Coronavirus : « Il n’y a pas d’impréparation » en Outre-mer, assure Girardin

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La ministre des Outre-mer Annick Girardin a assuré mardi qu'il n'y avait "pas d'impréparation" en outre-mer face à la crise du coronavirus et que les moyens mis en place dans les territoires ultramarins répondaient "aux même critères" que dans l'hexagone.

Publié le 31/03/2020 à 8:58 - Mise à jour le 31/03/2020 à 8:58

La ministre des Outre-mer Annick Girardin a assuré mardi qu'il n'y avait "pas d'impréparation" en outre-mer face à la crise du coronavirus et que les moyens mis en place dans les territoires ultramarins répondaient "aux même critères" que dans l'hexagone.

Les outre-mer, qui comptent à ce jour quelque 666 cas avérés, et une dizaine de décès sur l’ensemble des territoires, ont « un mois de décalage » par rapport à l’hexagone sur l’impact de l’épidémie, a-t-elle souligné, sur Outre-mer la 1ere.  

« Ce mois d’avance on l’a gardé encore aujourd’hui », a-t-elle insisté. « Nous avons un temps d’anticipation qui est supérieur à celui que nous avons dans l’hexagone », a ajouté la ministre. 

« Il n’y a pas d’impréparation, ce n’est pas vrai. Les moyens qui ont été mis en place jusqu’à aujourd’hui dans les territoires d’outre-mer répondent aux mêmes critères, à la même organisation qu’en métropole, que l’on parle de masques, de tests, de respirateurs », a souligné Mme Girardin.

« Les demandes exprimées par les Agences régionales de santé sont fournies petit à petit, il y a entre une livraison et cinq livraisons de masques depuis début février » dans chaque territoire ultramarin, a-t-elle précisé.

Selon elle, « la mobilisation est générale » en outre-mer « pour se préparer à cette crise si nous devions être touchés comme a été touché l’hexagone ».

Un point aérien ?

Les Outre-mer sont confinés comme l’hexagone, avec en plus des restrictions de liaisons aériennes, des quartorzaines pour les arrivants et le renfort prochain de deux porte-hélicoptères militaires, dans l’océan Indien et la zone Antilles-Guyane.

La ministre a assuré que la continuité territoriale « pourra aller jusqu’à un pont aérien, c’est-à-dire des avions militaires ».

Elle a enfin annoncé avoir saisi le conseil scientifique pour étudier la possibilité de « mettre en place des doctrines différentes de celles de l’hexagone » en matière de tests ou d’isolement. « Le conseil scientifique d’ici le 6 avril devrait nous donner une doctrine spécifique. On a le temps encore de le faire et de bien le faire ».

« Alertée » sur des hausses de prix outre-mer, elle a souligné que ce n’était « pas le moment d’avoir ces tentations d’aller à la hausse. Si ça devait continuer, je n’exclus pas l’idée de demander aux préfets de fixer les prix de certains produits », a-t-elle dit.

Quid du sentiment d’impréparation des spécialistes

L’épidémie de coronavirus prend de l’ampleur en Outre-mer, mais les contours de la réponse sanitaire restent encore très flous et donnent un sentiment d’impréparation pour de nombreux spécialistes du dossier.

Si les Outre-mer sont pour l’instant bien moins touchés que l’Hexagone, la fragilité de leurs infrastructures sanitaires, leur insularité (pour la quasi majorité d’entre eux) et leur éloignement font craindre une catastrophe sanitaire.  « Ça va être une catastrophe », s’inquiète une source proche des discussions interministérielles.

« Nous connaissons la fragilité sanitaire dans ces territoires », a souligné mardi le Premier ministre à l’Assemblée nationale. C’est pour cela « que nous avons pris des décisions en avance de phase par rapport à la situation épidémique », comme les mesures de confinement quand les Outre-mer étaient au stade 1 de l’épidémie.

