Nouvelle-Calédonie : le Parlement fait un pas de plus vers le référendum

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Publié le 19/03/2018 à 8:56 - Mise à jour le 19/03/2018 à 8:56

Après le Sénat, l’Assemblée a adopté, par 537 voix contre 2, le projet de loi organique sur « l’organisation de la consultation sur l’accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie ». « Une étape importante est franchie, d’autres nous attendent », s’est réjouie dans l’hémicycle la ministre des Outre-mer Annick Girardin.

S’il est technique, le texte traduit un accord politique entre non-indépendantistes et indépendantistes arraché de haute lutte le 2 novembre à Matignon lors d’un comité des signataires de l’accord de décolonisation de Nouméa (1998).
Il permet notamment l’inscription d’office, sur la liste électorale générale (158 000 personnes) des natifs du territoire encore non inscrits (environ 10 900 personnes dont 7 000 Kanak), condition préalable pour qu’ils puissent ensuite accéder à la liste spéciale pour le référendum. L’objectif est d’avoir ainsi la liste électorale la plus large possible afin de garantir le caractère incontestable des résultats.

Après la fixation de la date lundi par le Congrès de Nouvelle-Calédonie, le dernier point à résoudre est le libellé de la question du référendum qui sera abordé lors du prochain comité des signataires le 27 mars.
Cette rédaction risque d’être discutée alors même que « le champ des possibles est très limité », a relativisé Édouard Philippe lors du débat parlementaire la semaine dernière, puisqu’il s’agira in fine de demander aux électeurs de dire « oui » ou « non » à l’indépendance – même si elle est appelée « pleine souveraineté » – de cet archipel du Pacifique, colonisé en 1853.
Mais « trancher, c’est parfois prendre le risque de diviser. Et diviser, en Nouvelle-Calédonie encore plus qu’ailleurs, est dangereux », avait prévenu le Premier ministre, même trente ans après le drame d’Ouvéa.

Alors que le climat politique et sécuritaire s’est récemment tendu sur l’archipel, le gouvernement, au nom de « la neutralité de l’État », n’a pas prévu de prendre parti pendant la campagne électorale, comme le lui ont encore demandé mardi Les Républicains et les socialistes. 
« Je n’imagine pas que l’exécutif n’ait pas d’avis sur la place de la Nouvelle-Calédonie rattachée à la France. Ce qui se joue, c’est la place de la France et de l’Europe sur le Pacifique », a déploré le patron des députés LR Christian Jacob.
Emmanuel Macron, qui se rendra sur place début mai, « doit éclairer les habitants de Nouvelle-Calédonie de sa vision », a jugé le socialiste David Habib.

Mais cette prudence de l’exécutif a été au contraire approuvée par les communistes, Insoumis, la majorité En Marche-MoDem et surtout les deux députés calédoniens Philippe Gomès et Philippe Dunoyer, UDI et membres de Calédonie ensemble (principale formation non-indépendantiste, droite modérée).
Une prise de position « serait utilisée par ceux qui n’ont pas envie que cela se passe bien », souligne M. Dunoyer. Les déclarations de Manuel Valls (apparenté LREM), président de la mission d’information à l’Assemblée sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, qui avait exprimé sur place fin février son « attachement » au maintien de l’archipel en France, ont provoqué le mécontentement des indépendantistes.

L’issue du référendum ne semble cependant faire guère de doutes, le « non » à l’indépendance devant l’emporter assez nettement selon les résultats des derniers scrutins locaux et les équilibres démographiques.
« On connaît le résultat du référendum, l’enjeu n’est pas qui va gagner mais il faut travailler sur le jour d’après », juge M. Dunoyer.
D’autant que si le « non » l’emporte, les accords de Nouméa ont prévu un autre référendum d’autodétermination dans deux ans, puis un troisième le cas échéant d’ici 2022… 
« Ce serait mortifère, les perdants seraient humiliés en étant défaits trois fois de suite », considère M. Dunoyer, qui pense qu’il faudra revoir cette disposition.

Une éventuelle indépendance de la France au contraire serait une première depuis celle de Djibouti (1977) et du Vanuatu (1980), ex-Condominium franco-britannique des Nouvelles-Hébrides, voisin de la Nouvelle-Calédonie.

AFP

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