Voitures brûlées, commerces incendiés, automobilistes rackettés et caillassés : les incidents de la nuit de lundi à mardi avaient déjà conduit le préfet Amaury de Saint-Quentin à instaurer mardi un couvre-feu partiel sur la moitié des communes de l’île. “C’est une mesure forte, inédite, elle me paraît adaptée à la situation, à cette menace que nous devons combattre”, a-t-il après avoir décrété une interdiction de circuler dans douze communes de l’île entre 21H00 et 06H00. En attendant, tous les établissements scolaires, des crèches à l’université, ainsi que les administrations sont fermées. La quasi-totalité des événements culturels et sportifs ont été annulés. L’aéroport international Roland-Garros a fermé à 18 heures locales (15 heures à Paris) jusqu’à mercredi matin, obligeant les compagnies aériennes à revoir leurs horaires ou à annuler des vols.
Selon la préfecture, il y a eu une dizaine d’interpellations et cinq policiers ont été blessés. Des renforts de gendarmes mobiles sont arrivés lundi de Mayotte. D’autres étaient attendus, sans que la préfecture en précise le nombre.
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La crise actuelle est partie du mouvement des “gilets jaunes” qui, comme partout en France, ont protesté samedi contre la hausse des prix des carburants et la baisse du pouvoir d’achat. Mardi après-midi, 37 barrages routiers étaient actifs sur les routes de l’île.
Mais cette grogne, pacifique au départ, a rapidement dégénéré lorsque des bandes de jeunes ont organisé des blocages sur plusieurs grands axes et réclamé aux automobilistes un droit de passage allant de 5 à 20 euros.
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Marie Andrée, jeune mère de deux enfants, partage la même exaspération. “Ces jeunes décrédibilisent le mouvement du 17 novembre. En plus ils brûlent des poubelles, des voitures de particuliers eux-mêmes défavorisés”, s’émeut-elle devant un supermarché vandalisé au Moufia, un quartier de Saint-Denis.
Selon Laurent, 23 ans, titulaire d’un master d’anglais et en recherche d’emploi, “c’est toute une réflexion sur le profond ‘mal-vivre’ de La Réunion qu’il faudrait mener”. “On s’apercevrait que le mouvement des “gilets jaunes” et celui des émeutiers ont la même source : le sentiment d’être abandonnés”, insiste-t-il.
La présidente du Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, qui soutient les “gilets jaunes”, a jugé “essentiel de rétablir l’ordre” à La Réunion; mais aussi “d’entendre et de renouer le dialogue” avec “cette France des abandonnés qui ne s’expriment plus par le vote” et sont “tentés par le repli et l’expression populaire de la rue”.