Le gouvernement a aussi « choisi d’augmenter la capacité d’accueil en réanimation (…) pour apporter une réponse qui, quoi qu’il arrive, sera une réponse délicate à une situation délicate », a-t-il reconnu. 

L’opération militaire « Résilience » lancée mercredi par le président Emmanuel Macron comprend aussi un volet d’aide aux populations ultra-marines.

Deux porte-hélicoptères amphibie (PHA), le Mistral et le Dixmude, disposant chacun d’un hôpital à bord,doivent notamment être déployés courant avril respectivement vers l’île de la Réunion, non loin de Mayotte, et dans la zone Antilles/Guyane.

Mais les militaires peinent encore à savoir quels moyens médicaux ils sont censés embarquer avec eux. « On n’a pas de réponse à la question des besoins », se désespère un haut gradé.

« Je n’ai pas du tout le sentiment que les choses soient faites pour nous épargner la catastrophe et le cataclysme », déplore le député GDR (Gauche démocrate et républicaine) de Guyane Gabriel Serville dans une lettre ouverte à l’ARS de son territoire. 

« On a plutôt l’impression que tout se gère au fil de l’eau »

« On a le sentiment qu’il n ‘y a pas de pilote à bord », confirme-t-il à l’AFP, alors qu’il faut « des moyens en personnels, en matériels, en lits de réa ». Même si la Guyane ne compte à l’heure actuelle que 37 cas, « je crains le pire dans un territoire en retard en terme de santé et avec des poches de misère où la distanciation sociale n’est pas possible ».

À Mayotte, « il n’y a pas d’organisation ou d’anticipation » de cette crise, renchérit le député LR Mansour Kamardine. « On a plutôt l’impression que tout se gère au fil de l’eau »

Alors que l’épidémie a commencé en février dans l’Hexagone, le premier cas n’a été recensé que le 1er mars à Mayotte. « On avait plusieurs semaines de décalage pour anticiper, dans une collectivité où la santé est à l’abandon, mais on n’a rien fait. Maintenant on a 84 cas ».  

La ministre des Outre-mer Annick Girardin a répondu mardi sur Outre-mer la 1ere qu’il n’y avait « pas d’impréparation » et que les moyens mis en place répondaient « aux même critères » que dans l’hexagone (voir plus haut, NDLR).

« Quand j’ai souligné que si on attendait trop il n’y aurait plus les moyens d’acheminer des renforts, on m’a traité de ‘marchand de tristes nouvelles' », ajoute le député mahorais. Quant au porte-hélicoptères promis, « on ne sait toujours pas s’il sera armé pour un hôpital ou pour de la logistique ».

« Les Outre-mer ont de très fortes attentes sur les bateaux que nous envoyons », reconnaît une autre source militaire. Mais « il y a des tergiversations autour de la nature de la mission ». « On a une boîte à outils, on attend maintenant que le politique nous dise comment l’utiliser », ajoute cette source. 

Des décisions pourraient être prises mercredi lors du prochain Conseil de défense.

Le Dixmude, dont l’appareillage pour les Antilles est programmé « dans les prochains jours », est « en cours de reconfiguration », souligne l’état-major, sans pouvoir donner de détail.

Le dossier de presse de l’opération Résilience publié lundi reste vague. Ainsi le bâtiment « pourrait livrer du fret, soulager les hôpitaux en fonction de sa configuration » ou encore « projeter des forces de sécurité entre les départements de Martinique, de Guadeloupe et de Guyane ». Le Mistral, lui, pourrait « être utilisé comme hôpital de délestage » mais « à condition de bénéficier d’un renfort sanitaire pour armer l’hôpital ».

La tension en métropole sur les moyens sanitaires disponibles ne facilitent pas l’équation. Le scénario d’un démontage au profit de la Guyane de quelques lits de réanimation de l’hôpital militaire de campagne récemment déployé à Mulhouse, saturé de malades, a été rejeté, a-t-on appris de source proche du dossier.

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