristes […] qui ont tous été identifiés, isolés, et gérés. La transmission de covid par les touristes est quasi-nulle ». « On voudrait qu’on laisse la Polynésie travailler. On sait tracer les touristes. […] Apparemment, aujourd’hui, c’est Paris qui nous a imposé ces fermetures. Des gens qui sont à des milliers de kilomètres d’ici, qui ne connaissent pas les réalités du terrain ».

Malgré la crise, la situation économique pour les centres basés sur Tahiti est restée gérable jusqu’ici. « Les clubs de Tahiti aujourd’hui ont la chance d’avoir un peu plus d’activité grâce aux résidents, mais encore, ils travaillent le week-end beaucoup » démontre Thibault Gachon.

Des propos soutenus par Yannis Saint-Pe, moniteur de plongée et gérant du club Fluid : « on s’en est bien sorti en décembre, janvier, février parce que les résidents étaient bloqués en Polynésie française et donc, de fait, ils ne voyageaient plus à l’extérieur. Ils avaient économiser pour partir en vacances donc ils se sont repliés sur les activités possibles en Polynésie française et en l’occurrence, sur la plongée à Tahiti […]. Mais cette clientèle s’essouffle aussi parce que ça fait maintenant trois mois qu’on l’a ».

Un constat économique qui est cependant moins positif en dehors de Tahiti et Moorea, selon Thibault Gauchon : « dans les îles, c’est la catastrophe. On illustre des niveaux d’activités comme si on était confiné complètement. On n’a plus de touristes, on n’a plus personnes. Hormis les vacances scolaires qui nous font travailler un petit peu mais c’est très très calme. Je ne parle pas de Bora Bora, où les centres ont quasiment tous fermés ».

Une économie chamboulée sur le long terme face à une éventuelle saison haute dépourvue de touristes

Ce que le président de la SPCP dénonce tout particulièrement, c’est le manque de visibilité et une date de réouverture des frontières qui malgré tout reste incertaine. « Aujourd’hui, on ne sait pas. Quand on nous avait informé de la fermeture des frontières, on nous avait parlé de fin mars, peut-être avril. Aujourd’hui, c’est avril et peut-être mai. On nous dit qu’on peut ouvrir en mai, début, milieu, fin mai, pourquoi pas juin. On ne sait pas du tout où on va, et on se rapproche de la haute saison. On est en train d’hypothéquer la saison […] parce qu’on n’est pas capable de se projeter ».

En effet, comme le démontre Yannis Saint-Pe, l’enjeu aujourd’hui est de savoir si investir en prévision de la haute saison sera rentable ou non. « Notre principal soucis […] c’est qu’on a une saison à préparer et que pour préparer cette saison, on doit prendre des décisions maintenant, de recrutement de personnel, d’investissements. Ces investissements, je suis en train de les faire mais je ne sais pas si réellement je vais pouvoir assurer cette haute saison […] et est-ce que j’aurais pas dépenser mes économies pour préparer cette haute saison. Si je ne l’ai pas, ce serait catastrophique pour moi ».

Pour certaines destinations très prisées des plongeurs comme Fakarava, Thibault Gachon pointe du doigt l’effet « domino » des restrictions d’entrées des touristes en Polynésie. « Le tourisme en général fait travailler de façon résiliaire beaucoup de gens derrière. Dans la plongée, il y a les clubs, les marins, les moniteurs, les snacks autour. Comme Fakarava, où 80% des gens viennent pour la plongé, derrière c’est les pensions de familles, les restaurants, les snacks. C’est tout une économie qu’on est en train de mettre à genou, et sur du long terme. »

Car si le Pays ne décide pas d’une réouverture d’ici fin avril, pour Thibault Gachon, il sera trop tard pour rattraper la haute saison. « Les moniteurs de plongée quittent la Polynésie parce qu’ils n’ont plus de travail. En France, ça recrute. Donc on a pas mal de moniteurs de plongée patentés qui rentrent en France. Quand il faudra les faire revenir au mois de juillet, ça sera trop tard ». « D’autres destinations concurrentes sont ouvertes, les Maldives, les Seychelles. Donc aujourd’hui, quand les touristes prennent le choix de leurs vacances juillet-août, ils rayent la Polynésie ».

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