L’acteur Jean-Pierre Bacri est décédé

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À l'écran, il n'avait jamais le sens de la fête, mais restera le râleur le plus attachant du cinéma français: le comédien, scénariste et dramaturge Jean-Pierre Bacri est mort lundi d'un cancer, à l'âge de 69 ans.

Publié le 18/01/2021 à 13:51 - Mise à jour le 18/01/2021 à 13:52

À l'écran, il n'avait jamais le sens de la fête, mais restera le râleur le plus attachant du cinéma français: le comédien, scénariste et dramaturge Jean-Pierre Bacri est mort lundi d'un cancer, à l'âge de 69 ans.

Figure du théâtre et du cinéma, l’acteur « est mort en début d’après-midi », a déclaré à l’AFP son agente, Anne Alvares-Correa. 

« Une immense tristesse, un immense acteur ! Fais chier », a lancé sur Twitter l’actrice Alexandra Lamy, empruntant au vocabulaire préféré des personnages de Bacri à l’écran.

Car il était le maître des anti-héros râleurs et désabusés, mais profondément humains : de l’humour absurde de « Didier », dans la peau d’un entraîneur de foot qui doit garder un homme-chien, aux comédies ciselées avec sa complice Agnès Jaoui, en passant par l’enfer de l’organisation d’un mariage dans le « Sens de la fête », d’Eric Toledano et Olivier Nakache.

« Notre tristesse est immense, quelle chance Jean-Pierre de t’avoir connu », a témoigné le duo de réalisateurs sur les réseaux sociaux, dont le film sera rediffusé dimanche sur TF1.

Le président Emmanuel Macron lui a rendu hommage sur Twitter lundi soir: « Il avait le sens de la fête et le goût des autres. Jean-Pierre Bacri, le plus tendre de nos râleurs s’en est allé. Comme une image, son humanité laconique et sensible continuera de peupler nos vies ».

Bacri était également scénariste, et avait écrit plusieurs pièces de théâtre et des films avec Agnès Jaoui. On doit à leur duo des chefs d’oeuvre doux-amer comme « Le goût des autres » (2000) ou « Un air de famille » (d’abord une pièce de théâtre en 1994, puis portée à l’écran en 1996, avec une distribution identique).

Derrière ses personnages drôles et dépressifs, Bacri avait « le goût de la vie… Le sens de la vie … L’extrême dignité, au bout du chemin », a écrit le président du festival de Cannes Pierre Lescure sur les réseaux sociaux.

Jean-Pierre Bacri « n’était pas méprisant mais il était exaspéré par la bêtise humaine. Et n’ayant pas sa langue dans sa poche, il le montrait », a témoigné son prédécesseur Gilles Jacob, rappelant cette « voix catégorique et hésitante, tranchante et bègue, caressante et chantante ».

Jaoui, sa complice

Qu’ils l’aient croisé ou non sur les plateaux, de nombreuses personnalités du cinéma lui ont rendu hommage: de Nathalie Baye (« Le génial, merveilleux Jean-Pierre Bacri nous a quittés… chagrin énorme… ») à Gilles Lellouche (« Immense immense immense tristesse ») en passant par Michèle Laroque (« Il sera à jamais dans mon coeur. J’ai du mal à imaginer le cinéma sans lui »).

Christian Clavier, qui avait tourné « Mes meilleurs copains » (1989) avec lui, se souvient d’un « homme d’une grande culture et d’une grande intelligence ».

Pour la plupart des spectateurs, Bacri restera pour des rôles taillés sur mesure, comme celui du patron de café, en gilet de laine sans manches dans « Un air de famille ».

Et des répliques cultes : « C’est la majorité ! Laquelle d’abord ? Celle qui croyait que la Terre était plate ? Celle qui veut rétablir la peine de mort ? … Celle qui se met une plume dans le cul parce que c’est la mode ? Laquelle exactement ? », s’énervait son personnage, Georges, dans « Cuisine et dépendances » (1991 pour la pièce de théâtre, 1993 pour le film). 

Son personnage de dépressif attachant s’exportait même hors de France : « Le sens de la fête » a attiré deux millions de spectateurs à l’étranger, en plus des trois millions dans l’Hexagone.

Il avait gagné depuis longtemps la reconnaissance de ses pairs : l’Académie des César, qui lui a décerné au total cinq statuettes, a salué un « artiste inoubliable et incomparable ; un auteur généreux, un comédien sensible ».

Celle qui le connaissait mieux que tous est probablement sa complice Agnès Jaoui, qui fut longtemps sa compagne. Ce week-end encore, elle confiait dans une interview au quotidien Le Monde combien Bacri avait compté pour elle, dès leur rencontre en 1987.

« Voilà quelqu’un qui exprimait ce que je ressentais sans même me l’être formulé ; qui avait des réflexions qui me percutaient, me soulageaient, témoignaient de valeurs communes, d’un rapport au bien et au mal que je partageais, avec une conviction qui m’émerveillait car elle était si singulière ! », déclarait-elle.

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