Sous-marins français : l’Australie dédommage Naval Group pour rupture de contrat

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L'Australie a dévoilé samedi un accord de compensation massive avec le fabricant français de sous-marins Naval Group, pour mettre fin à un conflit financier et diplomatique, la France espérant désormais l'ouverture d'une nouvelle page dans les relations entre Paris et Canberra.

Publié le 11/06/2022 à 14:51 - Mise à jour le 13/06/2022 à 10:56

L'Australie a dévoilé samedi un accord de compensation massive avec le fabricant français de sous-marins Naval Group, pour mettre fin à un conflit financier et diplomatique, la France espérant désormais l'ouverture d'une nouvelle page dans les relations entre Paris et Canberra.

Le nouveau Premier ministre australien Anthony Albanese a déclaré que l’entreprise française avait accepté un « règlement juste et équitable » de 555 millions d’euros, pour la rupture du gigantesque contrat de 56 milliards d’euros, qui avait occasionné une crise diplomatique entre Paris et Canberra à l’automne dernier.

La France, par la voix du ministre des Armées, « prend acte » de cet accord. « Cet accord est important parce qu’il va nous permettre d’ouvrir une nouvelle page dans notre relation bilatérale avec l’Australie et de regarder vers l’avant », a indiqué Sébastien Lecornu à des journalistes à Singapour, où se tient le forum sur la défense et la sécurité en Asie-Pacifique Shangri-La Dialogue.

Le ministre devait rencontrer samedi son homologue australien Richard Marles, issu du gouverment travailliste australien nouvellement élu, en marge du forum.

Un peu plus tôt, Naval Group avait salué un accord « équitable », reprenant le terme du chef du gouvernement australien. Le groupe, détenu en majorité par l’État, précise avoir « accompagné » ses partenaires et sous-traitants français et australiens dans leurs démarches.

Pour le syndicat CFDT, première organisation syndicale chez Naval Group, « c’est plutôt une bonne nouvelle que ça se termine assez vite, plutôt que de partir dans des contentieux qui pourraient durer des années », selon David Robin, délégué syndical central à Cherbourg (Manche). Depuis la rupture du contrat, « on a bien rebondi » et « on ne désespère pas non plus d’avoir un autre contrat export comme on l’a eu pour le Brésil, l’Inde, la Malaisie », a-t-il dit à l’AFP.

En septembre 2021, le Premier ministre australien d’alors Scott Morrison avait mis fin soudainement au contrat français en préparation depuis une dizaine d’années.

Le chef du gouvernement annonçait que son pays achèterait des sous-marins à propulsion nucléaire américains ou britanniques, un changement majeur pour un pays aux faibles capacités nucléaires.

M. Morrison s’était alors attiré les foudres du président français Emmanuel Macron. Les relations entre les deux pays sont restées glaciales jusqu’à l’élection en mai de M. Albanese, de centre gauche.

Celui-ci s’est empressé de rétablir les relations tendues avec la France, la Nouvelle-Zélande et les nations insulaires du Pacifique qui reprochaient au gouvernement conservateur précédent sa lenteur en matière de changement climatique.

M. Albanese a déclaré qu’il se rendrait bientôt en France pour « réinitialiser » la relation.

S’exprimant en marge du forum Shangri-La Dialogue, M. Lecornu a déclaré que la France appréciait son « amitié » avec l’Australie. « Ce n’est pas parce qu’un gouvernement dans l’histoire a manqué à sa parole que nous devons oublier notre relation stratégique », a souligné M. Lecornu.

Pièce maîtresse

Au total, l’échec du contrat des sous-marins français aura coûté 2,4 milliards de dollars aux contribuables australiens, a précisé leur Premier ministre.

Le contrat de sous-marins constitue la pièce maîtresse de la stratégie australienne de défense face à une Chine à l’influence grandissante dans la région sous la présidence de Xi Jinping.

Les sous-marins à propulsion nucléaire pourraient permettre à l’Australie d’opérer de façon plus furtive et plus dissuasive vis-à-vis de la Chine.

Mais une grande incertitude règne sur l’échéance à laquelle l’Australie pourra effectivement posséder ces appareils. Le premier sous-marin américain ou britannique ne sera vraisemblablement pas en service avant des décennies.

L’ancien ministre de la Défense et actuel leader de l’opposition, Peter Dutton, a déclaré cette semaine qu’il avait décidé de s’approvisionner auprès des États-Unis, une révélation inhabituelle compte tenu de la sensibilité des négociations en cours. 

Le gouvernement actuel a insisté sur le fait qu’aucune décision n’avait encore été prise. 

« Pas une alliance »

Dans le même temps, M. Albanese a pris des mesures pour la reprise du dialogue au niveau ministériel avec la Chine. 

Le ministre australien de la Défense Richard Marles a déclaré samedi à Singapour que l’Australie souhaitait entretenir des relations « respectueuses » avec tous les pays de la région, ajoutant : « cela inclut la Chine ». 

« L’Australie attache de l’importance à une relation productive avec la Chine. La Chine ne va pas partir, et nous avons tous besoin de vivre ensemble et, espérons-le, de prospérer ensemble », a-t-il déclaré.

Interrogé par un responsable militaire chinois pour savoir si l’accord dit AUKUS avec les États-Unis et la Grande-Bretagne pour la fourniture de technologie de sous-marins était une nouvelle alliance de défense, M. Marles a affirmé que l' »AUKUS n’est pas une mini-OTAN ». « Ce n’est pas une alliance », a-t-il ajouté.

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