C’est armé de ce rapport que le Premier ministre Edouard Philippe doit se prononcer sur la poursuite du processus électoral dans environ 5 000 villes où le 1er tour le 15 mars n’avait pas été décisif.
Mais les conclusions rendues par le panel d’experts sont extrêmement prudentes et laissent une large part de responsabilité à l’exécutif. Le Conseil « ne s’est engagé en aucune façon sur la date », a martelé mardi son président Jean-François Delfraissy, en observant dans l’avis que si « la situation sanitaire s’est nettement améliorée par rapport au début du confinement », il est « difficile d’anticiper une situation incertaine pour les semaines à venir ».
Au point que le Conseil estime nécessaire de procéder à une nouvelle évaluation des conditions sanitaires 15 jours avant la date retenue, si les élections avaient lieu en juin, probablement le 28. En cas de perspectives négatives, serait alors justifiée « une nouvelle interruption du processus électoral », souligne-t-il.
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Parmi les arguments paraissant plaider pour une tenue du second tour le mois prochain, le fait qu’elle permette de clore le chapitre. Car un report au-delà obligerait les autorités à reprogrammer l’intégralité du scrutin (1er et 2nd tour) dans les villes concernées.
Or, « d’un point de vue sanitaire, la tenue d’un seul tour de scrutin plutôt que deux, indépendamment des dates retenues, est de nature à réduire les risques sanitaires, au sens statistique du terme », note le Conseil.
Macron consulte les maires
Les membres du Conseil mettent toutefois en garde contre les « risques sanitaires importants » liés à la campagne électorale, qui devra être « profondément modifiée ». Dans leur viseur, les « meetings électoraux » ainsi que les « actions des candidats ayant pour effet des rencontres ou des rassemblements physiques (distribution de tracts, porte à porte, réunions publiques, réunions d’appartement) ».
Le gouvernement a dit qu’il ne trancherait pas tout de suite, souhaitant s’assurer d’un consensus politique large sur la date afin d’éviter les critiques qui ont accompagné la tenue du premier tour en mars.
Le Premier ministre consultera les responsables des partis politiques mercredi à 19H00 à Matignon. Plusieurs n’ont pas attendu pour réagir à l’avis du Conseil.
Edouard Philippe envisage aussi de solliciter un débat et un vote au Parlement sur l’organisation de l’élection fin juin. Mais il rencontre l’opposition sur ce point du président (LR) du Sénat Gérard Larcher.
« On refusera de voter les yeux bandés » s’il y avait une consultation « loin du deuxième tour », sans connaître la situation sanitaire, a averti mardi Damien Abad, patron des députés LR. Un vote serait fait « pour ouvrir le parapluie et verrouiller les oppositions », juge-t-il.
Marine Le Pen considère que l’avis donné est « un éclairage à la lumière d’une allumette ». La présidente du Rassemblement national, partisane d’un report, s’étonne que le Conseil scientifique ne suggère « aucune préconisation sanitaire », faisant fi des nombreuses recommandations sur le sujet dans le rapport.
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En attendant, le sujet doit s’inviter dès mardi à l’Elysée, où Emmanuel Macron reçoit par visio-conférence une vingtaine de maires, dont Anne Hidalgo (Paris), Jean-Claude Gaudin (Marseille), Gérard Collomb (Lyon) ou encore François Baroin (Troyes) par ailleurs président de l’Association des maires de France.
Officiellement, il s’agit d’abord de faire un point sur le déconfinement, huit jours après son entrée en vigueur, mais nul doute que les questions politiques resurgiront. D’autant plus que ces édiles penchent très majoritairement pour l’organisation d’un second tour en juin.
Quoi qu’il arrive, le consensus sera difficile à obtenir tant les avis divergent au sein de tous les camps.
Mardi, le président (LREM) de l’Assemblée nationale Richard Ferrand a estimé qu’il n’était pas « raisonnable » d’envisager un vote dès la fin juin, alors que son homologue au Sénat à Gérard Larcher (LR), a jugé « sage » que le gouvernement demande éventuellement un deuxième avis aux scientifiques.
Vague d’indignation
Sur le plan sanitaire, la décrue se poursuit et pour la première fois depuis le 22 mars, le nombre de malades du Covid-19 en réanimation – indicateur essentiel de la pression sur le système hospitalier – est repassé sous la barre des 2 000 lundi, alors que le bilan total se monte désormais à au moins 28 239 décès.
Le contexte reste difficile à Mayotte, territoire d’Outre-mer classé en rouge et toujours confiné en raison d’une circulation active du coronavirus.
De son côté, le ministère des Affaires étrangères a indiqué que les voyageurs français et résidents permanents en France arrivant de l’étranger hors UE seront invités à se soumettre à une quarantaine de 14 jours sur une base « volontaire » à compter de mercredi.
Alors qu’autorités et experts ont les yeux rivés sur les signes qui pourraient alerter d’une possible « deuxième vague », le ministre de la Santé Olivier Véran a annoncé que les personnels soignants pourront bénéficier « à compter de la semaine prochaine » de tests sérologiques sur prescription médicale, afin de savoir s’ils ont contracté ou non le coronavirus
Emmanuel Macron s’est aussi entretenu mardi avec les dirigeants de Sanofi, dont le directeur général Paul Hudson pour discuter du vaccin contre le coronavirus.
Le géant pharmaceutique avait déclenché une vague d’indignation en déclarant qu’il distribuerait un éventuel vaccin contre le nouveau coronavirus d’abord aux Etats-Unis, qui ont investi 30 millions de dollars pour soutenir ses recherches.