La reconquête de la deuxième ville d’Irak, dont l’EI avait fait son principal bastion dans le pays, est la plus importante victoire de Bagdad face à l’EI depuis que le groupe extrémiste sunnite s’était emparé en 2014 de vastes portions du territoire.
Mais elle ne marque pas pour autant la fin de la guerre contre l’organisation ultraradicale, responsable d’atrocités dans les zones sous son contrôle et d’attentats meurtriers dans le monde.
Le compte Twitter de M. Abadi l’a montré dans la deuxième ville du pays, vêtu d’un uniforme militaire.
Lors d’une réunion au quartier général de la police fédérale, dans l’ouest de Mossoul, le Premier ministre a ordonné « d’éliminer les derniers (jihadistes) défaits (…), d’établir la sécurité et la stabilité dans la ville libérée, et de la débarrasser des mines et explosifs ».
Signe que les combats ne semblent pas totalement terminés, des coups de feu et des frappes aériennes étaient encore audibles dans l’après-midi.
« Cette victoire, c’est pour tous les Irakiens, pas seulement pour nous », a déclaré à l’AFP Mohanned Jassem, un membre du service de contre-terrorisme irakien (CTS), fer de lance de l’offensive lancée le 17 octobre et soutenue par la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis.
Le président français Emmanuel Macron, dont le pays est un membre actif de cette coalition, a déclaré sur Twitter que la France rendait « hommage à tous ceux, avec (ses) troupes, qui ont contribué » à ce que Mossoul soit « libérée ».
Les forces irakiennes avaient capturé en janvier l’est de la cité puis attaqué l’ouest en février. Les combats se sont ensuite intensifiés à mesure que l’étau se resserrait sur les jihadistes dans la vieille ville, un espace étroit et densément peuplé.
Ces derniers jours, les quelques jihadistes encore présents à Mossoul étaient assiégés dans un réduit de la vieille ville.
Le commandement irakien des opérations conjointes a annoncé dimanche que les forces de sécurité avaient tué « 30 terroristes » qui tentaient de s’enfuir en traversant le fleuve Tigre, qui sépare la cité en deux.
« Les combats ont été très durs, tout spécialement dans le Vieux Mossoul. C’était la plus difficile des batailles », a confié Haitham Mouhan Inaad, un soldat de la 9e division blindée de l’armée, qui dit avoir livré des combats dans plusieurs autres villes.
Pour les forces irakiennes, la victoire à Mossoul sonne comme une revanche. La chute de la cité, le 10 juin 2014, avait été le symbole de l’effondrement de l’Etat irakien et de la débâcle de ses forces de sécurité face aux jihadistes qui avaient déferlé sur l’ouest et le nord du pays.
L’armée avait alors abandonné la ville dans le désordre le plus total, laissant derrière elle armements et véhicules militaires, précieux butin pour les jihadistes.
Les neuf mois de campagne militaire ont entraîné une crise humanitaire majeure, marquée par la fuite de près d’un million de civils selon l’ONU, dont 700.000 sont toujours déplacés.
Les civils piégés dans la ville ont vécu dans des conditions « terribles », subissant pénuries en tout genre, bombardements et intenses combats, et servant de « boucliers humains » d’après les Nations unies.
Parmi les centaines de civils qui fuyaient quotidiennement ces derniers jours, des journalistes de l’AFP à Mossoul ont vu une soixantaine de femmes et enfants, inconsolables et traumatisés.
Parmi eux Fatima, qui venait de revoir le ciel après quatre mois passés dans un sous-sol, sans « presque aucune nourriture ni eau ». Quand son groupe s’est mis en marche, son frère a été touché par une balle de sniper jihadiste, a-t-elle raconté.
Plus loin, une mère de famille, le visage défiguré par le chagrin, a dit à un soldat qu’elle venait juste de perdre son fils de 7 ans dans un bombardement au moment de leur fuite. « Je n’ai rien pu faire », criait-elle.
Mossoul avait une importante dimension symbolique pour l’EI: son chef Abou Bakr al-Baghdadi y avait fait en juillet 2014 son unique apparition publique après la proclamation d’un « califat » sur les vastes territoires conquis par le groupe jihadiste en Irak et en Syrie.
Le sort de Baghdadi demeure incertain: la Russie a affirmé en juin l’avoir probablement tué dans une frappe en Syrie mais personne n’a confirmé sa mort.
L’EI contrôle cependant toujours quelques zones en Irak, notamment les villes de Tal Afar et Hawija, au nord de Bagdad, et des zones désertiques de la province d’Al-Anbar (ouest), frontalière de la Syrie.
Le groupe extrémiste tient également des territoires en Syrie, dont la vallée de l’Euphrate autour de Deir Ezzor, même s’il a perdu du terrain depuis 2015 et que son fief de Raqa (nord) est assiégé par des forces soutenues par Washington.