Macron exclut une dissolution ou un remaniement, avant de s’adresser aux Français

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Emmanuel Macron a exclu mardi devant ses troupes les options les plus radicales pour relancer son quinquennat après l'adoption au forceps de sa réforme des retraites, toujours contestée dans la rue, et avant de sortir de son silence mercredi à la télévision.

Publié le 21/03/2023 à 10:05 - Mise à jour le 21/03/2023 à 11:57

Emmanuel Macron a exclu mardi devant ses troupes les options les plus radicales pour relancer son quinquennat après l'adoption au forceps de sa réforme des retraites, toujours contestée dans la rue, et avant de sortir de son silence mercredi à la télévision.

Le chef de l’État sera mercredi à 13 heures heure de métropole en direct sur TF1 et France 2 pour une interview très attendue tant un climat de crise a gagné le pays.

Son second quinquennat apparaît déjà entravé après moins d’un an : lundi, l’adoption de sa réforme phare s’est faite dans la douleur et le gouvernement d’Elisabeth Borne a survécu de justesse à une motion de censure transpartisane à l’Assemblée nationale.

Mardi, le président Macron a reçu la Première ministre, accompagnée de plusieurs ministres, ainsi que les chefs de sa majorité relative.

Plusieurs participants à cette réunion ont assuré à l’AFP que le chef de l’Etat n’avait l’intention ni de dissoudre l’Assemblée, ni de remanier le gouvernement, ni de convoquer un référendum sur la réforme reculant l’âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans. L’option du retrait du texte, réclamée par les syndicats et les opposants, a aussi été écartée.

Selon l’un de ces participants, il a demandé à ses troupes de faire « d’ici à deux à trois semaines » des « propositions » en vue d’un « changement de méthode et d’agenda des réformes ».

Emmanuel Macron a ensuite déjeuné avec Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher, présidents de l’Assemblée et du Sénat, avant une réunion qui a débuté en soirée avec les parlementaires de son camp.

Elisabeth Borne a aussi enchaîné les réunions, après avoir clamé, dans le huis-clos élyséen, que l’adoption du texte dans la douleur était malgré tout une « victoire ».

« La Première ministre est la seule, et notre majorité est la seule, à pouvoir porter aujourd’hui un projet de gouvernement », a assuré Olivier Véran, porte-parole du gouvernement.

Centrale bloquée

Dans l’immédiat, après de nouvelles manifestations spontanées souvent émaillées de tensions lundi soir, la contestation se poursuit un peu partout en France.

Plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées en début de soirée mardi place de la République, déterminées à « maintenir la pression ». Plus tôt dans l’après-midi, une manifestation avait rassemblé plusieurs centaines d’étudiants opposés à la réforme.

Crédit : Ludovic MARIN / AFP

À Lille, ils étaient aussi plusieurs centaines à nouveau réunis vers 19 heures place de la République. « Grèves, blocages, manifs sauvages ! », « Manu, ta réforme, 49.3 ou pas on n’en veut pas » scandaient les manifestants qui se dirigeaient vers le sud de la ville.

Près de 300 personnes ont été interpellées lundi soir, dont 234 à Paris. Des « arrestations abusives », a protesté le coordinateur de La France insoumise Manuel Bombard, à l’unisson avec le reste de la gauche.

Les forces de l’ordre « ont un devoir d’exemplarité », a répondu à l’Assemblée Elisabeth Borne, tout en leur rendant « hommage ».

Outre la grève reconductible des éboueurs dans plusieurs villes dont Paris, environ 12% des stations-service de France sont à court d’essence ou de gazole et 6% à sec.

Des incidents ont éclaté mardi devant le dépôt pétrolier de Fos-sur-Mer, près de Marseille, où les autorités ont procédé aux premières réquisitions de personnels en grève contre la réforme.

« Rien n’entame la détermination des travailleurs », a prévenu la CGT, avant une nouvelle journée d’actions jeudi, à l’appel de l’ensemble des syndicats.

À moins de 48 heures de cette nouvelle mobilisation, la RATP prévoit un trafic « très perturbé » dans les transports de la capitale et de sa proche banlieue. Idem pour les trains au niveau national, pour la SNCF. 

Le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger s’est dit inquiet de la « colère » et des « violences » qui pourraient s’exprimer du fait de l’adoption d’une loi qui n’avait « pas de majorité à l’Assemblée ».

Des permanences politiques ont fait l’objet de dégradations, dont celles de LR à Amiens, du député Horizons de la Marne Xavier Albertini à Reims ou de son homologue LR Xavier Breton dans l’Ain.

Selon le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, « plus de 1.200 » manifestations non déclarées, « parfois violentes », se sont déroulées sur tout le territoire depuis jeudi. Il a annoncé que « 12.000 policiers et gendarmes » seraient mobilisés jeudi en France dont « 5.000 à Paris ».

« 49.3 verbal »

Politiquement aussi la pression ne retombe pas, après l’utilisation du 49.3 pour faire passer la réforme sans vote.

Le rejet de la motion de censure à seulement neuf voix près a redonné de l’énergie aux oppositions.

Les 19 députés Les Républicains qui ont voté pour faire tomber le gouvernement malgré la position inverse de leur groupe ne seront pas exclus.

À gauche, le député LFI Alexis Corbière a appelé Emmanuel Macron à ne pas « refaire une espèce de 49.3 verbal » en revenant « dire la même chose ». Dans une tribune au JDD, 2.500 élus socialistes ont demandé au chef de l’Etat le retrait de sa réforme. 

La gauche demande aussi un référendum d’initiative partagée (RIP), dont les Sages doivent examiner la recevabilité.

Elle compte aussi sur le Conseil constitutionnel, saisi de la réforme. Le Rassemblement national a déposé mardi son propre recours pour que ce texte « soit mis à la poubelle » et Marine Le Pen a prévenu qu’elle ne participerait pas à « éteindre le feu » de la contestation.

Dans un entretien aux Echos, le patron du Medef Geoffroy Roux de Bézieux a appelé l’exécutif à « s’appuyer sur une méthode différente » pour les prochaines réformes sociales qui devront « être davantage discutées et négociées en amont avec les partenaires sociaux ».

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