L’avenir du thon obèse, au cœur des préoccupations du monde de la pêche

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Publié le 09/11/2018 à 8:05 - Mise à jour le 09/11/2018 à 8:05

Le thon obèse (Thunnus obesus), aussi connu sous le nom de patudo, vit dans l’Atlantique, le Pacifique et l’Océan indien, mais pas en Méditerranée. Il évolue dans des eaux plus profondes que d’autres espèces de thons tropicaux, dont le plus connu est l’albacore, et peut atteindre 180 kilogrammes.

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Début octobre, le comité scientifique de la la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (Cicta) dressait un bilan pessimiste : si les niveaux actuels de pêche se maintiennent, la probabilité que le stock de thon obèse se reconstitue d’ici 2033 est quasi-nul, à 1%. 

« L’espèce se trouve dans le rouge », résume Daniel Gaertner, spécialiste des thons tropicaux à l’IRD, qui participe à l’évaluation des stocks de poissons pour la Cicta.

Un quota annuel de pêche qui doit être limité

En 2015 déjà, la Cicta avait pris une série de mesures : un quota total annuel de pêche de 65 000 tonnes pour sept principaux pays pêcheurs et un moratoire dans des zones précises et à certaines périodes de l’année de l’usage des DCP, des radeaux flottants servant à attirer les poissons avant de les prendre dans des filets, à qui il est reproché de piéger de jeunes thons obèses. 

Mais les autres pays ne sont pas soumis à des quotas, ce qui a fait grimper les prises à 80 000 tonnes en 2017 et le moratoire s’est révélé inefficace. 

Résultat, le thon obèse ne parvient pas à reconstituer ses stocks.

Comment y remédier ? « Il faut réduire les prises, et drastiquement », plaide Paulus Tak, de l’ONG américaine Pew. 

Avec la WWF, ces associations souhaitent une limitation des prises à 50 000 tonnes, ce qui offrirait à l’espèce 70% de chances de se rétablir d’ici 2028.

L’Union européenne, qui participe à la 21e réunion extraordinaire de la Cicta qui se tiendra à Dubrovnik, en Croatie, du 12 au 19 novembre, a fait une proposition en ce sens. 

L’UE, plus gros pêcheur de thon obèse derrière le Japon, plaide pour soumettre les parties prenantes pêchant plus de 500 tonnes par an à des quotas jusqu’en 2023, sans donner de chiffre global. 

L’UE propose aussi de réduire le nombre de DCP par navire et de renforcer les contrôles sur les navires.

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Pour Adam Baske d’IPNLF, une association qui soutient une pêche au thon à la ligne et durable, une baisse des quotas doit s’accompagner d’« un partage de l’accès aux ressources aux petits opérateurs et aux pays en voie de développement »

Certaines communautés aux Açores, à Madère, au Brésil ou encore au Sénégal sont très dépendantes du thon obèse, explique-t-il.

En 2007, la perspective de voir l’une des trois espèces de thon rouge (Thunnus thynnus) ajoutée à la liste de l’ONU des espèces menacées avait contraint la Cicta à instaurer un quota de pêche et de strictes mesures de contrôle sur 15 ans dans l’Atlantique-Est et en Méditerranée. 

Depuis, le stock se reconstitue. Mais des relèvements des quotas en 2014 et 2017 suscitent la crainte des défenseurs de l’environnement. En 2020, ils atteindront 36 000 tonnes. 

Pêche illégale

Autre source d’inquiétude, la pêche illégale. Europol a démantelé en octobre un réseau entre l’Espagne, la France, Malte et l’Italie, et comptabilisé un volume annuel de 2 500 tonnes de thon rouge de provenance illégale, alors que sa pêche est strictement réglementée et contrôlée. 

« Il faut absolument ne pas relâcher les contrôles », insiste Tristan Rouyer, chercheur à l’Ifremer. Alors que la période de pêche est aujourd’hui limitée, l’UE propose de l’autoriser toute l’année sauf pour les plus gros navires, les thoniers senneurs.

Quant aux requins, Sonja Fordham de l’ONG Shark Advocates International espère qu’ils ne seront pas les grands oubliés du Cicta. « Historiquement, ils ne représentent pas une priorité », déplore-t-elle.

 

Rédaction web avec AFP

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