L’île de Pâques face au casse-tête de ses déchets

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Publié le 09/09/2016 à 9:44 - Mise à jour le 09/09/2016 à 9:44

Chaque vendredi, la compagnie Lan Cargo transporte dans les soutes de son avion trois tonnes de carton pour les emmener vers le Chili, une infime partie des déchets de la célèbre île de Pâques, qui se creuse la tête pour trouver des solutions.
Gratuitement, l’appareil emporte aussi, le premier jeudi de chaque mois, deux tonnes de plastique, ainsi que deux tonnes d’aluminium le dernier jeudi.
 
Pour l’île, haut lieu touristique connu dans le monde entier pour ses monumentales statues moaï, le problème est double : d’un côté, ses 6 500 habitants et les visiteurs toujours plus nombreux génèrent des déchets dont seuls 20% sont recyclés.
Et de l’autre, ses rivages voient arriver chaque jour les résidus provenant notamment de la gigantesque plaque de plastique flottant au milieu du Pacifique.
Difficile de trouver une solution écologique et durable quand la terre ferme la plus proche est à 3 700 kilomètres de distance.

Seuls 30 à 40% des habitants trient leurs déchets et ceux qui le font « ne le font pas tous bien », déplore Varoia Ike, chargée d’éducation environnementale dans la ville de Rapa Nui (également le nom polynésien de l’île de Pâques).
« Nous dépendons des sociétés de recyclage du continent et les résidus doivent être propres et secs. Seuls la moitié sont dans de bonnes conditions », explique-t-elle à l’AFP.
 
Les 80% de déchets qui ne peuvent être recyclés vont à la décharge, où s’empilent à ciel ouvert les appareils électroménagers, carcasses de voitures et pneus usés.
« Si nous trouvons des gens pouvant recevoir toutes les sortes de déchets qui sont générés, nous les leur enverrons tous, gratuitement s’ils le veulent ! », dit en riant Marcos Haoa, historien travaillant au site local de recyclage de Orito.


Les habitants et les touristes (95 000 l’an dernier) génèrent en moyenne sept tonnes d’ordures par jour dans cette île qui importe presque tout ce qu’elle consomme.
D’ici 2025, on calcule que l’île produira 32 tonnes de carton, 18 de plastique, 12 de boîtes de conserve et neuf de verre.
 
Ce petit territoire en forme de triangle, dont les côtés mesurent 16, 17 et 24 kilomètres, est en outre situé en plein dans les courants marins qui emportent à la fois les déchets du continent et ceux dérivés de l' »île de plastique » du Pacifique sud.
Sans oublier les énormes bateaux de pêche japonais, chinois ou espagnols qui viennent profiter de ses eaux riches en thon, dorade, perche et abandonnent ensuite leurs filets qui finissent sur la côte ou dans l’estomac des poissons.
 
Quand ils ne partent ni au recyclage ni à la décharge, les déchets trouvent parfois une seconde vie. L’architecte américain Michael Reynolds, surnommé « le guerrier des ordures » (« Garbage warrior »), les a ainsi utilisés pour construire l’école de musique locale.
De façon plus artisanale, les murs des bureaux du centre de recyclage ont été bâtis avec des boîtes de conserve, des bouteilles en plastique et des emballages en carton. Au sol, un béton fabriqué à partir de verre pilé.
 
Les habitants tentent aussi de s’organiser pour affronter le problème : depuis 29 ans, Piru Huke, employée de la municipalité, a déclaré la guerre aux déchets venant de la mer.
Deux à quatre fois par an, elle organise des battues de volontaires. La dernière, en mai, a réuni 150 personnes qui ont collecté 1,8 tonne d’ordures sur les rivages.
« Ce n’est pas suffisant », reconnaît-elle, regrettant le manque de moyens, même si une entreprise leur donne chaque mois 100 sacs poubelle. Souvent les volontaires doivent porter les déchets sur le dos ou avec l’aide d’un cheval.
Et au final, « on les enlève de la mer pour les emmener à la décharge », dit Piru : « C’est décourageant ».

AFP

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